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d’eunuques, un nombreux essaim de suivantes, et toutes les autres fantaisies les plus ridicules ; elles avaient secoué tout cela, rejeté loin d’elles le luxe du monde, et ne cherchaient qu’une chose, d’avoir part à la société des Apôtres, et de conquérir avec eux un même butin spirituel. Aussi Priscille n’était pas la seule qui se comportât de la sorte ; toutes les autres faisaient de même. Car saint Paul parle d’une certaine Persis, qui, dit-il, a beaucoup travaillé pour nous (Rom. 16,12), et il admire Marie et Tryphène pour les mêmes labeurs, c’est-à-dire, parce qu’elles travaillaient avec les Apôtres et s’étaient préparées aux mêmes luttes. Mais alors comment donc, écrivant à Timothée, lui dit-il : Quant à la femme, je ne la charge pas d’enseigner, ni d’exercer l’autorité sur son mari? (1Ti. 2,12) C’est dans le cas où l’homme aussi est pieux, où il possède la même foi, où il en partage la même sagesse ; mais lorsque le mari est hors de la foi, lorsqu’il vit dans l’erreur, saint Paul ne refuse pas à la femme cette autorité : ainsi, écrivant aux Corinthiens, il leur dit : Que la femme dont le mari est hors de la foi, ne se sépare pas de lui. Que sais-tu en effet, ô femme, si tu ne sauveras pas ton mari? (1Co. 7,13.16) Or, comment la femme qui a la foi aurait-elle pu sauver son mari qui n’avait point la foi ? Il est clair que c’est en le catéchisant, en l’instruisant, en l’amenant à la foi, exactement comme Priscille l’a fait pour Apollo. D’ailleurs, lorsqu’il dit : Je ne charge pas la femme d’enseigner, il parle de l’enseignement que l’on donne du haut de la chaire, du discours en public, de celui qui est dans les attributions du sacerdoce ; mais il n’a pas interdit à la femme de donner en particulier des exhortations et des conseils. Car si cela eût été défendu, il n’aurait pas donné des éloges à celle qui le faisait.
4. Que les maris écoutent cela, que les femmes l’écoutent aussi : ces dernières, afin d’imiter une personne du même sexe et de la même nature qu’elles ; les premiers, pour ne pas se montrer plus faibles qu’une femme. En effet, quelle excuse sera la nôtre, quel pardon mériterons-nous, lorsqu’ayant l’exemple de ces femmes qui ont fait preuve d’un si grand zèle et d’une si haute sagesse, nous restons perpétuellement enchaînés par les affaires du monde. Que tous l’entendent, dignitaires et subordonnés, prêtres et laïques, afin que les uns, ait lieu d’admirer les riches et d’être à la piste des familles illustres, recherchent la vertu jointe à la pauvreté, qu’ils ne rougissent point de leurs frères plus dénués qu’eux, qu’ils ne délaissent pas là le faiseur de tentes, le corroyeur, le marchand d’étoffes de pourpre, le forgeron, pour aller faire leur cour aux potentats ; afin aussi que les subordonnés ne s’imaginent point que rien les empêche de recevoir chez eux les saints, mais que, songeant à la veuve qui reçut Élie lorsqu’elle n’avait qu’une poignée de farine (1Ro. 17,10 et suiv), et à ceux-ci, qui donnèrent deux ans l’hospitalité à saint Paul, ils ouvrent leurs maisons à ceux qui ont besoin, et que tout ce qu’ils possèdent, ils le mettent en commun avec leurs hôtes. N’allez pas me dire, en effet, que vous n’avez pas de domestiques pour vous servir. Quand vous en auriez dix mille, Dieu vous ordonne de cueillir vous-même le fruit de l’hospitalité. C’est pourquoi saint Paul s’adressant à la femme veuve, et lui commandant d’exercer l’hospitalité, lui ordonnait de le faire non par d’autres, mais par elle-même. Car après avoir dit : Si elle a exercé l’hospitalité, il ajouta : Si elle a lavé les pieds des saints. (1Ti. 5,10) Il n’a pas dit : si elle a dépensé de l’argent, ni : si elle a ordonné à ses domestiques de rendre aux saints ce service, mais : si elle l’a accompli elle-même. C’est pour cela aussi qu’Abraham, qui avait trois cent dix-huit serviteurs, courait lui-même au troupeau, portait le veau, et faisait tous les autres offices, associant sa femme aux fruits de cette hospitalité. C’est encore pour cela que Notre-Seigneur Jésus-Christ vient au monde dans une étable ; qu’une fois né, il est élevé dans sa famille, et que, devenu grand, il n’avait pas où reposer sa tête, pour vous enseigner de toutes les manières à ne pas soupirer après les splendeurs de cette vie, à aimer en tout la simplicité, à rechercher la pauvreté, à fuir le luxe, et à vous orner intérieurement. Car, dit l’Écriture, la gloire de la fille d’un roi est tout intérieure. (Psa. 44,14) Si vous avez l’intention de l’hospitalité, vous en avez le trésor tout entier, quand vous ne posséderiez qu’une obole ; mais si vous avez dans le cœur de l’aversion pour l’humanité et pour vos hôtes, nageriez-vous dans l’abondance de toutes choses, vos hôtes sont à l’étroit dans votre maison. Priscille ne possédait pas de lits à garnitures d’argent, mais elle possédait une grande chasteté ; point de couverture de parade, mais une intention de bonté et d’hospitalité ;