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sent les hommes, une passion plus noble, un objet plus grand ; qui sacrifie le moment au tems, son bien-être à l’avantage des autres, la considération, l’estime même à la gloire ou à la patrie : c’est Fabius qui s’expose au mépris de Rome pour sauver Rome.

La magnanimité n’est que la grandeur d’ame devenue instinct, enthousiasme, plus noble & plus pure par son objet & par le choix de ses moyens, & qui met dans ses sacrifices je ne sais quoi de plus fort & de plus facile.

MAGNANIMITÉ (Médecine.) ce mot est un euphemisme dans le langage medicinal ; il signifie exactement vigueur dans l’acte vénérien. Au reste, c’est expliquer un euphémisme par un autre, mais le dernier nous paroît beaucoup plus intelligible que le premier ; & il ne seroit pas honnête de se rendre plus clair. (b)

MAGNES ÆRIS, (Chimie.) nom donné par le célebre Hoffman à une préparation faite avec de la craie & de l’esprit-de-vin.

MAGNES ARSENICALIS, (Chimie.) c’est une combinaison faite avec parties d’antimoine, de soufre & d’arsencic, fondus ensemble dans un creuset.

MAGNES CARNEUS, (Hist. nat.) nom donné par Cardan à une espece de terre blanche qui se trouve en Italie ; elle est blanche a une certaine consistance semblable à celle de l’ostéocolle, elle est mouchetée de taches noires ; elle s’attache fortement à la langue qu’elle semble attirer. Le même Cardan prétend avoir vu qu’une blessure faite dans la chair avec une épée dont la lame avoit été frottée de cette terre, se referma sur le champ. Cette substance, que quelques-uns ont appellée calamita alba, se trouve, dit-on, dans l’île d’Elbe, près des côtes de la Toscane. Voyez Boëtius de Boot, de lapid. & gemmis.

MAGNÉSIE ou MAGNESE, (Hist. nat.) substance minérale. Voyez Manganese.

Magnésie blanche, (Chimie & Mat. medic.) c’est le nom le plus usité aujourd’hui d’une poudre terreuse blanche, & qui a été connue aussi auparavant sous les noms de panacée solutive, de panacée angloise, de fécule alkaline, de panacée anti-hyppocondriaque, de poudre du comte de palma, de poudre de sentinelli. Voici la préparation qu’en donne M. Baron dans ses additions au cours de Chimie de Lémery.

Mettez la quantité qu’il vous plaira d’eau-mere des salpétriers dans une terrine de grais ; versez dessus parties égales d’huile de tartre par défaillance ou de dissolution de cendres gravelées, peu de tems après le mélange se troublera ; mais il reprendra sa limpidité aussi-tôt qu’il aura déposé un sédiment blanchâtre qui le rendoit laiteux : décantez alors la liqueur qui surnage le précipité, lavez le à plusieurs reprises, & mettez-le égoutter sur un filtre ; faites-le sécher ensuite jusqu’à ce qu’il soit réduit en une poudre blanche.

Il y a deux autres procédés pour préparer la magnésie, l’un & l’autre plus anciens que le précédent. Le premier consiste à évaporer jusqu’à siccité de l’eau-mere de salpêtre, à calciner le produit de cette dessiccation, jusqu’à ce qu’il ne donne plus de vapeurs acides, à l’édulcorer ensuite par des lotions répétées avec l’eau bouillante, & enfin à le faire égoutter & sécher selon l’art. La magnésie préparée ainsi est peut être moins subtile, moins divisée que celle qu’on obtient par la précipitation, ce qui suffit pour rendre cette derniere préférable dans l’usage medicinal ; mais d’ailleurs les produits de ces deux procédés sont parfaitement semblables. L’eau-mere du nitre étant composée du mélange de nitre à base terreuse & de sel marin à base terreuse (Voyez Nitre), qui sont l’un & l’autre des sels neutres éminemment solubles par l’eau, il est clair que la portion de ces sels, qui

pourroient avoir été épargnés dans la calcination, est infailliblement enlevée par les lotions réitérées.

L’autre procédé consiste à précipiter l’eau-mere du nitre par l’acide vitriolique : celui-ci est absolument défectueux ; ce n’est qu’un faux précipité qu’on obtient par ce moyen (voyez Précipitation) ; c’est un sel seleniteux produit par l’union de l’acide vitriolique à une partie de la terre qui sert de base aux sels neutres contenus dans l’eau-mere du salpêtre, & dont nous avons déja fait mention. Je dis une portion, car ce n’est pas une seule espece de terre qui fournit la base de ces sels. Une portion seulement est calcaire & produit le faux précipité avec l’acide vitriolique ; l’autre portion est analogue à la base du sel de seidlitz & d’ébsham, & elle constitue, avec l’acide vitriolique un sel neutre soluble, & qui reste suspendu par conséquent dans la liqueur. Voyez Sel marin, Sel de seidliz, Sel d’ebsham, sous l’article général Sel.

C’est évidemment à cette terre que j’appelle seidlitiene que la magnésie doit la propriété que Hoffman y a remarquée de fournir une dissolution saline amere & salée, lorsqu’on la dissout dans de l’esprit de vitriol, tandis que les terres purement calcaires ne donnent avec le même acide qu’une liqueur très peu chargée de sel qui n’est ni amere ni salée, & qui est même presqu’absolument insipide.

La magnésie est donc à mon avis une terre absorbante mélangée d’une portion de terre calcaire & d’une portion de terre analogue à la base du sel de seidlitz.

La comparaison que fait Hoffman de l’eau-mere des salpétriers & de la liqueur saline appellée huile de chaux, provenant de la décomposition du sel ammoniac par la chaux, relativement à la propriété de produire la magnésie blanche ; cette comparaison, dis-je, n’est point exacte.

Le D. Black, medecin à Edimbourg, qui a pris comme une matiere absolument semblable à la magnesie blanche, la terre qui sert de base au sel d’ebsham (voyez recueil de medecine de Paris, vol. VIII.), a donné dans une erreur opposée. Le précipité de l’huile de chaux est entierement calcaire, & celui du sel d’ebsham est entierement seidlitien ; ni l’un ni l’autre n’est par conséquent la magnésie blanche, quoique leurs vertus medicinales soient peut-être les mêmes, ce qui est cependant fort douteux & qui reste à éprouver.

La magnésie blanche ordinaire, c’est-à-dire le précipité de l’eau-mere de nitre, purge très-bien presque tous les sujets à la dose d’une drachme ou de deux, ou même de demi-once pour les adultes, & à proportion pour les enfans. Il arrive quelquefois, mais rarement, qu’étant prise à la même dose, elle ne donne que des envies inutiles d’aller, & ne purge point du tout. Hoffman attribue cette diversité d’action à la présence ou à l’absence des acides dans les premieres voies. Si cette terre, purement absorbante & dépourvue, dit-il, de tout principe purgatif rencontre des acides dans les premieres voies, elle s’unit avec ces acides, & se change par-là en un sel neutre, âcre & stimulant : ce qu’il trouve évident par l’analogie qu’il admet entre ce sel formé dans les premieres voies, & celui qui résulte de l’union de cette terre à l’acide vitriolique. Cette explication n’est que du jargon tout pur, qu’une franche théorie à prendre ce terme dans son acception la plus défavorable ; car, 1°. elle suppose tacitement que la présence des acides dans les premieres voies est le cas le plus fréquent, puisqu’en effet la magnésie purge le plus grand nombre de sujets ; or cette supposition est démentie par l’expérience : 2°. elle indique l’inadvertence la plus puérile sur le degré d’acidité réelle des sucs acides contenus quelquefois dans les premieres voies : car il est de fait que même dans le de-