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s’applique aux catéchumènes, et non simplement aux riches. Considérez, mes bien-aimés, comme le maître se retire de l’église, tandis que le fidèle, quoique n’étant qu’un serviteur, assiste aux mystères ; la maîtresse se retire, et la servante reste. Car Dieu n’a point d’égard à la qualité des personnes. (Galates, 2,6) Il n’y a donc, dans l’église, ni esclave, ni homme libre : l’Écriture ne reconnaît pour esclave que l’homme asservi au péché. Car, dit l’Écriture, celui qui fait le péché, est esclave du péché (Jn. 8,34) et elle reconnaît comme libre celui qui a été délivré par la grâce divine.
C’est avec la même confiance que l’empereur et le pauvre s’approchent de cette table, avec le même honneur, et souvent même le pauvre s’en approche avec plus d’honneur. Pourquoi ? C’est que l’empereur, embarrassé de mille affaires, ressemble à un vaisseau sur lequel l’écume des flots jaillit de toutes parts, et les péchés font sur lui des taches nombreuses ; mais le pauvre, qui n’a de souci que celui de la nourriture nécessaire, dont la vie, en dehors des affaires, se passe tranquille, est comme dans un port, et il s’approche avec une grande assurance de notre table. Voyez encore : dans les fêtes du siècle, le pauvre a le front bas, le – riche resplendit, fier non seulement de sa table, mais de ses vêtements, car et l’aspect de la table et l’aspect des vêtements produisent même effet. Le pauvre, à la vue du riche recouvert d’une robe d’un grand prix, est frappé de tristesse, il se regarde comme le plus infortuné de tous les hommes. Ici, cette indigence disparaît ; car tous n’ont qu’un seul et même vêtement, le bain qui procure le salut. Car, dit l’Apôtre, vous tous qui avez été baptisés en Jésus-Christ, vous avez été revêtus de Jésus-Christ. (Gal. 3,27) Donc, ne déshonorons pas cette fête par l’ivresse ; car Notre-Seigneur a également honoré les riches et les pauvres, les serviteurs et les maîtres ; répondons à la bonté que le Seigneur nous a témoignée : la meilleure manière d’y répondre, c’est la pureté dans notre conduite, c’est la tempérance de notre âme. Cette fête, cette assemblée peut se passer de richesse, de frais dispendieux, mais il y faut l’excellence de la volonté, de la pensée. C’est le prix nécessaire de ce qui se trouve ici. Rien de corporel n’est ici en vente, qu’y vient-on chercher ? les paroles que Dieu fait entendre, les prières des Pères, les bénédictions des prêtres, la concorde, la paix, l’harmonie, présents spirituels, qui se paient avec l’esprit.
Célébrons cette fête, la plus grande de toutes les fêtes, fête brillante, la résurrection du Seigneur ; célébrons-la tous ensemble, avec joie, avec piété : car le Seigneur est ressuscité, et il a ressuscité la terre avec lui. Il est ressuscité, en rompant les liens de la mort. Adam a péché, Adam est mort ; mais le Christ n’a point péché, et pourtant il est mort. Chose étrange et qui surprend notre esprit : celui-là a péché, il est mort ; celui-ci n’a pas péché, et il est mort ; pourquoi ? C’est afin que celui qui est mort pour avoir péché, pût être affranchi par celui qui, sans avoir péché, mourut de tous les liens de la mort. On voit des faits analogues dans les affaires d’argent. Souvent un débiteur insolvable est retenu en prison ; un autre, qui ne doit rien, mais qui peut payer, donne de l’argent et délivre le débiteur. C’est ce qui s’est passé à l’occasion d’Adam. Adam était débiteur, le démon le détenait en prison, Adam n’avait pas de quoi payer ; le Christ ni ne devait rien, ni n’était détenu par le démon, mais il pouvait acquitter la dette. Il est venu, il a payé la dette de la mort pour celui qui était détenu par le démon, il a affranchi le débiteur.
4. Comprenez-vous les admirables effets de la résurrection ? Nous avions subi une double mort, il nous faut donc attendre une double résurrection. La mort du Christ fut simple, voilà pourquoi sa résurrection a été simple aussi. Comment cela ? Je m’explique : Adam est mort, et par le corps et par l’âme ; il est mort et par le péché et par la nature : Le jour où vous mangerez du fruit de l’arbre, vous mourrez d’une vraie mort. (Gen. 2,17) Toutefois ce n’est pas en ce jour qu’Adam a subi la mort par la nature, mais, par le péché, il a été frappé de mort ; cette dernière mort, c’est la mort de l’âme ; l’autre est la mort du corps. Mais maintenant ces mots, la mort de l’âme, ne veulent pas dire que l’âme meurt, car elle est immortelle ; mais la mort de l’âme c’est le péché et le châtiment éternel. Delà ces paroles du Christ : Ne craignez pas ceux qui tuent le corps, mais qui ne peuvent tuer l’âme ; craignez plutôt celui qui peut perdre et l’âme et le corps dans l’enfer. (Mt. 10,28) Ce qui est perdu subsiste, mais hors de la vue de celui qui l’a perdu. Donc, je vous disais que notre mort était double ; par conséquent notre résurrection doit être double aussi.