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DE LA MAIN.

quoi ils se trompent. Suivant ces auteurs, ce n’est pas parce que les tendons sont épais que les fonctions sont énergiques, ni parce qu’ils sont grêles que les fonctions sont faibles ; mais elles deviennent forcément de telle ou telle façon par les usages qu’elles remplissent dans la vie, et le volume des tendons est une conséquence nécessaire de la quantité du mouvement : quand on s’exerce, ils sont mieux nourris et se développent, comme cela est naturel ; quand on mène une vie oisive, ils s’atrophient et deviennent grêles. Ce n’est pas parce qu’il était meilleur que des fonctions énergiques fussent remplies par des tendons forts et épais, et que des fonctions faibles le fussent par des tendons grêles et peu robustes, que les tendons ont été construits tels qu’ils sont par la nature (autrement les singes n’auraient pas les doigts tels qu’ils les ont[1]) ; mais, comme il a été dit avant, l’épaisseur est une suite nécessaire de l’exercice, parce que les parties sont bien nourries ; la gracilité est une suite du repos, parce que les parties sont mal nourries. Mais, ô hommes admirables ! nous vous répondrons : il fallait puisque vous entrepreniez de démontrer que le volume des tendons ne tenait ni à l’art, ni à l’absence d’art, parler de la même manière, sur leur nombre, leur situation, leurs insertions, et

  1. Οὐ γὰρ ἂν καὶ πιθήκοις γενέσθαι τοιούτους δακτύλους. Cette parenthèse que Galien met dans la bouche de ses adversaires est fort obscure, et les passages de ce chapitre et du chapitre suivant, où Galien lui-même parle des singes, comme pour réfuter indirectement cette parenthèse, ne la rendent guère plus claire. « Ce passage, dit Deleschamps, à la marge de son édition in-4o, p. 43, semble estre corrompu, et est mal aisé d’en tirer le sens, ie pense qu’il faut lire πιθανόν pour πιθήκοις et traduire [τοιούτους] par débiles ; comme aussi il n’est probable les doigts pour cette raison auoir esté faits gros ou minces. » Mais cette explication est loin de me satisfaire ; il n’y a aucune correction certaine à faire, et tous les mss. sont d’accord. Il me semble qu’on doit rétablir ainsi la suite de ce raisonnement un peu bizarre, il faut bien l’avouer : Les tendons, disaient les sectateurs d’Épicure, n’ont pas été faits tels qu’ils sont pour les fonctions, mais par les fonctions, les singes en sont la preuve ; car si les tendons avaient été créés d’une certaine façon en vue des fonctions, les singes n’auraient pas les doigts semblables à ceux des hommes, car primitivement leur main ne devait pas remplir les mêmes fonctions, et elle ne les remplit que par imitation ; c’est donc l’exercice qui a rendu les tendons tels qu’ils sont. — Ce à quoi Galien répond : La main des singes n’est pas identique à celle de l’homme (voy. p. 162), bien que par une imitation grossière, elle remplisse à peu près les mêmes fonctions ; par conséquent les tendons sont chez les singes tels qu’on les voit, non par accident, mais primitivement.