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OBLOMOFF.

auditeur toujours bénévole et un compagnon toujours docile, toujours d’accord et partageant également et son silence, et sa conversation, et son émotion, et sa manière de voir, quelle qu’elle fût.

Les autres visiteurs venaient rarement, et ne restaient qu’un instant, ainsi que l’avaient fait les trois premiers ; avec eux s’affaiblissait de plus en plus la cordialité des relations. Quelquefois Oblomoff s’amusait d’une nouvelle, il en causait cinq minutes ; ensuite, satisfait de cet effort, il se taisait.

Il fallait avec ces amis user de réciprocité, prendre part à ce qui les intéressait. Ils étaient plongés dans les flots de la société ; chacun comprenait la vie à sa façon, qui n’était pas celle d’Oblomoff ; et ils voulaient l’entraîner avec eux : tout cela lui déplaisait, lui répugnait, le contrariait dans ses goûts.

Il y avait un homme selon son cœur : celui-là ne le laissait pas non plus en repos ; cet homme aimait le progrès, et le monde, et la science, et tout ce qui vit, mais d’un amour plus profond, plus chaud, plus sincère, et Oblomoff, quoiqu’il fût affable avec tous, n’avait d’amitié vraie que pour ce seul ami, n’avait foi qu’en lui seul, — peut-être parce qu’ils avaient grandi, étudié et vécu ensemble. C’était M. André Stoltz. Il était absent, mais Oblomoff l’attendait d’un moment à l’autre.








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