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9 JUILLET 1880.

je vous avais transmis au sujet de la proposition faite par le Gouvernement russe au Cabinet anglais a été confirmée à notre Ambassadeur par son collègue d’Angleterre. Lord Odo Russell a, il est vrai, ajouté que la réponse du comte de Granville à la suggestion du prince Lobanoff avait été évasive, et M. de Saint-Vallier m’apprend que l’Ambassadeur de Russie à Berlin cherche à atténuer la portée de la démarche faite à Londres, en déclarant que le prince Lobanoff avait émis une idée personnelle, sans instructions de son Gouvernement. Mais le fait seul que l’Ambassadeur de Russie en Angleterre a cru pouvoir entretenir le Cabinet britannique d’une proposition semblable n’est pas moins un symptôme très grave, dont la Porte ottomane aurait tort de méconnaître l’importance.

D’autre part, le comte de Saint-Vallier m’a fait savoir à la date du 5 de ce mois[1] que l’Autriche et l’Angleterre, se préoccupant des velléités de résistance révélées par toutes les manifestations connues des sentiments qui animent le ministère ottoman, ont, dès les premiers jours de juillet, pressenti le Cabinet de Berlin pour savoir si dans le cas où la Turquie adopterait un parti extrême, l’Allemagne serait disposée à prendre part à une démonstration navale, en vue d’appuyer les efforts que pourrait tenter la Grèce pour entrer en possession des territoires qui lui ont été attribués. C’est le prince de Hohenlohe lui-même qui a mis confidentiellement notre Ambassadeur au courant de cette démarche, et lui a fait en même temps connaître sa réponse dont le sens était que l’Allemagne ne refuserait pas l’appui de son pavillon à une démonstration de ce genre, et qu’elle serait prête à participer ainsi, dans une certaine mesure, à une entreprise combinée entre les Puissances pour assurer l’exécution des décisions de la Conférence.

Il serait peut-être utile que vous fissiez part de ce renseignement confidentiel au Ministre des Affaires étrangères de Turquie, et reveniez avec lui sur les indications de même nature que vous lui avez déjà données pour combattre les funestes illusions auxquelles on se laisse encore aller dans l’entourage du Sultan.


201.

M. de Saint-Vallier, Ambassadeur de France à Berlin, à M. de Freycinet, Ministre des Affaires étrangères.

T.
Berlin, 9 juillet 1880, 6 h. 19 soir.
(Reçu : 8 heures soir.)

Le Roi des Grecs arrivé ici ce matin et partant demain pour Copenhague m’a fait prier de venir le voir. Après m’avoir remercié de mes efforts au Congrès

  1. Voir ci-dessus n° 192.