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très-bien expliquée par Brodeau sur l’art. 74 de la coutume de Paris, n. 29 & suiv. Voyez l’acte de notorieté de M. le Camus, du mois d’Avril 1702, & ci-devant Justice basse. (A)

Justice très-fonciere étoit la même chose que justice fonciere, du tems que la commune de Laon subsistoit. Les seigneurs de cette prévôté qui avoient justice très-fonciere requéroient les échevins de Laon de venir à leur cour pour juger. Philippe de Valois ayant établi en 1331 un prévôt à Laon, ordonna que ces seigneurs viendroient requérir le prévôt de Laon pour aller à leur cour juger, comme faisoient auparavant les échevins. Voyez l’ordonnance du mois de Mai 1731, art. vij.

La coûtume de Vermandois parle bien du seigneur foncier, mais elle ne parle plus de justice fonciere. (A)

Justice en garde. On appella ainsi anciennement celles que le Roi donnoit simplement à exercer par commission, au lieu qu’auparavant elles étoient vendues ou données à ferme. Philippe de Valois ordonna en 1347 que les prévôtés royales seroient données en garde : depuis ce tems toutes les justices ne se donnent plus à ferme, mais en titre d’office ou par commission.

Ce que l’on entend présentement par justice en garde, est une justice royale, qui n’est point actuellement remplie par le chef ordinaire, & qui est exercée par interim au nom de quelqu’autre magistrat. Par exemple, le procureur général du parlement est garde de la prévôté & vicomté de Paris le siége vacant, & pendant ce tems les sentences sont intitulées de son nom. (A)

Justice du glaive ; on appelle ainsi dans quelques provinces la jurisdiction ecclésiastique que quelques chapitres ont sur leurs membres & sur tout le clergé qui compose leur église : telle est celle du chapitre de l’église de Lyon, & celle du chapitre de S. Just en la même ville. Ces justices ont été surnommées du glaive pour les distinguer des justices ordinaires temporelles qui appartiennent à ces mêmes chapitres.

Il ne faut pas s’imaginer que par le terme de glaive on entende en cet endroit le droit de vie & de mort, appellé en droit jus gladii ; car aucune justice ecclésiastique n’a ce pouvoir on n’entend donc ici autre chose par le terme de glaive, que le glaive spirituel ; c’est-à-dire le glaive de l’excommunication, par lequel ceux qui désobéissent à l’Église sont retranchés de la communion des fideles, le pouvoir des jurisdictions ecclésiastiques se bornant à infliger des peines spirituelles telles que les censures. (A)

Justice grande, ou plûtôt, comme on disoit, la grande justice, magna justitia : on l’appelloit aussi indifféremment plaît de l’épée, comme il est dit dans des lettres de Philippe III. du mois de Juin 1280, confirmées par Charles V. au mois de Janvier 1378 pour l’abbaye de Bernay, & justitia magna quæ dicitur placitum ensis. Toutes ces dénominations ne signifient autre chose que la haute justice, à laquelle est attaché le droit de vie & de mort, potestas gladii seu jus gladii. Voyez Justice haute ou Haute Justice. (A)

Justice haute, ou plûtôt haute Justice, alta justitia, merum imperium, est l’entiere jurisdiction qui appartient à un seigneur. Voyez ci-après Justice seigneuriale. (A)

Justice hommagere est celle qui est exercée par les hommes féodaux ou de fief dans les bailliages & dans toutes les justices seigneuriales qui sont au moins vicomtieres. Elle est opposée à la justice cottiere, qui est exercée par les hommes cottiers. Voyez Justice cottiere.

Ces sortes de justices ne sont usitées que dans quel-

ques coûtumes des Pays-bas, comme en Artois. (A)

Justice inférieure est celle qui en a une autre au-dessus. On comprend quelquefois sous ce terme en général toutes les justices autres que les cours supérieures. Voyez Juge inférieur. (A)

Justice sous latte se dit en quelques provinces pour exprimer celle qui s’exerce seulement sous le couvert de la maison du seigneur. (A)

Justice manuelle ; suivant le style de procéder au pays de Normandie, c’est lorsque le seigneur, pour avoir payement des arrérages de sa rente ou charge, prend de sa main sur l’héritage de son débiteur & en la présence du sergent, des namps, c’est-à-dire des meubles saisis, & qu’il les délivre au sergent pour les discuter, c’est-à-dire pour les vendre.

Justice militaire est une jurisdiction qui est exercée au nom du roi dans le conseil de guerre par les officiers qui le composent.

Cette jurisdiction connoît de tous les délits militaires qui sont commis par les gendarmes, cavaliers, dragons, soldats.

Pour entendre de quelle maniere s’exerce la justice militaire tant dans les places qu’à l’armée, il faut observer ce qui suit.

Tout gouverneur ou commandant d’une place peut faire arrêter & constituer prisonnier tout soldat prévenu de crime, de quelque corps & compagnie qu’il soit, en faisant avertir dans 24 heures de l’emprisonnement le capitaine ou officier commandant la compagnie dont est le soldat.

Il peut aussi faire arrêter les officiers qui seroient tombés en grieve faute, à la charge d’en donner aussitôt avis à S. M. pour recevoir ses ordres.

Les chefs & officiers des troupes peuvent aussi faire arrêter & emprisonner les soldats de leurs corps & compagnies qui auront commis quelque excès ou désordre ; mais ils ne peuvent les élargir sans la permission du gouverneur, ou qu’ils n’ayent été jugés au conseil de guerre, si le cas le requiert.

Le sergent-major de la place, & en sa place celui qui en fait les fonctions, doit faire faire le procès aux soldats ainsi arrêtés.

Les juges ordinaires des lieux où les troupes tiennent garnison, connoissent de tous crimes & délits qui peuvent être commis dans ces lieux par les gens de guerre, de quelque qualité & nation qu’ils soient, lorsque les habitans des lieux ou autres sujets du roi y ont intérêt, nonobstant tous priviléges à ce contraires, sans que les officiers des troupes en puissent connoître en aucune maniere. Les juges ordinaires sont seulement tenus d’appeller le prevôt des bandes ou du régiment, en cas qu’il y en ait, pour assister à l’instruction & au jugement de tout crime de soldat à habitant ; & s’il n’y a point de prevôt, ils doivent appeller le sergent-major, ou l’aide-major, ou l’officier commandant le corps de la troupe.

Les officiers des troupes du roi connoissent seulement des crimes ou délits qui sont commis de soldat à soldat : ils ne peuvent cependant, sous prétexte qu’ils auroient droit de connoître de ces crimes, retirer ou faire retirer leurs soldats des prisons où ils auroient été mis de l’autorité des juges ordinaires, mais seulement requérir ces juges de les leur remettre ; & en cas de refus, se pourvoir pardevers le roi.

Les chefs & officiers ne peuvent s’assembler pour tenir conseil de guerre ou autrement, sans la permission expresse du gouverneur ou commandant.

La forme que l’on doit observer pour tenir le conseil de guerre a été expliquée ci-devant au mot Conseil de guerre.

La justice militaire peut condamner à mort ou à d’autres peines plus légeres, selon la nature du dé-