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satires.


SATIRE III.


Ce défaut est celui de tous les chanteurs, de ne jamais se résoudre à chanter entre amis, quand ils en sont priés, et de ne plus cesser quand on ne leur dit rien. Tel était le Sarde Tigellius. Si Cæsar, qui pouvait l’y forcer, le priait par l’amitié de son père et par la sienne, il n’en tirait rien ; mais si c’était son caprice, depuis les œufs jusqu’aux pommes, il chantait : « Io Bacchus ! » de la voix la plus aiguë à la plus grave du tétracorde. Rien de plus inégal que cet homme. Souvent il courait comme s’il fuyait l’ennemi, souvent il marchait comme s’il portait les vases sacrés de Juno ; tantôt il avait deux cents esclaves, tantôt dix ; tantôt il ne parlait pompeusement que de rois et de tétrarques, tantôt il s’écriait : « Que j’aie seulement une table à trois pieds, une coquille de sel