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mis en prison, accablés d’injures et battus de verges. Que dit l’Écriture ? Ils sortirent du conseil remplis de joie de te qu’ils avaient été jugés dignes de souffrir des opprobres pour le nom de Jésus. (Act. 5,41)
4. C’est ce que nous avons vu de nos jours ; et pour reconnaître la vérité de ce que je dis, on peut se rappeler ce qui est arrivé dans le temps des persécutions. Attachée au chevalet, cruellement tourmentée et déchirée, toute couverte de sang, une vierge tendre, faible et délicate, était comme une jeune épouse, couchée sur le lit nuptial ; le désir du royaume céleste lui faisait supporter toutes ses souffrances avec satisfaction, et elle était couronnée au milieu même du combat. Examinez quel spectacle c’était de voir un tyran escorté de tous ses gardes, environné d’armes et de glaives menaçants, vaincu par une jeune vierge. Vous voyez donc que l’affliction même fournit un grand sujet de se glorifier ; et vous pouvez rendre témoignage à la vérité de mes discours. Avant que les martyrs aient reçu leur récompense, le prix de leurs combats et la couronne, lorsque leurs corps viennent d’être réduits en cendre et en poussière, nous accourons avec le plus grand empressement pour les honorer, nous convoquons une assemblée spirituelle, nous les proclamons vainqueurs, nous les couronnons pour les blessures qu’ils ont reçues, pour le sang qu’ils ont répandu, pour les afflictions, les peines et les tortures qu’ils ont essuyées. Tant il est vrai, je le répète, que les afflictions fournissent un sujet de se glorifier, même avant la récompense.
Songez combien Paul était grand, lorsqu’il habitait les prisons et qu’il était traîné devant les tribunaux ; songez combien il était illustre et distingué aux yeux de tous les hommes, et surtout de ceux qui lui faisaient la guerre et qui le persécutaient. Que dis-je, illustre aux yeux des hommes ? n’était-il pas plus redoutable aux démons lorsqu’il était battu de verges ? C’est lorsqu’il était chargé de liens et qu’il faisait naufrage : c’est alors qu’il opérait les plus grands prodiges, qu’il triomphait pleinement des puissances qui lui étaient opposées. Comme donc il était intimement convaincu que les afflictions sont profitables à l’âme, il disait : C’est lorsque je suis faible que je suis fort. Ensuite il ajoute : Aussi je sens de la satisfaction et de la joie dans les faiblesses, dans les outrages, dans les nécessités où je me vois réduit, dans les persécutions, dans toits les maux que je souffre, afin que la puissance de Jésus-Christ habite en moi[1]. (2Co. 12,10) C’est par cette raison encore qu’ayant à parler avec force contre des hommes qui avaient fixé leur séjour à Corinthe, qui s’estimaient beaucoup eux-mêmes, et qui condamnaient les autres, que, se trouvant obligé de prendre un ton de fierté dans son épître, et de nous tracer un portrait avantageux de lui-même, il ne se loue ni par les prodiges et les miracles qu’il a opérés, ni par les honneurs qu’il a obtenus, ni par la vie paisible qu’il a menée, mais par les prisons où il a été conduit, par les tribunaux devant lesquels il a paru, par la faim, le froid, les guerres et les persécutions qu’il a essuyées. Sont-ils ministres de Jésus-Christ ? dit-il ; quand je devrais passer pour imprudent, j’ose dire que je le suis plus qu’eux. (2Co. 11,23) Et comment prouve-t-il qu’il l’est plus qu’eux ? comment établit-il sa supériorité ? J’ai plus souffert de travaux, plus reçu de coups, plus enduré de prisons, je me suis souvent trouvé près de la mort, et le reste. S’il faut se glorifier, dit-il encore\it, je me glorifierai dans ma faiblesse. Vous voyez qu’il se glorifie de ses tribulations plus qu’on ne s’applaudit des plus brillantes couronnes, et qu’il dit en conséquence : non seulement, mais nous nous glorifions encore dans les afflictions. Que signifie non-seulement ? c’est-à-dire, non-seulement nous ne nous laissons pas abattre par les afflictions et par les peines, mais nous nous glorifions de ce qui nous arrive de fâcheux, comme d’un moyen de parvenir au comble de l’honneur.
Ensuite, après avoir dit que les afflictions sont la voie qui conduit à la plus grande gloire, un sujet de se glorifier et de s’applaudir, comme sans doute la gloire procure du plaisir, parce qu’il n’y a pas de vrai plaisir sans gloire ni de vraie gloire sans plaisir ; après avoir montré, dis-je, que les afflictions donnent de la splendeur et du lustre, sont un sujet de se glorifier, il rapporte un de leurs avantages, le plus important, un des fruits, le plus précieux et le plus rare qu’on en peut attendre. Voyons quel est ce fruit, cet avantage : Sachant donc, dit-il, que l’affliction produit la patience, la, patience l’épreuve, l’épreuve l’espérance ; et

  1. Saint Jean Chrysostome a cité, sans doute, de mémoire tout ce passage dont les paroles sont différemment disposées dans le texte de l’Écriture.