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nomanes pensent que le démon du sabbat est Bacchus. Enfin le bouc émissaire des Juifs (Azazel) hantait les forêts et les lieux déserts consacrés au démon : voilà encore, dans certaines opinions, les motifs qui ont placé le bouc au sabbat. Voy. Sabbat.

L’auteur des Admirables secrets d’Albert le Grand dit, au chapitre m du livre II, que si on se frotte le visage de sang de bouc qui aura bouilli avec du verre et du vinaigre, on aura incontinent des visions horribles et épouvantables. On peut procurer la même surprise à des étrangers qu’on voudra troubler. Les villageois disent que le diable se montre fréquemment en forme de bouc à ceux qui le font venir avec le Grimoire. Ce fut sous la figure d’un grand bouc qu’il emporta Guillaume le Roux, roi d’Angleterre.

Voici une aventure de bouc qui peut tenir ici sa place. Un voyageur couché dans une chambre d’auberge avait pour voisinage, sans le savoir, une compagnie de chèvres et de boucs, dont il n’était séparé que par une cloison de bois


fort mince, ouverte en plusieurs endroits. Il s’était couché sans examiner son gîte et dormait paisiblement lorsqu’il reçut la visite d’un bouc son voisin : l’animal avait profité d’une ouverture pour venir le voir. Le bruit de ses sabots éveilla l’étranger, qui le prit d’abord pour un voleur. Le bouc s’approcha du lit et mit ses deux pieds dessus. Le voyageur, balançant entre le choix d’une prompte retraite ou d’une attaque vigoureuse, prit le parti de se saisir du voleur prétendu. Ses pieds, qui d’abord se présentent au bord du lit, commencent à l’intriguer ; son effroi augmente, lorsqu’il touche une face pointue, une longue barbe, des cornes…… Persuadé que ce ne peut être que le diable, il saute de son lit tout troublé. Le jour vint seul le rassurer en lui faisant connaître son prétendu démon. Voy. Grimoire.

Boucher. Ambroise Paré raconte, dans son livre des Monstres, chapitre 28, qu’un valet nommé Boucher étant plongé dans des pensées impures, un démon ou spectre lui apparut sous la figure d’une femme. Il suivit le tentateur ; mais incontinent son ventre et ses cuisses s’enflammèrent, tout son corps s’embrasa, et il en mourut misérablement.

Bouchey (Marguerite Ragum), femme d’un maçon de la Sologne, vers la fin du seizième siècle ; elle montrait une sorte de marionnette animée, que les gens experts découvrirent être un lutin. En juin 1603, le juge ordinaire de Romorantin, homme avisé, se mit en devoir de procéder contre cette femme. Elle confessa que maître Jehan, cabaretier de Blois, à l’enseigne du Cygne, chez qui elle était servante, lui avait fait gouverner trois mois cette marionnette ou mandragore, qu’elle lui donnait à manger avec frayeur d’abord, car elle était fort méchante, que quand son maître allait aux champs, il lui disait : — Je vous recommande ma bête, et que personne ne s’en approche que vous.

Elle conta qu’une certaine fois Jehan étant allé en voyage, elle demeura trois jours sans donner à manger à la bête, si bien qu’à son retour elle le frappa vivement au visage… Elle avait la forme d’une guenon; et on la cachait bien, car elle était si hideuse, que personne ne l’osait regarder. Sur ces dépositions, le juge fit mettre la femme Bouchey à la question, et plus tard le parlement de Paris la condamna comme sorcière. Il est assez probable que la marionnette était simplement une vraie guenon.

Bouddha, dieu des Hindous. Mais ce dieu n’était d’abord qu’un homme, et c’est un parvenu.

Bouillon du sabbat. Pierre Delancre assure, dans l’Incrédulité et mêcréance du sortilège pleinement convaincue, traité dixième, que les sorcières, au sabbat, font bouillir des enfants morts et de la chair de pendu, qu’elles y joignent des poudres ensorcelées, du millet noir, des grenouilles, qu’elles tirent de tout cela un bouillon qu’elles boivent en disant ; « J’ai bu du tympanon[1]., et me voilà professe en sorcellerie. » On

  1. Le tympanon était le chaudron