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tion, ou l’universel, ce sont là des expressions synonymes. Cependant l’universel qui constitue le moyen-terme du syllogisme démonstratif n’a pas besoin d’être, comme l’Idée platonicienne, extérieur aux choses. Certes le moyen-terme est constitué par ce qu’il y a de commun entre les divers cas dans lesquels se présente le mineur : il est l’unité de ces divers cas. Cela n’entraîne pas qu’il doive exister à part de ces divers cas : c’est une unité immanente aux choses, ἓν κατὰ πολλῶν ou ἐπὶ πολλῶν, non une unité transcendante, ἓν παρὰ τὰ πολλά (Anal. post. I, 11 déb.). Et, si cette unité est réalisée quelque part en dehors des termes dont elle est l’unité, ce ne peut être que dans l’âme[1]. Mais il y a plus. Non seulement l’universel, objet de la science, n’a pas besoin, pour que la science soit possible, d’être une chose à part. L’universel, bien considéré, est encore différent de ce que l’on pourrait croire qu’il est au premier abord. Sans doute l’universel est, en un sens, ce qui se dit de plusieurs choses, ce qui possède une extension capable d’envelopper tous les sujets dans lesquels se rencontre l’attribut ainsi désigné comme universel. Cette définition est dans Aristote[2] : elle tient une place certaine dans sa pensée. Elle en tient si bien une que, comme nous l’avons vu ailleurs (p. 127, n. 2), Aristote objecte un moment contre l’Idée platonicienne que celle-ci ne peut être définie et connue en tant qu’elle apparaît, ainsi qu’il arrive sous un certain aspect ou dans certains cas, comme un individu d’une nouvelle sorte, comme un être intelligible singulier. On ne définit pas le singulier, ὅσα μοναχά, dit-il à la fin du ch. 15 du livre Ζ de la Métaphysique. Mais, dans ce passage même, il finit par donner à son objection un sens autre que celui qu’on aurait attendu en commençant. Les carac-

  1. De an. II, 5, 417 b, 23 : ταῦτα [sc. τὰ καθόλου] δ’ ἐν αὐτῇ πώς ἐστι τῇ ψυχῇ. Cf. III, 4, 429 a, 27 : καὶ εὖ δὴ οἱ λέγοντες τὴν ψυχὴν εἶναι τόπον εἰδῶν, πλὴν ὅτι οὔτε ὅλη ἀλλ’ ἡ νοητική, οὔτε ἐντελεχείᾳ ἀλλὰ δυνάμει τὰ εἴδη. Voir Rodier, op. cit., II, p. 261 et 439.
  2. Métaph. Ζ, 13, 1038 b, 11 : τοῦτο γὰρ λέγεται καθόλου ὃ πλείοσιν ὑπάρχειν πέφυκεν. Δ, 26, 1023 b, 29 : τὸ μὲν γὰρ καθόλου… οὕτως ἐστὶ καθόλου ὡς πολλὰ περιέχον τῷ κατηγορεῖσθαι καθ’ ἑκάστου καὶ ἓν ἅπαντα εἶναι ὡς ἕκαστον… Cf. Bonitz, Ind. 356 b, 4 sqq.