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plus étendu, est la terre de Labour. Voyez Labour. (D. J.)

LABORIEUX, adj.(Gram.) c’est celui qui aime & qui soutient le travail. Montrez un prix, excitez l’émulation, & tous les hommes aimeront le travail, tous se rendront capables de le soutenir. Des taxes sur l’industrie ont plongé les Espagnols dans la paresse où ils croupissent encore, & quelquefois la superstition met la paresse en honneur. Sous le joug du despotisme les peuples cessent d’être laborieux, parce que les propriétés sont incertaines. Si l’amour de la patrie, l’honneur, l’amour des lois avoient été les ressorts d’un gouvernement, & que par la corruption des législateurs, ou par la conquête de l’étranger, ces ressorts eussent été détruits, il faudroit peut-être bien du tems pour que la cupidité & le desir du bien-être physique rendissent les hommes laborieux. Quand on offre de l’argent aux Péruviens pour les faire travailler, ils répondent, je n’ai pas faim. Ce peuple qui conserve encore quelque souvenir de la gloire & du bonheur de ses ancêtres, privé aujourd’hui dans sa patrie des honneurs, des emplois, des avantages de la société, se borne aux besoins de la nature ; la paresse est la consolation des hommes à qui le travail ne promet pas l’espece de biens qu’ils desirent.

Laborieux se dit des ouvrages qui demandent plus de travail que de génie. On dit, des recherches laborieuses.

LABOUR, s. m. (Econom. rust.) c’est le remüement de la terre, fait avec un instrument quelconque. On laboure les champs avec la charrue, les jardins avec la bêche, les vignes avec la houe, &c. les bienfaits de la terre sont attachés à ce travail ; mais sans l’invention des instrumens, & l’emploi des animaux propres à l’accélérer, un homme vigoureux fourniroit à peine à sa nourriture ; la terre refuseroit l’aliment à l’homme foible ou malade ; la société ne seroit point composée de cette variété de conditions dont chacune peut concourir à la rendre heureuse & stable. L’inégalité entre les forces ne feroit naître entre les hommes que différens dégrés d’indigence & d’abrutissement.

Labourer la terre, c’est la diviser, exposer successivement ses molécules aux influences de l’air ; & de plus c’est déraciner les herbes stériles, les chardons, &c. qui sans les labours couvriroient nos champs. Il faut donc, pour que le labour remplisse son objet, qu’il soit fait dans une terre assez trempée pour être meuble, mais qui ne soit pas trop humide. Si elle est trop seche, elle se divise mal ; si elle est trop humide on la corroye, le hâle la durcit ensuite, & d’ailleurs les mauvaises herbes sont mal déracinées. La profondeur du labour doit être proportionnée à celle de l’humus ou terre végétable, aux besoins de la graine qu’on veut semer, & aux circonstances qui déterminent à labourer, premierement à la profondeur de l’humus. Il y a un assez grand nombre de terres propres à rapporter du bled, quoiqu’elles n’ayent que six à sept pouces de profondeur. Si vous piquez plus avant, vous amenez à la superficie une sorte d’argille qui, sans être inféconde, rend votre terre inhabile à rapporter du bled. Je dis sans être inféconde ; car l’orge, l’avoine, & les autres menus grains n’en croîtront que plus abondamment dans cette terre. Elle ne se refuse à la production du bled que par une vigueur excessive de végétation. La plante y pousse beaucoup en herbe, graine peu, & sur-tout mûrit tard, ce qui l’expose presque infailliblement à la rouille. La perte des années de bled est assez considérable pour que les cultivateurs ayent à cet égard la plus grande attention. Ils ne sauroient trop se précautionner, quant à cet objet, contre leur propre négligence, ou l’ignorance de ceux qui menent la charrue.

Les terres sujettes à cet inconvénient sont ordinairement rougeâtres & argilleuses. Lorsqu’on y leve la jachere pendant l’été, après une longue sécheresse, la premiere couche soulevée en grosses mottes, entraîne avec elle une partie de la seconde ; & on dit alors que la terre est dessoudée. Les fermiers fripons qu’on force à quitter leur ferme, dessoudent celles de leurs terres qui peuvent l’être pendant les deux dernieres années de leur bail. Par ce moyen ils recueillent plus de menus grains, & nuisent en même tems à celui qui doit les remplacer.

Il faut en second lieu que le labour soit proportionné aux besoins de la graine qu’on veut semer. Si vous préparez votre terre pour de menus grains, tels que l’orge & l’avoine, un labour superficiel est suffisant. Le blé prend un peu plus de terre ; ainsi le labour doit être plus profond. Mais si on veut semer du sainfoin ou de la luserne, dont les racines pénetrent à une grande profondeur, on ne peut pas piquer trop avant. Cela est nécessaire, afin que les racines de ces plantes prennent un prompt accroissement, & acquierent le dégré de force qui les fait ensuite s’enfoncer d’elles-mêmes dans la terre qui n’a pas été remuée.

Enfin le labour doit être proportionné aux circonstances dans lesquelles il se fait. Si vous défrichez une terre, la profondeur du labour dépendra de la nature de la friche que vous voulez détruire. Un labour de quatre pouces suffit pour retourner du gazon, exposer à l’air la racine de l’herbe de maniere qu’elle se desseche & que la plante périsse ; mais si la friche est couverte de bruyeres & d’épines, on ne sauroit en essarter trop exactement toutes les racines, & le plus profond labour n’y suffit pas toujours. La levée des jacheres est dans le cas du défrichement léger. Ce premier labour doit être peu profond, mais il faut enfoncer par degrés proportionnels ceux qui le suivent : par ce moyen les différentes parties de la terre se mêlent, & sont successivement exposées aux influences de l’air : les hersages, comme nous l’avons dit, ajoûtent à l’effet du labour, & en sont comme le complément. Voyez Herser.

Les campagnes offrent dans les différens pays un aspect différent, par les variétés introduites dans la maniere de mener les labours. Ici une plaine d’une vaste étendue vous présentera une surface unie, dont toutes les parties seront également couvertes de grains. Là vous rencontrerez des sillons relevés, dont les parties basses ne produisent que de la paille courte & des épis maigres. Ces variétés naissent de la nature & de la position du sol, & & il seroit dangereux de suivre à cet égard une autre méthode que celle qui est pratiquée dans le pays où on laboure. Si les sillons plats donnent une plus grande superficie, les sillons relevés sont nécessaires par-tout ou l’eau est sujette à séjourner : il faut alors perdre une partie du terrain pour conserver l’autre. Au reste, dans quelque terre que ce soit, si l’on veut qu’elle soit bien remuée, les différens labours doivent être croisés & pris par différens côtés. Voyez Jachere. Voyez aussi sur les détails du labour & du labourage, nos Planches & leurs explications à l’Economie rustique.

Labour (la terre de) Géog. en latin Laboriæ ; en italien terra di Lavoro, grande province d’Italie, au royaume de Naples, peuplée, fertile, & la premiere du royaume.

Elle est bornée au nord par l’Abruzze ultérieure & citérieure ; à l’orient par le comté de Molisse & par la principauté ultérieure ; au midi par la même principauté & par le golfe de Naples ; au couchant par la mer Tyrrhène & par la campagne de Rome.

Son étendue le long de la mer est d’environ 140