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tote resta vingt ans auprès de Platon, perdrait tout son sens. 4o  Aristote se range lui-même parmi les Platoniciens, quand il emploie la première personne du pluriel pour rapporter des opinions platoniciennes[1]. 5o  Le célèbre passage de l’Éthique à Nicomaque, où Aristote parle avec tant d’élévation de la peine qu’il ressent au moment de sacrifier, en philosophe, à la sauvegarde sacrée de la vérité ses sentiments personnels d’amitié à l’égard du fondateur de la doctrine des Idées, ce passage témoigne encore d’un affectueux et profond respect pour la personne du maître[2]. 6o  On peut ajouter que Théocrite de Chios reproche à Aristote d’avoir quitté l’Académie pour la Macédoine[3]. 7o  Enfin, d’après Strabon, Xénocrate accompagna Aristote dans ce voyage à Atarnée dont il sera question tout à l’heure, et il conserva par la suite avec lui d’amicales relations. Si Aristote avait manqué, aussi gravement qu’on le dit, à ses devoirs envers son maître, les faits qui viennent d’être rapportés seraient en contradiction avec ce qu’on sait du dévouement absolu de Xénocrate à l’égard de Platon[4]. — On a cru, il est vrai, trouver une preuve du ressentiment que les procédés d’Aristote auraient inspiré à Platon dans le silence de celui-ci à l’égard de son élève. Mais comment aurait-il pu nommer Aristote dans des entretiens socratiques ou qui, d’une façon générale, sont supposés antérieurs à Platon lui-même[5] ? Au surplus, on tend aujourd’hui à penser,

  1. Par ex. Metaph. Α, 9, 990 b, 8, 22 : … καθ’ οὓς τρόπους δείκνυμεν ὅτι ἔστι τὰ εἴδη… — κατὰ μὲν τὴν ὑπόληψιν, καθ’ ἣν εἶναί φαμεν τὰς ἰδέας… Autres références dans Zeller, 15, 3. Il faut observer, de quelque façon qu’on doive expliquer le fait, que cette façon de s’exprimer ne se rencontre que dans les livres Α et Β de la Métaphysique et qu’elle ne se retrouve plus dans les passages du livre Μ où il y a identité de contenu avec le livre Α.
  2. I, 4, déb. : il faut examiner le concept universel du Bien, καίπερ προσάντους τῆς τοιαύτης ζητήσεως γινομένης διὰ τὸ φίλους ἄνδρας εἰσαγαγεῖν τὰ εἴδη. δόξειε δ’ ἂν ἴσως βέλτιον εἶναι καὶ δεῖν ἐπὶ σωτηρίᾳ γε τῆς ἀληθείας καὶ τὰ οἰκεῖα ἀναιρεῖν, ἄλλως τε καὶ φιλοσόφους ὄντας. ἀμφοῖν γὰρ ὄντοιν φίλοιν, ὅσιον προτιμᾶν τὴν ἀλήθειαν.
  3. Voir le texte dans Zeller, 15, 6. Cf. supra, p. 3, n. 2.
  4. Zeller, p. 16, et n. 1 et 2.
  5. Ibid., p. 13, n. 3.