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suivant lui on a une recette très-assurée pour remettre les membres démis : Incipe cantare in alto S : F. motas danata dardaries astotaries, dic una parite usque dum coeant, &c. C’est l’édition d’Alde Manuce que je lis ; car celle d’Henri Estienne, revûe & corrigée par Victorius, a été fort changée sur un point où la grande obscurité du texte ouvre un vaste champ à la manie des critiques.

Chacun sait que les anciens avoient attaché les plus grandes vertus au mot magique abracadabra. Q. Serenus, célebre Médecin, prétend que ce mot vuide de sens écrit sur du papier & pendu au cou, étoit un sûr remede pour guérir la fievre quarte ; sans doute qu’avec de tels principes la superstition étoit toute sa pharmacie, & la foi du patient sa meilleure ressource.

C’est à cette foi qu’on peut & qu’on doit rapporter ces guérisons si extraordinaires dans le récit qu’elles semblent tenir de la magie, mais qui approfondies, sont presque toujours des fraudes pieuses, ou les suites de cette superstition qui n’a que trop souvent triomphé du bon sens, de la raison & même de la Philosophie. Nos préjugés, nos erreurs & nos folies se tiennent toutes par la main. La crainte est fille de l’ignorance ; celle-ci a produit la superstition qui est à son tour la mere du fanatisme, source féconde d’erreurs, d’illusions, de phantômes, d’une imagination échaufée qui change en lutins, en loups-garoux, en revenans, en démons même tout ce qui le heurte ; comment dans cette disposition d’esprit ne pas croire à tous les rêves de la magie ? si le fanatique est pieux & dévot, (& c’est presque toujours ce ton sur lequel il est monté) il se croira magicien pour la gloire de Dieu ; du-moins s’attribuera-t-il l’important privilege de sauver & damner sans appel : il n’est pire magie que celle des faux dévots. Je finis par cette remarque ; c’est qu’on pourroit appeller le sabbath l’empire des amazones souterraines ; du-moins il y a toujours eu beaucoup plus de sorcieres que de sorciers : nous l’attribuons bonnement à la foiblesse d’esprit ou à la trop grande curiosité des femmes ; filles d’Eve, elles veulent se perdre comme elle pour tout savoir. Mais un anonyme (Voyez Alector ou le Coq, lib. II. des adeptes) qui voudroit persuader au public qu’il est un des premiers confidens de satan, prête aux démons un esprit de galanterie qui justifie leur prédilection pour le sexe, & les faveurs dont ils l’honorent : par-là même le juste retour de cette moitié du genre humain avec laquelle pour l’ordinaire on gagne plus qu’on ne perd.

MAGIOTAN, (Hist. nat.) nom que l’on donne en Provence & dans d’autres provinces du royaume, à une substance pierreuse ou a une espece de concrétion ou de tuf qui s’amasse à l’embouchure des rivieres : on dit qu’elle est tendre & spongieuse, & paroît formée par le limon que déposent les eaux & qui a pris de la consistance.

MAGIQUE, (Médecine.) Voyez Enchantement, (Médecine.)

Magique, Baguette, verge ou bâton dont se servent les magiciens pour tracer les cercles dans leurs opérations & leurs enchantemens.

Voici la description qu’en donne M. Blanchard : « Elle doit être de coudrier, de la poussée de l’année. Il faut la couper le premier mercredi de la lune, entre onze & douze heures de nuit ; en la coupant, il faut prononcer certaines paroles ; il faut que le couteau soit neuf, & le retirer en haut en coupant la baguette. Il faut la bénir, & écrire au gros bout le mot agla, au milieu ων, & le tetragrammaton au petit bout, avec une croix à chaque mot, & dire : Conjuro te citò mihi obedire. Venias per Deum vivum, & faire une croix ; per Deum verum, une se-

conde croix ; per Deum sanctum, une troisieme

croix ». Mém. de l’acad. des Inscript. tome XII. page 56. (G)

MAGIOVINTUM, (Géog. anc.) ancien lieu de l’île de la Grande-Bretgne entre Lactodorum & Durocobriva, à dix sept mille pas de la premiere, & à douze mille de la seconde, selon l’itineraire d’Antonin. Cambden croit que c’est Ashwell, bourgade aux confins d’Hertfordshire, en tirant vers Cambridge. M. Gale penche à croire que c’est Dunstable, parce que la distance entre Lactodorum & Dunstable convient beaucoup mieux au nombre de milles déterminé par Antonin, quoiqu’elle ne s’y accorde pas tout-à-fait. (D. J.)

MAGISTER, s. m. (Hist. mod.) maître ; titre qu’on trouve souvent dans les anciens écrivains, & qui marque que la personne qui le portoit, étoit parvenue à quelque degré d’éminence, in scientiâ aliquâ præsertim litterariâ. Anciennement on nommoit magistri ceux que nous appellons maintenant docteurs. Voyez Docteurs, Degré & Maitre.

C’est un usage encore subsistant dans l’université de Paris, de nommer maîtres tous les aspirans au doctorat, qui font le cours de la licence ; & dans les examens, les thèses, les assemblées, & autres actes publics de la faculté de Théologie, les docteurs sont nommés S. M. N. Sapientissimi Magistri Nostri. Charles IX. appelloit ordinairement & d’amitié son précepteur Amyot, mon maître.

Magister equitum, (Littérat.) il n’y a point de mot françois qui puisse exprimer ce que c’étoit que cette charge ; & en le rendant par général de la cavalerie, comme font tous nos traducteurs, on n’en donne qu’une idée très-imparfaite ; il suffit de dire que c’étoit la premiere place après le dictateur, tant en paix qu’en guerre.

Magister scrinii dispositionum, (Antiq. rom.) c’étoit celui qui faisoit le rapport au prince des sentences & des jugemens rendus par les juges des lieux, & qui les examinoit, pour voir s’ils avoient bien jugé ou non, & envoyoit sur cela la réponse du prince. Il y avoit des couriers établis pour porter ces réponses nommés agentes ad responsum, & un fonds pour les payer, appellé aurum ad responsum.

Magister scrinii epistolarum, (Antiq. rom.) secrétaire qui écrivoit les lettres du prince. Auguste écrivoit les siennes lui-même, & puis les donnoit à Mécénas & à Agrippa pour les corriger, dit Dion. Les autres empereurs les dictoient ordinairement, ou disoient à leur secrétaire leurs intentions, se contentant de les souscrire de ce mot vale. Ce secrétaire avoit sous lui trente-quatre commis, qu’on appelloit epistolares.

Magister scrinii libellorum, (Antiq. rom.) maître des requêtes, qui rapportoit au prince les requêtes & les placets des particuliers, & recevoit sa réponse qui étoit rédigée par écrit par ses commis au nombre de trente-quatre, nommés libellenses. Nous voyons cela en la notice de l’empereur : cognitiones & preces magister libellorum tractabat, & acta libellenses scribebant. Nous avons une formule de requête qui fut présentée à l’empereur Antonin le Pieux, dont voici les termes.

Cùm ante hos dies conjugem & filium amiserim, & pressus necessitate corpora eorum fictili sarcophago commendaverim, donec quietis locus quem emeram ædificaretur, viâ flaminiâ, inter milliare secundum & tertium euntibus ab urbe, parte lævâ, custodia monumenti Flam. Thymel. Amelo. M. signii Orgilii, rogo, domine, permittas mihi in eodem loco, in marmoreo sarcophago queni mihi modò comparavi, eadem corporæ colligere, ut quando & ego esse desiero, pariter cum iis ponar. Voilà la requête que présentoit Arrius Alphius, affranchi d’Arria Fadilla, mere de l’empereur,