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Basile-Valentin, alchimiste, qui est pour les Allemands ce que Nicolas Flamel est pour nous. Sa vie est mêlée de fables qui ont fait croire à quelques-uns qu’il n’a jamais existé. On le fait vivre au douzième, au treizième, au quatorzième et au quinzième siècle ; on ajoute même, sans la moindre preuve, qu’il était bénédictin à Erfurt. C’est lui qui, dans ses expériences chimiques, découvrit l’antimoine, qui dut son nom à cette circonstance, que, des pourceaux s’étant prodigieusement engraissés pour avoir avalé ce résidu de métal, Basile en fit prendre à des religieux qui en moururent.

On raconte que, longtemps après la mort de Basile-Valentin, une des colonnes de la cathédrale d’Erfurt s’ouvrit comme par miracle, et qu’on y trouva ses livres sur l’alchimie. Les ouvrages de Basile, ou du moins ceux qui portent son nom, écrits en haut allemand, ont été traduits en latin, et quelques-uns du latin en français. Les adeptes recherchent de lui l’Azoth[1], les Douze clefs de la philosophie de frère Basile-Valentin, traitant de la vraie médecine métallique[2], à la suite de la traduction de l’Azoth, in-12, 1660 ; in-8o, 1669 ; l’Apocalypse chimique[3] ; la Révélation des mystères des teintures essentielles des sept métaux et de leurs vertus médicinales[4], in-/r\ Paris, 15/|6 ; Du microcosme, du grand mystère du monde et de la médecine de l’homme[5] ; Traité chimico-philosophique des choses naturelles et surnaturelles des minéraux et des métaux[6] ; Haliographie, de la préparation, de l’usage et des vertus de tous les sels minéraux, animaux et végétaux, recueillis par Antoine Salmincius, dans les manuscrits de Basile-Valentin[7], etc. La plupart de ces ouvrages ont fait faire des pas à la chimie utile.

Basilic, petit serpent, long d’un demi-mètre, qui n’a été connu que des anciens. Il avait deux ergots, une tête et une crête de coq, des ailes, une queue de serpent ordinaire, etc. Quelques-uns disent qu’il naît de l’œuf d’un coq couvé par un serpent ou par un crapaud. Boguet, au chapitre xiv de ses Discours des sorciers, le fait produire de l’accouplement du crapaud et du coq, comme le mulet naît d’un âne et d’une jument.

C’est une opinion encore répandue dans les campagnes que les vieux coqs pondent un œuf duquel naît un serpent. Ce petit œuf, imparfait, n’est, comme on sait, que l’effet d’une maladie chez les poules ; et l’absurdité de ce conte bleu n’a plus besoin d’être démontrée.

Illustration du Dictionnaire infernal par Louis Le Breton.
Illustration du Dictionnaire infernal par Louis Le Breton.

Il est possible que les anciens, dans leurs expériences, aient pris des œufs de serpent pour des œufs de coq. Voy. Coq. — Quoi qu’il en soit, on croit que le basilic tue de ses regards ; et Mathiole demande comment on a su que le basilic tuait par son regard, s’il a tué tous ceux qui l’ont vu. On cite toutefois je ne sais quel historien qui raconte qu’Alexandre le Grand ayant mis le siège devant une ville d’Asie, un basilic se déclara pour les assiégés, se campa dans un trou des remparts, et lui tua jusqu’à deux cents soldats par jour. Une batterie de canons bien servie n’eût pas fait mieux.

« Il est vrai, ajoute M. Salgues[8], que si le basilic peut nous donner la mort, nous pouvons lui rendre la pareille en lui présentant la surface polie d’un miroir : les vapeurs empoisonnées qu’il lance de ses yeux iront frapper la glace, et, par réflexion, lui renverront la mort qu’il voudra donner. C’est Aristote qui nous apprend cette particularité. »

Des savants ont regardé en face le serpent qu’on appelle aujourd’hui basilic, et qui n’a pas les accessoires dont les anciens l’ont embelli ; malgré tous les vieux contes, ils sont sortis bien portants de cette épreuve. Mais, nous le répétons, le reptile auquel les modernes donnent le nom de basilic n’est peut-être pas le basilic des anciens, car il y a des races perdues.

Au moyen âge, on donnait au basilic une couronne native ornée d’une pierre précieuse, et on voyait en lui le roi des serpents.

Basilide, hérétique du deuxième siècle, qui se fit un système en mêlant les principes de Pythagore et de Simon, les dogmes des chrétiens et les croyances des Juifs. Il prétendit que le monde avait été créé par les anges. « Dieu (Abracax), disait-il, produisit l’Intelligence, laquelle

  1. Azoth, sive Aureliœ philosophorum. Francfort, 1613. In-4°, traduit en français en 1660.
  2. Practica, una cum duodecim clavibus et appendice. Francfort, 1618. In-4°.
  3. Apocalypsis chimica. Erfurt, 1624. In-8°.
  4. Manifestatio artificiorum, etc. Erfurt, 1624. In-4°. La traduction dont on indique le titre est de J. Israël.
  5. De microcosmo, deque magno mundi mysterio et medicina hominis. Marpurg, 1609. In-8°.
  6. Tractatus chimico-philosophicus de rébus naturalibus et prœternaturalibus metallorum et mineralium. Francfort, 1676. In-8°.
  7. Haliographia, de prœparatione, usu ac virtutibus omnium salium miner alium, animalium ac vegetabilium, ex manuscriptis Basilii Valentini collecta ab Antonio Salmincio. Bologne, 1644. In-8°.
  8. Des erreurs et des préjugés, etc., t. I, p. 413.