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2) ». C’est-à-dire : Vous êtes fort ? Faites sentir votre force à l’infirme ; faites qu’il sache par expérience quelle est votre vigueur, pensez à le satisfaire. Et il ne dit pas seulement à le satisfaire, mais :« Dans ce qui est bon » ; et il ne se borne pas à dire : Dans ce qui est bon ; le parfait aurait pu répondre : Voyez, je l’attire vers ce qui est bon ; mais l’apôtre ajoute : « Et qui peut l’édifier ». Si donc vous avez en partage la richesse, en partage la force, ce n’est pas pour votre satisfaction à vous, mais pour satisfaire le pauvre et celui qui est dans le besoin ; c’est ainsi que vous jouirez de la véritable gloire, et que vous serez d’une très-grande utilité. La gloire terrestre est prompte à s’envoler ; la gloire spirituelle subsiste, si vous ne vous proposez que l’édification. Voilà pourquoi l’apôtre réclame de tous ce zèle pour le prochain : il ne dit pas seulement, que tel ou tel, mais : « Que chacun de vous ».
Ensuite, comme il a donné un précepte d’une grande portée, comme il a prescrit de se relâcher de sa perfection propre afin de corriger les faiblesses du prochain, il fait encore intervenir le Christ. « Puisque Jésus-Christ n’a pas cherché à se satisfaire lui-même (3) ». C’est ce que l’apôtre ne manque jamais de faire. Quand il parle de l’aumône, il montre le Christ, en disant : « Vous connaissez la bonté de Notre-Seigneur Jésus-Christ qui, étant riche, s’est rendu pauvre pour nous » (2Cor. 8,9) ; pour persuader la charité, c’est encore du Christ qu’il s’appuie, disant : « Comme le Christ nous a aimés » (Eph. 5,25) ; et quand il conseille de supporter la honte et d’affronter les dangers, il a encore recours au Christ, disant : « Qui, au lieu de la vie heureuse, dont il pouvait jouir, a souffert la croix et méprisé la honte ». (Héb. 12,2) De même ici, l’apôtre propose Jésus-Christ pour modèle en le priant de supporter les faiblesses des autres, et il cite un oracle es prophètes : « Selon qu’il a été écrit : Les injures qu’on vous a faites sont retombées sur moi ». Mais maintenant, que signifient ces paroles : « N’a pas cherché à se satisfaire lui-même ? » Il pouvait ne pas supporter les opprobres, il pouvait ne pas souffrir ce qu’il a enduré, s’il n’eût voulu considérer que son intérêt. Mais il ne l’a pas voulu ; ne considérant que nous, il n’a plus pensé à lui-même. Et pourquoi l’apôtre n’a-t-il pas dit : Il s’est renoncé lui-même ? C’est qu’il ne voulait pas montrer uniquement le Dieu fait homme, mais rappeler qu’il a été outragé, couvert d’infamie aux yeux de la foule, qu’il a passé pour un être plein de faiblesses. On lui disait : « Si tu es le Fils de a Dieu, descends de la croix » ; et encore : « Il a sauvé les autres, et il ne peut se sauver lui-même ». (Mt. 27,40 et 42) L’apôtre rappelle donc ici une preuve qui est considérable dans le sujet qu’il traite, et il prouve beaucoup plus qu’il n’a promis. Car ce n’est pas seulement le Christ qu’il montre couvert d’opprobres, mais le Père en outre ; car il dit : « Les injures qu’on vous a faites, sont retombées sur moi » ; c’est-à-dire, il n’y a rien là de nouveau, rien d’étrange. Ceux qui, sous l’ancienne loi, outrageaient Dieu, ont aussi dans leur fureur outragé son Fils. Or, toutes ces choses ont été écrites afin que nous sachions ce que nous devons imiter.
L’apôtre fortifie ensuite les fidèles contre les tentations qu’ils auront à souffrir, il dit : « Car « tout ce qui est écrit, a été écrit pour notre « instruction, afin que nous ayons espérance « par la patience et par la consolation que les « Écritures nous donnent (4) », c’est-à-dire, afin que nous ne fassions pas de chute. En effet, les combats sont de mille espèces, au dedans, au-dehors, et l’apôtre veut que, fortifiés, consolés par les Écritures, nous montrions notre patience ; que la persévérance dans la patience soit pour nous la persévérance dans la foi. Elles s’engendrent l’une l’autre, l’espérance produit la patience, la patience produit l’espérance, et toutes deux naissent des Écritures. L’apôtre convertit encore ici ses exhortations en prières : « Que le Dieu de patience et de consolation vous fasse la grâce d’être toujours unis de sentiment les uns avec les autres, selon l’esprit de Jésus-Christ (5) ». Après avoir dit ses pensées à lui, l’apôtre a tenu à les appuyer des exemples de Jésus-Christ, et du témoignage des Écritures, pour montrer que c’est d’après les Écritures qu’il recommande la patience. « Que le Dieu de patience et de consolation vous fasse la grâce d’être toujours unis de sentiment les uns avec les autres, selon l’esprit de Jésus-Christ ». Car c’est le propre de la charité d’avoir pour les autres les mêmes sentiments que pour soi-même.
3. Ensuite, pour montrer que ce n’est pas un amour quelconque qu’il recommande, il