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puisse s’exercer aussi bien pendant l’ascension que pendant la chute du piston. Il fallait obtenir de la machine à vapeur une continuité d’effet.

Watt parvint à atteindre cet important résultat par le moyen suivant. Au lieu de se borner à faire agir la vapeur sur la tête du piston, il la dirigea alternativement au-dessus et au-dessous du piston de manière à provoquer par la seule action de la vapeur, son élévation et sa chute. Il établit les communications entre le cylindre et le condenseur, de telle sorte que la vapeur contenue dans la capacité située au-dessus du piston s’écoulait dans le condenseur au moment même où le piston était arrivé au bas de sa course. Dès lors la vapeur, arrivant au-dessous du piston pour le soulever, ne rencontrait aucune résistance capable de contrarier son effet, puisque par suite de la condensation de la vapeur qui remplissait naguère la partie supérieure du cylindre, un vide parfait existait dans cette capacité.

Cette nouvelle disposition de la machine à vapeur rendait son mécanisme parfait. Les contre-poids énormes que l’on avait employés jusque-là pour équilibrer le piston, devenaient ainsi inutiles, et pour la première fois, on put débarrasser la machine de ces lourdes masses qui formaient le balancier de Newcomen. On put également faire disparaître les quantités considérables de fer ou de bois que l’on employait dans la construction de certaines pièces de la machine pour adoucir ses mouvements.

La machine à double effet exécute dans le même temps, le double de travail de la machine à simple effet ; mais elle dépense deux fois plus de vapeur. L’avantage réside donc seulement dans la succession plus rapide de ses effets, circonstance de la plus haute utilité, lorsque la machine est destinée à servir de moteur d’une application universelle.

Pour tirer parti de la force motrice développée par la machine à vapeur ainsi modifiée, il fallait, de toute nécessité, adopter une manière nouvelle de communiquer au balancier le mouvement du piston. Il est facile de comprendre, en effet, que le moyen employé dans la machine de Newcomen, dans laquelle la vapeur n’imprime qu’une impulsion de haut en bas, ne pouvait s’appliquer à la machine à double effet, qui fournit une impulsion de haut en bas et de bas en haut. Dans la machine de Newcomen, deux chaînes de fer fixées à ses deux extrémités, comme on le voit dans la figure 37 (page 71), suffisaient pour mettre le balancier en jeu. Dans l’oscillation descendante, le piston tirait le balancier par le secours de la chaîne ; dans l’oscillation ascendante, c’était le balancier ou son contre-poids, qui, au moyen de la seconde chaîne, faisait remonter le piston. Mais dans la machine à double effet, la pression de l’air n’entre pour rien ; c’est la pression de la vapeur qui fait monter et descendre le piston. Il fallait donc imaginer un autre procédé pour communiquer au balancier les deux mouvements ascendant et descendant ; il fallait, pour cela, faire coïncider le mouvement de l’extrémité du balancier qui décrit un arc de cercle avec le mouvement rectiligne de la tige du piston.

Dans ses premières machines, Watt s’était contenté de garnir la partie de la tige du piston qui s’élève au dehors du corps de pompe, d’une série de dents qui engrenaient dans une roue dentée. Cette crémaillère était le moyen le plus simple pour transmettre le mouvement. Mais, indépendamment de son peu d’élégance, elle ne manœuvrait qu’avec grand bruit et était sujette à se déranger, surtout quand on voulait imprimer au mouvement une seconde direction. Watt remplaça ce mécanisme trop élémentaire, par un appareil plus compliqué, qui porte le nom de parallélogramme articulé.

Voici d’abord l’explication théorique de cet ingénieux appareil.

Soient AC (fig. 45) un levier mobile autour d’un centre C, et A′C′ un levier, d’égale longueur, mobile autour de C′ ; supposons en outre qu’ils soient réunis par leurs bouts A et A′, au