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Scoockius dans son traité du beurre, prétend que rien n’est meilleur pour conserver les dents belles & saines, que de les frotter avec du beurre : ce qui suivant M. Chambers qui apparamment n’aimoit pas le beurre, n’est guere moins dégoûtant que l’urine avec laquelle les Espagnols se rincent les dents tous les matins.

Pour prévenir & guérir le scorbut des gencives, on recommande de se laver tous les matins la bouche avec de l’eau salée. Et pour empêcher les dents de se gâter ou carier, quelques-uns emploient seulement la poudre de corne de cerf dont ils se frottent les dents, & les rincent ensuite avec de l’eau froide. On prétend que cela est préférable aux dentifrices qui par la dureté de leurs parties emportent l’émail qui couvre les dents, & les garantit des mauvais effets de l’air, des alimens, des liqueurs, &c. lesquelles occasionnent des douleurs de dents, lorsqu’elles sont usées.

Les dentifrices sont ordinairement composés de poudres de corne de cerf, de corail rouge, d’os de seche, d’alun brûlé, de myrrhe, de san-dragon, &c. Quelques-uns recommandent la poudre de brique, comme suffisante pour remplir toutes les intentions d’un bon dentifrice. Voyez Dentifrice.

La douleur de dent qui vient de la carie, se guérit en desséchant le nerf & plombant la dent : si ce moyen ne réussit pas, il faut faire le sacrifice de la dent.

Mal des ardens, (Hist. de France.) vieux mot qu’on trouve dans nos anciens historiens, & qui désigne un feu brûlant. On nomma mal des ardens dans le tems de notre barbarie, une fievre ardente, érésipélateuse, épidémique, qui courut en France en 1130 & 1374, & qui fit de grands ravages dans le royaume ; voyez-en les détails dans Mézerai & autres historiens. (D. J.)

Mal caduc. Voyez Epilepsie.

M. Turberville rapporte dans les transactions philosophiques, l’histoire d’un malade qui étoit attaqué du mal caduc. Il observa dans son urine un grand nombre de vers courts qui avoient beaucoup de jambes, & semblables aux vers à mille piés. Tant que les vers furent vivans & eurent du mouvement, les accès revenoient tous les jours ; mais aussi-tôt qu’il lui eut fait prendre une demi-once d’oximel avec de l’ellebore dans de l’eau de tanaise, les vers moururent, & la maladie cessa.

Mal de mer, (Marine.) c’est un soulevement de l’estomac, qui cause de fréquens vomissemens & un mal-être général par tout le corps, dont sont affectés ceux qui ne sont pas accoutumés à la mer, & qui pour l’ordinaire cesse au bout de quelques jours. On prétend que le mouvement du vaisseau en est une des principales causes.

Mal de cerf, (Maréchal.) rhumatisme général par tout le corps du cheval.

Mal teint, (Maréchal.) variété du poil noir. Voyez Noir.

Mal de ojo, (Hist. mod.) Cela signifie mal de l’œil en espagnol. Les Portugais & les Espagnols sont dans l’idée que certaines personnes ont quelque chose de nuisible dans les yeux, & que cette mauvaise qualité peut se communiquer par les regards, sur-tout aux enfans & aux chevaux. Les Portugais appellent ce mal quebranto ; il paroît que cette opinion ridicule vient à ces deux nations des Maures ou Sarrasins : en effet les habitans du royaume de Maroc sont dans le même préjugé.

MALABAR, la côte de, (Géogr.) Quelques-uns comprennent sous ce nom toute la partie occidentale de la presqu’île de l’Inde en-deçà du Gange, depuis le royaume de Beylana au nord, jusqu’au cap Comorin au midi ; d’autres prennent seulement cette

côte à l’extrémité septentrionale du royaume de Canare, & la terminent, comme les premiers, au cap Comorin.

Le Malabar peut passer pour le plus beau pays des Indes au-deçà du Gange : outre les villes qu’on y voit de tous côtés, les campagnes de riz, les touffes de bois de palmiers, de cocotiers, & autres arbres toujours verds ou chargés de fruits, les ruisseaux & les torrens qui arrosent les prairies & les paturages, rendent toutes les plaines également belles & riantes. La mer & les rivieres fournissent d’excellens poissons ; & sur la terre, outre la plûpart des animaux connus en Europe, il y en a beaucoup d’autres qui sont particuliers au pays. Le riz blanc & noir, le cardamome, les ananas, le poivre, le tamarin, s’y recueillent en abondance. Il suffit de savoir qu’on a mis au jour en Europe 12 tomes de plantes de Malabar, pour juger combien le pays est riche en ce genre.

Les Malabares de la côte sont noirs, ont les cheveux noirs, lisses & fort longs. Ils portent quantité de bracelets d’or, d’argent, d’ivoire, de cuivre ou d’autre métal ; les bouts de leurs oreilles descendent fort bas : ils y font plusieurs trous & y pendent toutes sortes d’ornemens. Les hommes, les femmes & les filles se baignent ensemble dans des bassins publiquement au milieu des villes. On marie les filles dès l’âge de huit ans. (M. Menuret.)

L’ordre de succession, soit pour la couronne, soit pour les particuliers, se fait en ligne féminine : on ne connoît les enfans que du côté de la mere, parce que les femmes sont en quelque maniere communes, & que les peres sont incertains.

Les Malabares sont divisés en deux ordres ou castes, savoir les nairos, qui sont les nobles, & les poliars, qui sont artisans, paysans ou pêcheurs. Les nairos seuls peuvent porter les armes & commercent avec les femmes des poliars tant qu’il leur plaît : c’est un honneur pour ces derniers. La langue du pays est une langue particuliere.

La religion des peuples qui l’habitent n’est qu’un assemblage de superstitions & d’idolatrie ; ils représentent leurs dieux supérieurs & inférieurs sous de monstrueuses figures, & mettent sur leurs têtes des couronnes d’argille, de métal, ou de quelqu’autre matiere. Les pagodes où ils tiennent ces dieux ont des murailles épaisses bâties de grosses pierres brutes ou de briques. Les prêtres de ces idoles laissent croître leurs cheveux sans les attacher ; ils sont nuds depuis la ceinture jusqu’aux genoux : les uns vivent du service des idoles, d’autres exercent la medecine, & d’autres sont courtiers.

Il est vrai qu’il y a eu des chrétiens jettés de bonne heure sur les côtes de Malabar, & au milieu de ces idolâtres. Un marchand de Syrie nommé Marc-Thomas, s’étant établi sur cette côte avec sa famille & ses facteurs au vj. siecle, y laissa sa religion, qui étoit le Nestorianisme. Ces sectaires orientaux s’étant multipliés, se nommerent les chrétiens de S. Thomas, & vécurent paisiblement parmi les idolâtres. (D. J.)

MALABARES, Philosophie des, (Hist. de la Philosophie.) Les premieres notions que nous avons eues de la religion & de la morale de ces peuples, étoient conformes à l’inattention, à l’inexactitude & à l’ignorance de ceux qui nous les avoient transmises. C’étoient des commerçans qui ne connoissoient guère des opinions des hommes que celles qu’ils ont de la poudre d’or, & qui ne s’étoient pas éloignés de leurs contrées pour savoir ce que des peuples du Gange, de la côte de Coromandel & du Malabar pensoient de la nature & de l’être suprème. Ceux qui ont entrepris les mêmes voyages par le zele de porter le nom de Jesus-Christ, & d’élever des croix dans les mêmes pays, étoient plus instruits. Pour se