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DES ORGANES ALIMENTAIRES.

créée sans but par une sagesse en défaut. Et il ne rougit pas de prétendre que la nature, qui ne fait rien sans raison (c’est sa propre expression), a créé un si grand viscère sans utilité[1]. Craignant apparemment [selon Érasistrate] de ne pas donner partout des preuves de son habileté, la nature après avoir, au côté droit, façonné le foie de l’animal, encore caché dans le sein maternel, lui opposa la rate au côté gauche, voulant aussi créer quelque chose dans cette partie même ; comme s’il ne lui eût pas été loisible, en prolongeant un peu l’estomac vers cette région, de s’épargner une besogne inutile. Puis, comme on peut le voir dans les écrits de ce médecin, il combat longuement les opinions les plus ridicules sur la déglutition, la digestion et la coction. Quant aux opinions les plus solidement établies et les plus fameuses, il n’y fait pas la moindre objection ; parfois seulement il les mentionne ; parfois ne les rappelant même pas, il les néglige comme dénuées de toute valeur ; toutefois, à défaut d’autre raison, du moins le nom de leurs auteurs illustres dans la Grèce ne méritait pas un pareil dédain, mais une contradiction sérieuse et des preuves puissantes à l’appui de la réfutation.

Nous avons démontré, dans notre traité Sur les facultés naturelles (II, ix ; cf. aussi III, xiii), que la rate est un organe destiné à purifier les humeurs terreuses, épaisses, chargées de bile noire et qui sont engendrées dans le foie (cf. chap. vii). Elle les attire, avons-nous dit précédemment (chap. iv), à l’aide d’un

    la première vers le haut, pour entrer en contact avec la tunique péritonéale du diaphragme, la seconde en bas, pour reposer sur la face supérieure du lobe droit, de manière que cette portion du foie n’arrive jamais à toucher le diaphragme. » — Si je ne me trompe, il faut encore trouver dans le passage qui nous occupe une nouvelle allusion au ligament suspenseur. — Voy. p. 315, note 2.

  1. Il me semble, d’après la phrase suivante, qui se rapporte évidemment à Érasistrate, que cet auteur n’a pas nié absolument l’utilité de la rate, comme Galien le lui reproche ; car s’il ne lui accordait aucune fonction active, il la regardait du moins comme formant une espèce de contrepoids au foie, ou plutôt comme représentant en quelque sorte ce viscère à gauche et rétablissant ainsi le parallélisme entre les deux côtés de l’abdomen. Cela me parait avoir été aussi le sentiment de Rufus (De appell. part. corp. hum., p. 59, éd. de Clinch) qui qualifie la rate ἄπρακτος καὶ ἀνέργητος — Voy. du reste la Dissertation sur la physiologie de Galien.