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diluculum, la pointe du jour ; & mane, le matin qui duroit jusqu’à midi. Après midi, étoit meridici inclinatio, que nous appellons vulgairement la relevée ; solis occasus, le coucher du soleil ; après cela étoient suprema tempestas, vesper, crepusculum, concubium, le tems où l’on se couche, & nox intempestas qui duroit jusqu’à minuit. On divisoit aussi la nuit en quatre parties que les Romains appelloient veilles, excubiæ ou vigiliæ. Voyez Nuit.

Parmi ces jours, il y en avoit qu’on appelloit festi, & d’autres prosesti ; ceux-là étoient consacrés aux dieux, soit pour faire des sacrifices, soit pour célebrer des jeux en leur honneur. Ces jours de fêtes s’appelloient feriæ ; il y en avoit de publiques & de particulieres. Voyez Fetes des Romains.

Les jours qu’on nommoit profesti, étoient ceux dans lesquels il étoit permis de vaquer aux affaires publiques & particulieres ; on les partageoit en jours fastes & néfastes ; les fastes étoient ceux où le préteur pouvoit prononcer ces trois mots, do, dico, addico, c’est-à-dire, les jours où il étoit permis de rendre la justice. Les jours néfastes étoient ceux où ils ne pouvoient l’exercer, comme dans les féries, & dans les tems de la vendange & de la moisson. Il y avoit aussi des jours appellés intercisi & endocisi, dans lesquels on pouvoit rendre la justice à certaines heures seulement. On les trouve marqués dans les fastes par ces lettres FP & NP, qui signifient fastus prior, & nefastus prior. Quelques-uns confondent mal-à-propos les jours néfastes avec ces jours où l’on se faisoit un scrupule de travailler, à cause de quelque malheur arrivé à pareil jour, comme celui de la bataille d’Allia. Il est cependant vrai qu’on a donné le nom de néfastes à ces jour malheureux.

Les Romains avoient encore d’autres jours qui avoient différens noms, comme ceux qu’on appelloit comitiales, pendant lesquels on tenoit les comices, & les jours de marché appellés nundinæ ou novendinæ, parce qu’ils revenoient tous les neuf jours. Les habitans de la campagne venoient à la ville ces jours de marché, pour y porter des denrées, pour y recevoir des lois, & même pour y travailler à leurs procès, depuis la loi hortensia ; car jusques-là ces jours avoient été néfastes.

Les jours qu’on nommoit præliares, étoient ceux où il étoit permis de répeter son bien, & d’attaquer ses adversaires ; les jours qui leur étoient opposés, s’appelloient non præliares : c’étoit, par exemple, les jours noirs & funestes, dies atri, qui arrivoient tous les lendemains des kalendes, des ides & des nones de chaque mois ; car le peuple s’imaginoit ridiculement qu’il y avoit quelque chose de funeste dans le mot post qui servoit à exprimer ce que nous appellons le lendemain. Ainsi tous les jours malheureux se nommoient chez les Romains, comme chez les Grecs, des jours noirs. Les jours heureux au contraire étoient appellés blancs chez ces deux peuples.

On ne pouvoit, dans ces jours malheureux, travailler publiquement à aucune affaire ; cependant on doit les distinguer des jours néfastes ; car les féries étoient des jours néfastes, & non des jours malheureux. Les jours appellés inominales, étoient tous les quatriemes jours avant les kalendes, les ides & les nones de chaque mois, & quelques féries.

On trouve dans le droit romain, des jours qu’on nomme comperendini, qui étoient ceux où l’on assignoit son adversaire à comparoître pour le surlendemain de la premiere audience ; d’autres appellés stati, qui étoient pour terminer ses affaires avec l’étranger, & d’autres enfin qui portoient le nom de justi, c’est-à-dire, trente jours complets, accordés par une loi des douze tables à celui qui avoit avoué son crime, ou à celui qui avoit été condamné, afin de lui donner la facilité de trouver la somme d’argent qu’il

étoit obligé de payer, ou de satisfaire de quelqu’autre maniere à la sentence du juge. (D. J.)

Jour, (Iconolog.) les anciens qui représentoient en figure tout ce qu’ils croyoient pouvoir en être susceptible, donnerent une image au jour considéré en lui-même, & sans aucun rapport ni à l’année, ni au mois, ni à la semaine, dont il fait partie. Athénée, dans sa description d’une magnifique pompe d’Anthiochus Epiphane, dit qu’on y voyoit des statues de toutes les sortes, jusqu’à celles du jour & de la nuit, de l’aurore & du midi.

Comme le nom grec du jour est féminin, le jour étoit peint en femme, & non-seulement le jour, mais aussi ses parties étoient aussi personnifiées suivant leur genre.

Le crépuscule,

Tempus,
Quod tu, nec tenebras nec possis dicere lucem,
Sed cum luce tamen, dubiæ confinia noctis,

le crépuscule, dis-je, étoit peint en jeune garçon, qui tenoit une torche, & qui avoit un grand voile étendu sur la tête, mais un peu reculé en arriere ; voilà ce qui désignoit que le crépuscule participoit à la lumiere & aux ténebres, au jour & à la nuit ; & c’est aussi ce que signifie la torche qu’il tenoit à la main ; car au point du jour, il fait un peu clair, mais si peu, qu’on a encore besoin d’un flambeau qui éclaire.

L’aurore aux doigts de rose, & croceo velamine fulgens, se peignoit en femme ayant un grand voile, & étant traînée dans un char à deux chevaux ; le voile qu’elle portoit sur sa tête, étoit fort reculé en arriere, ce qui marque que la clarté du jour est déja assez grande, & que l’obscurité de la nuit se dissipe.

Le midi, quùm medio sol aureus splendet olympo, étoit aussi peint en femme, à cause qu’il est du genre féminin dans la langue grecque.

Le soir ou le vesper, infuscans terras jam croceo noctis amictu, étoit peint en homme qui tenoit le voile sur sa tête, mais un peu en arriere, parce que l’obscurité de la nuit ne se répand qu’insensiblement, & laisse assez long-tems de la clarté pour se conduire encore.

Enfin le crépuscule du soir étoit représenté comme celui du matin, par un petit garçon qui porte un voile sur la tête ; mais il n’a point de flambeau ; il lui seroit inutile, puisqu’il va se perdre dans les ténebres de la nuit ; il tient de ses deux petites mains les rênes d’un des chevaux du char de Diane, prise pour la lune, & qui court se précipiter aussi dans les on les de l’Océan, hesperias abiturus in undas. Dict. Mythol. (D. J.)

Jour heureux & malheureux, (Litt. anc. & mod.) quelque ridicule que soit l’idée qu’il y ait dans la nature des jours plus heureux ou plus malheureux les uns que les autres, il n’en est pas moins vrai que de tems immémorial, les plus célebres nations du monde, les Chaldéens, les Egyptiens, les Grecs & les Romains, ont également donné dans cette opinion superstitieuse, dont tout l’Orient est encore convaincu.

Les rois d’Egypte, selon Plutarque, n’expédioient aucune affaire le troisieme jour de la semaine, & s’abstenoient ce jour-là de manger jusqu’à la nuit, parce que c’étoit le jour funeste de la naissance de Typhon. Ils tenoient aussi le dix-septieme jour pour infortuné, parce qu’Osiris étoit mort ce jour-là. Les Juifs pousserent si loin leur extravagance à cet égard, que Moyse mit leurs recherches au rang des divinations, dont Dieu leur défendoit la pratique.

Si je passe aux Grecs, je trouve chez eux la liste de leurs jours apophrades ou malheureux, ce qui a fait dire plaisamment à Lucien, en parlant d’un fâ-