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LOWELL. — MARS.

depuis 1890 paraissent indiquer la présence de montagnes sur la surface martienne, de sorte que les déformations du terminateur sembleraient plus probablement dues à cette cause qu’à des bancs de nuages.

Nous arrivons maintenant au troisième Chapitre du Livre, la question de l’eau et des mers. Toute la surface polaire blanche a été surveillée minutieusement et paraît avoir entièrement disparu au cœur de l’été[1], fait qui n’avait pas encore été observé. Durant ces observations, on vit toujours une bande bleue suivant le cap lorsqu’il se retirait vers le pôle, montrant que l’eau se formait actuellement de la fonte des neiges. Les taches signalées par Green et Mitchel ont été vues aussi ; on trouve qu’elles devaient être formées sur un sol à un niveau plus élevé que celui des environs, sortes de talus recouverts de glace qui réfléchissaient brillamment les rayons du Soleil.

L’auteur a adopté un plan très simple et très ingénieux pour montrer au lecteur les aspects différents de Mars. Il a construit un globe portant tous les détails constatés à son Observatoire, et ensuite photographié le globe de douze côtés différents[2]. Ainsi le lecteur fait, pour ainsi dire, un voyage autour de la planète, chaque ligne importante étant décrite dans le texte. Le merveilleux réseau des canaux est vraiment saisissant, et la quantité de détails observés surpasse tout ce qui avait été obtenu précédemment.

M. Lowell conteste l’existence des mers et nous apprend que des faits importants conspirent pour jeter de grands doutes sur leur caractère aquatique. Les deux principaux sont, premièrement, que des centaines de milliers de kilomètres carrés disparaissent dans un espace de temps étonnamment court, et, deuxièmement, que les observations du polariscope ne donnent aucune indication de polarisation. Deux questions alors se dressent ici : d’abord, que devient l’eau provenant de la fonte des neiges polaires ? Ensuite, que représentent les taches d’un ton bleu-vert qui parsèment la surface de la planète ? Ces dernières sont, d’après M. Lowell, des plaines couvertes de végétation ; on a observé que leurs tons changent avec les saisons de la planète ; il insinue cependant qu’autrefois elles ont été des mers, mais que la quantité d’eau a maintenant tellement diminué qu’elle ne circule plus que dans les canaux profonds.

Il définit les mers martiennes comme intermédiaires en évolution entre les mers terrestres et celles de la Lune. Dans un tel état de choses, devant cette diminution et cette rareté de l’eau, « les habitants de Mars ont une raison vitale d’utiliser jusqu’à la moindre goutte toute l’eau disponible qu’ils peuvent se procurer, et paraissent y avoir réussi par de gigantesques et savantes opérations, en établissant sur une vaste échelle un prodigieux système d’irrigation ». « S’il y a des habitants, ajoute M. Lowell, l’irrigation doit être le principal intérêt de leur existence ». Si nous portons maintenant notre attention sur les lignes connues sous le nom de canaux, il semble précisément que nous ayons sous les yeux ce qui paraît être le plus parfait système d’irrigation imaginable. Ces canaux

  1. Voir plus haut, p. 213, notre discussion à cet égard.
  2. Voir plus haut, p. 132.