Page:Jean Chrysostome - Oeuvres complètes, trad Jeannin, Tome 3, 1864.djvu/219

Cette page n’a pas encore été corrigée

HOMÉLIE SUR LE MOT CŒMETERIUM ET SUR LA CROIX.

ANALYSE.


Saint Chrysostome prononça cette homélie une vingtaine de jours avant le panégyrique des saintes Bernicé, Prosdocé et Domnine. – on en a la preuve dans le début même de ce panégyrique : Il n’y a pas encore vingt jours que nous avons célébré la mémoire de la croix… Vous voyez aujourd’hui la démonstration pratique de ce que je vous disais alors sur ce texte Il a brisé les portes d’airain et rompu les barreaux de fer. (Psa. 10, 16) Les Grecs ont pensé que saint Chrysostome faisait ici mention de la fête de la Sainte-Croix qui tombe le 14 de septembre, et ils en ont conclu qu’ils devaient célébrer vingt jours après, c’est-à-dire le 4 octobre, la fête de sainte Domnine et de ses filles ; mais c’est à tort, ce n’est pas le jour de la Sainte-Croix (14 septembre), fête non encore établie alors, que saint Chrysostome prononça ce discours, mais le jour du vendredi saint, comme l’orateur le donne à entendre en plusieurs endroits. – Là-dessus écoutons Tillemont : Reste à dire que la fête de sainte Domaine et de ses filles se célébrait à Antioche, non le 4 octobre, mais le 14 avril, jour auquel elle est marquée au martyrologe de saint Jérôme et des autres. Maintenant parmi les 12 années que saint Chrysostome prêcha à Antioche, quelle est celle qui remplit la condition de Pâques précédant de 20 jours environ le 14 avril ? c’est l’année 392. En cette année Pâques tombait le 28 mars : du 28 mars au 14 avril l’intervalle est de 18 jours, ce qui fait juste 20 jours depuis le vendredi saint. Saint Chrysostome prêcha donc cette homélie le 28 mars, jour du vendredi saint de l’an 392, hors de la ville, dans l’église du cimetière, qu’il qualifie du nom de martyre, parce que les corps de plusieurs martyrs y reposaient. – C’était l’usage, dans l’Église d’Antioche, de s’y assembler le jour du vendredi saint : saint Jean Chrysostome examine quelle pouvait être la raison de cet usage. – II explique ensuite le mot coemeterium, d’où nous avons pris notre nom de cimetière et qui signifie en grec lieu de repos et de sommeil. – Il présente éloquemment les principaux bienfaits, les principaux avantages de la croix. – Il finit par des reproches adressés à ceux qui faisaient du bruit en participant aux sacrés mystères. Cette homélie est de la plus grande beauté.

1. J’ai souvent cherché en moi-même pourquoi nos pères, abandonnant les temples des villes, ont réglé par une loi qu’en ce jour nous nous rassemblerions hors des portes ; car il me semble qu’ils n’ont pas agi au hasard et sans une raison suffisante. J’ai donc cherché d’où avait pu naître un pareil usage, et par la grâce de Dieu, je crois avoir trouvé la vraie cause, la cause la plus naturelle et la plus convenable à la fête présente. Et quelle est cette cause ? Nous faisons la mémoire de la croix ; or, Jésus a été crucifié hors des portes de la ville : voilà pourquoi on nous fait sortir de la ville. Les brebis, dit l’Écriture, suivent leur pasteur ; où est le prince doivent être les soldats ; où le corps se trouve, les aigles se rassemblent. (Mat. 24, 28. – Luc. 17, 37) Voilà donc pourquoi nous nous rassemblons hors des portes. Mais il faut prouver ce que nous avançons, surtout par les divines Écritures ; car, afin qu’on ne croie pas que c’est une simple conjecture de ma part, je vais m’appuyer du témoignage de saint Paul. Que dit donc cet apôtre en parlant des sacrifices ? Les corps des animaux, dont le sang est porté par le souverain pontife dans le sanctuaire pour l’expiation du péché, sont brûlés hors du camp. Et c’est pour cette raison que Jésus, devant sanctifier le peuple par son propre sang, a, souffert hors des portes de la ville. Sortons donc aussi hors du camp, et allons à lui en portant l’ignominie de la croix. (Héb. 13, 11-13) Saint Paul l’a dit, saint Paul l’a ordonné ; nous avons obéi, et nous sommes sortis des portes. Voilà donc pourquoi nous nous rassemblons hors de la ville.