Page:Diderot - Encyclopedie 1ere edition tome 9.djvu/737

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

cyclopédie faite pour transmettre à la postérité l’histoire des découvertes de notre siecle, doit par cette raison rendre justice à tout le monde ; & c’est ce que nous croyons avoir fait dans cet article. Comme ce manuscrit est prêt à sortir de nos mains pour n’y rentrer peut-être jamais, nous ajouterons par la suite dans les supplémens de l’Encyclopédie ce qui aura été ajouté à la théorie de la lune, depuis le mois de Novembre 1759, où nous écrivons cet article.

Nous avons dit plus haut que M. Halley avoit commencé l’observation d’une période de deux cens vingt-trois lunaisons, & que M. le Monnier avoit continué ce travail ; le public en a déja recueilli le fruit, M. le Monnier ayant publié deux volumes de ses observations, qui serviront à connoître l’erreur des tables ; il continue ce travail avec ardeur & avec assiduité ; & il espere publier successivement le résultat de ses observations à la fin de chaque période ; au reste il ne faut pas croire, comme je l’ai remarqué & prouvé ce me semble le premier dans mes recherches sur le système du monde, troisieme partie, qu’au bout de la période de deux cens vingt-trois lunaisons, les inégalités reviennent exactement les mêmes ; mais la différence n’est pas bien considérable, & au moyen d’une méthode facile que j’ai indiquée, on peut déterminer assez exactement l’erreur des tables pour chaque lieu calculé de la lune. Voyez l’article xxxj. de l’ouvrage cité.

Pour achever de rendre compte des travaux des Géometres de notre siecle sur la lune, il ne nous reste plus qu’à parler de leurs recherches sur la masse de cette planete. M. Newton, par quelques phenomenes des marées, avoit essayé de la déterminer. Voyez Flux & Reflux. M. Daniel Bernouilli a depuis corrigé ce calcul ; enfin par une théorie de la précession des équinoxes & de la nutation, j’ai déterminé la masse de la lune d’environ un de celle de la terre ; c’est-à-dire environ la moitié de ce qu’avoit trouvé M. Newton ; ce calcul est fondé sur ce que la nutation de l’axe de la terre vient presque uniquement de la force lunaire, & qu’au contraire la précession vient de la force lunaire & de la force solaire réunies ; d’où il s’ensuit qu’on trouvera le rapport des deux forces, en comparant la quantité observée de la nutation avec la quantité observée de la précession. Or le rapport des forces étant connu, on en déduit aisément la masse de la lune. Voyez mes recherches sur la précession des équinoxes, 749, & la seconde partie de mes recherches sur le système du monde, liv. III. art. iij. voyez aussi les articles Nutation & Précession.

J’ajouterai ici que dans l’hypothese de la non-sphéricité de la lune, la terre & le soleil doivent produire dans l’axe de cette planete un mouvement analogue à celui que l’action de la lune & du soleil produisent dans l’axe de la terre, & d’où résulte la précession des équinoxes ; sur quoi voyez mes recherches sur le système du monde, seconde partie, articles cccxliij & suiv. voyez aussi l’article Libration. Au reste, si les diametres de la lune sont inégaux, leur inégalité est très-peu sensible par les observations, comme je l’ai prouvé dans les mêmes recherches, seconde partie, art. ccclxxvj & suiv. (O)

Lune, (Chimie.) nom que les Chimistes donnent à l’argent. Voyez Argent.

Lune, crystaux de, (Chimie.) c’est ainsi que s’appelle le sel qui résulte de l’union de l’acide nitreux & de l’argent. Les crystaux de lune fondus & moulés dans une lingotiere, fournissent la pierre infernale des Chirurgiens. Voyez Pierre infernale. (b)

Lune, (Hist. nat. Chimie, Métallurgie & Minéralogie.) luna chimicorum ; c’est le nom sous lequel un grand nombre de Chimistes ont désigné l’argent.

Comme dans l’article Argent, contenu dans le premier volume de ce Dictionnaire, on n’est point entré dans tous les détails nécessaires pour faire connoître ce métal, ses mines & les opérations par lesquelles on est obligé de le faire passer, on a cru devoir y suppléer ici, afin de ne rien laisser à desirer au lecteur sur une matiere si intéressante.

L’argent est un des métaux que l’on nomme parfaits, à cause de la propriété qu’il a de ne point s’altérer ni dans le feu, ni à l’air, ni dans l’eau. Il est d’un blanc brillant, dur, sonore ; & c’est après l’or, le plus ductile des métaux. Sa pesanteur est à celle de l’eau comme 11091 est à 1000. Son poids est à celui de l’or environ comme 5 est à 9. L’argent entre en fusion plus promptement que le cuivre. Il se dissout très-aisément dans l’acide nitreux ; il se dissout dans l’acide vitriolique, lorsqu’on fait bouillir ce dissolvant. Il s’unit avec l’acide du sel marin qui le dégage & le précipite des autres dissolvans, & forme avec lui ce qu’on appelle lune cornée. Il a beaucoup de disposition à s’unir avec le soufre, & par cette union l’argent devient noir ou rougeâtre. Il s’amalgame très-bien avec le mercure. Il ne se dissout point dans le feu par la litharge ou le verre de plomb.

L’argent se montre sous un grand nombre de formes différentes dans le sein de la terre, ce qui fait que les Minéralogistes en comptent plusieurs mines différentes.

1°. Ce métal se trouve sous la forme qui lui est propre, c’est ce qu’on nomme argent-vierge ou argent-natif, alors il est très-aisé à reconnoître ; il se montre sous différentes formes, tantôt il est en masses compactes & solides, que les Espagnols nomment pepitas. Il y en a de différentes grandeurs ; M. Henckel dans la préface de sa pyritologie nous apprend que l’on trouva autrefois dans les mines de Freyberg en Misnie une masse d’argent natif qui pesoit 400 quintaux. L’argent natif se trouve plus communément par lames ou en petits feuillets attachés à la pierre qui lui sert de matrice. Il forme souvent des ramifications semblables à des arbrisseaux ou à des feuilles de sapin, enfin il ressemble très-souvent à des fils ou à des poils. Cet argent natif n’est point parfaitement pur, il est souvent mêlé d’arsenic ou de soufre ou même de cuivre.

2°. L’argent est minéralisé avec du soufre seul, & forme la mine que l’on nomme mine d’argent vitreuse, parce qu’elle a quelque ressemblance avec du verre. Elle a à peu près la couleur du plomb, quoique cependant elle soit un peu plus noire que ce métal. Cette mine est si tendre, qu’on peut la couper avec un couteau ; elle prend différentes formes, & se méle souvent avec des mines d’autres métaux. Cette mine d’argent est très-riche, & ne contient que peu de soufre.

3°. La mine d’argent rouge n’est composée que d’argent, de soufre & d’arsenic ; tantôt elle est par masses compactes & irrégulieres, tantôt elle est en crystaux réguliers d’un rouge vif comme celui du rubis ou du grenat ; tantôt elle est d’un brun noirâtre, & sans transparence, alors elle est-très-riche ; quelquefois elle forme des especes de lames ou d’écailles. Cette mine se trouve fort abondamment dans les mines d’Andreasberg au Hartz. Cette mine d’argent écrasée donne une poudre rouge : exposée au feu, elle pétille & se gerse ; après quoi elle entre aisément en fusion, & le feu en dégage l’arsenic.

4°. La mine d’argent cornée, en allemand horn-ertz ; elle est extrèmement rare ; c’est de l’argent qui a été minéralisé par l’acide du sel marin, suivant quelques auteurs ; & par l’arsenic, suivant d’autres. Il y en a de la brune, & un peu transparente comme de la corne ; ce qui lui a fait donner son nom ; cette espece