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jour, alors nous nous excitons tous, les uns les autres, en répétant : Il est jour, et nous entreprenons toutes les œuvres qui se font le jour, nous passons nos vêtements, nous secouons nos songes, nous chassons le sommeil, pour que le jour nous trouve préparés, nous voulons avant que les rayons du soleil aient brillé, être sur pied et à l’ouvrage. Ce que nous faisons dans ces circonstances, faisons-le ici : rejetons nos visions, débarrassons-nous des songes de la vie présente, secouons l’assoupissement profond ; en guise de vêtements, revêtons-nous de vertu, c’est tout ce que veulent dire ces paroles : « Quittons donc les œuvres de ténèbres, et revêtons-nous des armes de lumière ». Car c’est à la mêlée, à la bataille que le jour nous appelle. Mais ne vous troublez pas à ces mots d’armes et de mêlée. Les armes matérielles sont pesantes et pénibles à porter, nos armes à nous sont désirables et dignes d’envie, ce sont des armes de lumière ; elles vous rendent plus éclatant que le soleil, elles vous font resplendir au loin d’une éblouissante clarté ; elles sont pour vous un solide rempart : car ce sont des armes, et elles vous font rayonner, parce que ce sont des armes de lumière. Quoi donc ? Ne faut-il pas combattre ? Sans doute il faut combattre, c’est une nécessité ; mais il n’y a ni fatigue ni peine à supporter ; car notre guerre à nous c’est une danse, c’est une fête. Telles sont nos armes, telle est la puissance de Celui qui commande nos légions. Beau comme l’époux qui sort de la chambre nuptiale, tel est celui qui se munit de ces armes ; car c’est tout ensemble un soldat, un époux. Maintenant, quand l’apôtre dit que « le jour approche », il n’entend pas dire seulement qu’il va venir, mais qu’il reluit déjà ; en effet, il ajoute : « Marchons avec honnêteté comme on marche pendant le jour (13) ». Car il fait jour déjà. Le motif qui ordinairement a le plus de puissance auprès du grand nombre, lui sert ici à entraîner les fidèles, la bienséance : attendu qu’ils sont fort jaloux de bonne renommée. L’apôtre ne dit pas : Marchez, mais : « Marchons », afin de mieux faire accepter d’exhortation et d’adoucir la réprimande. « Point de débauches, d’ivresses ». Il ne défend pas de boire, mais de dépasser la mesure ; il ne proscrit pas l’usage, mais l’abus du vin ; c’est avec la même modération de langage qu’il continue. « Point d’impudicités, de dissolutions ». Il ne supprime pas le commerce avec les femmes, mais la fornication. « Point de querelles, ni d’envie ». Il veut éteindre les foyers où s’allument les passions mauvaises, étouffer la concupiscence et la colère. Il ne suffit pas à l’apôtre de combattre ces passions en elles-mêmes, il en tarit les sources.
2. Rien n’embrase la concupiscence, rien n’enflamme la colère comme le vin et l’ivresse. Aussi, est-ce après « Point de débauches, d’ivresses », qu’il dit : « Point d’impudicités, de dissolutions, point de querelles ni d’envie ». Et il ne s’arrête pas là ; mais, quand il nous a débarrassés de nos mauvais vêtements, écoutez de quelle parure il nous embellit par ces paroles : « Mais revêtez-vous de Notre-Seigneur Jésus-Christ (14) ». II ne parle plus d’œuvres à faire, mais il s’exprime d’une manière plus propre à encourager. Quand il s’agissait du vice, il parlait d’œuvres ; mais maintenant qu’il s’agit de la vertu, il ne parle plus d’œuvres, mais d’armes, afin de montrer par cette expression que la vertu orne en même temps qu’elle protège celui qui la possède. Et l’apôtre ne s’arrête pas là ; il élève beaucoup plus haut son discours, il conçoit une image d’une redoutable grandeur ; c’est le Seigneur même qu’il nous donne pour vêtement, le Roi des rois. Celui qui en est revêtu possède la vertu parfaite dans son intégrité. Ces paroles : « Revêtez-vous », nous prescrivent de nous en envelopper complètement. C’est la même pensée que l’apôtre exprime ailleurs : « Si Jésus-Christ est en vous » (Rom. 8,10) ; et encore : « Que dans l’homme intérieur habite le Christ ». (Eph. 3,16-17) Ce qu’il veut en effet, c’est que notre âme soit son domicile, c’est que le Christ soit pour nous comme un vêtement, c’est qu’il soit tout pour nous, et au dedans, et au-dehors. Car le Christ est notre plénitude : « La plénitude de celui qui remplit tout en tous » (Eph. 1,23) ; il est la voie, il est l’homme, il est l’époux : « Car je vous ai fiancés à cet unique époux, comme une vierge pure ». (2Co. 11,2) Il est la racine, le breuvage, la nourriture, la vie : « Et je vis », dit Paul lui-même ailleurs, « ou plutôt, ce n’est plus moi qui vis, mais Jésus-Christ qui vit en moi ». (Gal. 2,20) II est l’apôtre, le pontife suprême, le docteur, le père, le frère, le cohéritier, le compagnon du sépulcre et de la croix : « Car nous avons été ensevelis » nous-mêmes, dit encore l’apôtre, « et nous avons été entés en lui, par la ressemblance