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trimoine de l’état, il est certain qu’ils sont la source d’un exemple ruineux pour la noblesse, & pour toutes les autres conditions.

En effet, tout luxe dans ce royaume procédant de cette cause, loin d’exciter l’émulation & l’industrie entre les citoyens, ne fait que les arracher aux autres professions qu’ils pourroient embrasser, & les corrompre perpétuellement. Il leur inspire une avidité d’autant plus funeste, qu’en devenant générale, elle se dérobe pour ainsi dire, à la honte. Les meilleures maisons ruinées par les efforts insensés qu’elles font, pour atteindre le faste des financiers, n’ont plus de ressources que dans des alliances honteuses avec eux, & très-dangereuses par le puissant crédit qu’elles portent dans ces sortes de familles. (D. J.)

JUSTICIEMENT, s. m. (Jurisprud.) terme usité en Normandie pour exprimer une exécution de justice. (A)

JUSTICIABLE, adject. (Jurisprud.) est celui qui est soumis à la jurisdiction d’un juge. Chacun en général est justiciable du juge de son domicile ; c’est pourquoi dans les anciennes reconnoissances concernant le droit de justice du seigneur, on voit que le reconnoissant confitetur se esse hominem levantem, & cubantem, & justiciabilem, &c. ce qui dénote que ce n’est pas le lieu où l’on passe la journée, mais le lieu où l’on couche qui rend justiciable du juge de ce lieu ; cependant en matiere de police chacun est justiciable du juge du lieu où il a commis quelque contravention aux réglemens de police, quand même il n’y auroit qu’une demeure de fait, & non un vrai domicile, & même quand il n’y seroit pas levant & couchant : en matiere criminelle, on est justiciable du juge du lieu où le délit a été commis. On peut aussi en matiere civile devenir justiciable d’un juge autre que celui du domicile, comme quand il s’agit d’une matiere attribuée à un certain juge ; ainsi pour raison d’une lettre de change, on devient justiciable des consuls ; en matiere des eaux & forêts, on est justiciable des juges des eaux & forêts, &c. On devient aussi justiciable d’un juge de privilege, lorsqu’on est assigné devant lui par un privilégié, c’est-à-dire qui a ses causes commises devant lui ; enfin on peut devenir justiciable d’un juge autre que son juge naturel, lorsqu’une affaire est évoquée pour cause de connexité ou litispendance. (A)

JUSTICIER, s. m. (Jurisprud.) est celui qui a droit de justice.

Haut-justicier, est le seigneur qui a le droit de haute justice, ou le juge qui l’exerce pour lui.

Moyen justicier, est celui qui a droit de moyenne justice.

Bas justicier ; est celui qui a droit de basse justice seulement. Voyez ci-devant Justice & Seigneur, haut, moyen & bas Justicier. (A)

Justicier, v. act. (Jurisprud.) en matiere criminelle signifie exécuter contre quelqu’un un jugement qui prononce une peine corporelle. (A)

Justicier d’Aragon, (Hist. d’Espagne.) c’étoit le chef, le président des états d’Aragon, depuis que ce royaume fut séparée de la Navarre en 1035, jusqu’en 1478 que Ferdinand V. roi de Castille, réunit toute l’Espagne en sa personne. Pendant cet intervalle de tems, les Aragonois avoient resserré l’autorité de leurs rois dans des limites étroites. Ces peuples se souviennent encore, dit M. de Voltaire, de l’inauguration de leurs souverains. Nos que valemo tanto como vos, os hazemos nuestro rey, y senor, con tal que guardeis nuestros sueros, se no, no. « Nous qui sommes autant que vous, nous vous faisons notre roi, à condition que vous garderez nos lois ; si non, non ». Le justicier d’Aragon prétendoit que « ce n’étoit pas une vaine cérémonie, & qu’il avoit

le droit d’accuser le roi devant les états, & de présider au jugement. Il est vrai néanmoins que l’Histoire ne rapporte aucun exemple qu’on ait usé de ce privilege ». (D. J.)

JUSTIFICATIF, adj. (Jurisprud.) est ce qui sert à la justification d’un accusé. Ce terme est principalement usité en parlant des faits justificatifs, à la preuve desquels un accusé peut être admis après la visite du procès. Voyez Faits justificatifs. (A)

JUSTIFICATION, s. f. (Théolog.) il se dit en termes de Théologie de cette grace qui rend l’homme digne de la gloire éternelle. Voyez Imputation. Les Catholiques & les Réformés sont extrémement partagés sur la doctrine de la justification ; les derniers la fondant sur la foi seule, & les premiers sur les bonnes œuvres jointes à la foi.

Justification, s. f (Jurisprud.) en matiere civile, signifie preuve pour la justification d’un fait, on produit des pieces, on fait entendre des témoins.

En matiere criminelle on entend par justification, ce qui tend à la décharge de l’accusé. Voyez Absolution & Faits justificatifs. (A)

Justification, Fondeur de caracteres d’Imprimerie ; c’est un petit instrument de cuivre ou de fer, de deux pouces environ de long, servant aux fondeurs de caracteres d’Imprimerie, pour s’assûrer si les lettres sont bien en ligne & de hauteur entr’elles. Pour cet effet on met dans cette justification deux m qui servent de modele ; & entre ces deux m en met la lettre que l’on veut vérifier, puis avec un autre instrument qu’on appelle jetton, on voit si les traits de la lettre du milieu n’excedent point ceux des m, & si elle est d’égale hauteur, Voyez nos Planch. de Fond. en caract.

On entend par justification vingt ou trente lettres qui sont destinées à servir de modeles pour apprêter une fonte ; on couche sur un composteur ces lettres sur l’aplat, qu’on appelle frotterie, puis on couche autant de lettres de la fonte que l’on travaille ; il faut que ces dernieres se trouvent justes au bout des autres, par ce moyen on est assûré que les nouvelles ont le corps égal à celles qui servent de modele. Voyez Corps.

Justification, en terme d’Imprimerie, s’entend de la longueur des lignes déterminée & soutenue dans une même & juste égalité, par le secours du composteur & des espaces de différentes épaisseurs. Voyez Composteur, Espaces & Justifier.

JUSTIFIER, v. act. (Gram.) il a plusieurs sens. Il signifie quelquefois prouver une vérité, comme dans cet exemple ; elle a bien justifié la maxime, qu’il est plus commun de n’avoir point eu d’amans que de n’en avoir eu qu’un. Absoudre, comme dans celui ci ; le tems & sa conduite le justifieront de cette accusation, & la calomnie retombera sur celui qui l’a faite. Mettre dans l’état de justice ; c’est par la mort de J. C. que nous sommes justifiés.

Justifier, v. act. (Fondeurs de caracteres d’Imprimerie.) se dit des matrices pour fondre les caracteres d’Imprimerie, après qu’elles ont été frappées, c’est de les limer proprement, non-seulement pour ôter les foulures qu’a fait le poinçon, en s’enfonçant dans le cuivre ; mais encore pour polir & dresser le cuivre de la matrice, de façon qu’en la posant dans le moule, elle y forme la lettre de ligne, d’approche, & de hauteur en papier. Voyez Approche, Hauteur.

Justifier, terme d’Imprimerie, c’est tenir les pages également hautes, & les lignes également longues entre elles. Pour justifier les pages, il ne faut pas qu’il y ait plus de lignes à l’une qu’à l’autre. Les lignes se justifient dans un composteur monté pour donner la longueur précise que l’on desire,