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HUGGINS, SECCHI. — SPECTROSCOPIE.

que cette coloration si caractéristique ait son origine dans l’atmosphère de la planète, car la lumière réfléchie des régions polaires reste blanche, quoiqu’elle ait traversé une plus longue épaisseur d’atmosphère que celle qui nous arrive des régions centrales du disque ; c’est dans ces régions centrales que la couleur est la plus marquée. Elle tire certainement son origine de la surface de la planète.

Les observations photométriques de Seidel et Zöllner confirment cette interprétation. Elles montrent que Mars ressemble à la Lune, quant à la valeur anormale de la variation de la lumière réfléchie selon l’accroissement ou le décroissement de la phase, et également pour le plus grand éclat des régions marginales du disque. De plus, Zöllner a trouvé (p. 196) que l’albedo de Mars, c’est-à-dire le pouvoir réfléchissant des différentes parties de son disque, est seulement une fois et demie plus grand que celui de la surface lunaire. Ces caractères optiques s’accordent avec l’observation télescopique pour montrer que, dans le cas de Mars, la lumière solaire réfléchie vient presque entièrement de la vraie surface de la planète, et non pas d’une enveloppe de nuages comme pour Jupiter et Saturne. Dans ces deux dernières planètes, le disque est moins brillant sur les bords que dans la région centrale. Nous avons vu plus haut que ces deux planètes ont un albedo quatre et cinq fois plus grand que la Lune.

En même temps que Huggins s’occupait de cette question en Angleterre, et Zöllner en Allemagne, en Italie, le P. Secchi étudiait de son côté les planètes Jupiter, Saturne, Uranus, Mars et Neptune dans ses recherches spectroscopiques sur les corps célestes[1].

« Mars, écrit-il, a montré des raies atmosphériques terrestres, assez faibles au centre du disque, mais fortes vers le bord ; ce qui prouve l’existence d’une atmosphère analogue à la nôtre. » L’auteur donne plus loin deux observations, des 11 février et 28 avril 1869, qui se bornent à témoigner d’une zone nébuleuse voisine de la raie C et d’une autre dans le rouge extrême. Les atmosphères de Jupiter, Saturne et Uranus diffèrent beaucoup plus de la nôtre.

L’atmosphère de Mars paraît faible et raréfiée : « La sua atmosfera è assai piccola e sotile. »

La même recherche a été reprise en 1872 par Vogel en Allemagne, et les résultats ont confirmé ceux de Huggins et Secchi, quant à l’existence sur Mars d’une atmosphère analogue à la nôtre au point de vue de la vapeur d’eau qui donne naissance aux raies observées. Nous retrouverons plus loin, en 1872, les recherches de Vogel sur le même sujet.

  1. Sugli Spettri prismatici di Corpi celesti. 1 br. in-8 ; Rome, 1868. 1 br. in-4 ; Rome, 1872.