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HIERE DE COLOQUINTE, (Pharmacie.) Voyez Coloquinte.

HIERES, (Géog.) en latin Olbia Areæ, ville de France en Provence, au diocese de Toulon : son terroir & les environs sont délicieux pour la bonté & la beauté des fruits ; mais son port qui lui seroit aujourd’hui d’une grande ressource, s’est comblé depuis long-tems, & la mer s’est retirée plus de deux mille pas ; cette ville est à 5 lieues de Toulon, 179. S. E. de Paris. Long. 23d. 48′. 11″. lat. 43d. 7′. 23″.

Massillon, dit M. de Voltaire, « né dans la ville d’Hieres en 1663, prêtre de l’Oratoire, évêque de Clermont, le prédicateur qui a le mieux connu le monde, plus fleuri que Bourdaloue, plus agréable, & dont l’éloquence sent l’homme de cour, l’académicien & l’homme d’esprit, de plus philosophe modéré & tolérant, mourut en 1742 ». Ses sermons & ses autres ouvrages qui consistent en Discours, Panégyriques, Oraisons funébres, Conférences ecclésiastiques, &c. ont été imprimés en quatorze volumes in-12. (D. J.)

Hieres les îles d’, (Géog.) insulæ Arearum, îles de France sur la côte de Provence ; il y en a trois, Porquerolles, Port-Croz, & l’île du Titan ; les Marseillois les ont habitées les premiers, ils les nommerent Stoechades. (D. J.)

HIÉROCERYCE, s. m. (Littér.) chef des héraults sacrés dans les mysteres de Cerès ; sa fonction étoit d’écarter les profanes, & toutes les personnes excluses de la fête par les loix ; d’avertir les initiés de ne prononcer que des paroles convenables à l’objet de la céremonie, ou de garder un silence respectueux ; enfin de réciter les formules de l’initiation.

L’hiéroceryce représentoit Mercure, ayant des aîles sur le bonnet, & la verge, le caducée à la main, en un mot tout l’appareil que les poëtes donnent à ce dieu.

Ce sacerdoce étoit perpétuel, mais il n’imposoit point la loi du célibat : on peut même fortement présumer le contraire par l’exemple du Dadouque ; ainsi, selon toute apparence, la loi du célibat ne regardoit que l’hiérophante seul, à cause de l’excellence de son ministere.

Au reste, la dignité d’hiéroceryce appartenoit à une même famille ; c’étoit à celle des Céryces descendue de Céryx, dernier fils d’Eumospe, & qui par conséquent étoit une branche des Eumolpides, quoique ceux qui la composoient donnassent Mercure pour pere à Céryx ; mais c’étoit sans doute parce que ce dieu protégeoit la fonction de héraut, héréditaire dans leur famille. (D. J.)

HIÉROCORACES, s. m. pl. (Antiq.) certains ministres de Mithras, c’est-à-dire du soleil, que les Perses adoroient sous ce nom. Le mot hiérocoraces signifie corbeaux sacrés, parce que les prêtres du soleil portoient des vêtemens qui avoient quelque rapport par leur couleur, ou d’une autre maniere, à ces oiseaux dont les Grecs en conséquence leur donnerent le nom. (D. J.)

HIÉROGLYPHE, s. m. (Arts antiq.) écriture en peinture ; c’est la premiere méthode qu’on a trouvée de peindre les idées par des figures. Cette invention imparfaite, défectueuse, propre aux siecles d’ignorance, étoit de même espece que celle des Méxiquains qui se sont servi de cet expédient, faute de connoître ce que nous nommons des lettres ou des caracteres.

Plusieurs anciens & presque tous les modernes ont cru que les prêtres d’Egypte inventerent les hiéroglyphes, afin de cacher au peuple les profonds secrets de leur science. Le P. Kircher en particulier a fait de cette erreur le fondement de son grand

théâtre hiéroglyphique, ouvrage dans lequel il n’a cessé de courir après l’ombre d’un songe. Tant s’en faut que les hiéroglyphes ayent été imaginés par les prêtres égyptiens dans des vues mystérieuses, qu’au contraire c’est la pure nécessité qui leur a donné naissance pour l’utilité publique ; M. Warburthon l’a démontré par des preuves évidentes, où l’érudition & la philosophie marchent d’un pas égal.

Les hiéroglyphes ont été d’usage chez toutes les nations pour conserver les pensées par des figures, & leur donner un être qui les transmît à la postérité. Un concours universel ne peut jamais être regardé comme une suite, soit de l’imitation, soit du hazard ou de quelque évenement imprévu. Il doit être sans doute considéré comme la voix uniforme de la nature, parlant aux conceptions grossieres des humains. Les Chinois dans l’orient, les Mexiquains dans l’occident, les Scythes dans le nord, les Indiens, les Phéniciens, les Ethiopiens, les Etruriens ont tous suivi la même maniere d’écrire, par peinture & par hiéroglyphes ; & les Egyptiens n’ont pas eû vraissemblablement une pratique différente des autres peuples.

En effet, ils employerent leurs hiéroglyhes à dévoiler nuement leurs loix, leurs réglemens, leurs usages, leur histoire, en un mot tout ce qui avoit du rapport aux matieres civiles. C’est ce qui paroît par les obélisques, par le témoignage de Proclus, & par le détail qu’en fait Tacite dans ses Annales, liv. II. ch. lx. au sujet du voyage de Germanicus en Egypte. C’est ce que prouve encore la fameuse inscription du temple de Minerve à Saïs, dont il est tant parlé dans l’antiquité. Un enfant, un vieillard, un faucon, un poisson, un cheval-marin, servoient à exprimer cette sentence morale : « Vous tous qui entrez dans le monde & qui en sortez, sachez que les dieux haïssent l’impudence ». Ce hiéroglyphe étoit dans le vestibule d’un temple public ; tout le monde le lisoit, & l’entendoit à merveille.

Il nous reste quelques monumens de ces premiers essais grossiers des caracteres égyptiens dans les hiéroglyphes d’Horapollo. Cet auteur nous dit entr’autres faits, que ce peuple peignoit les deux piés d’un homme dans l’eau, pour signifier un foulon, & une fumée qui s’élevoit dans les airs, pour désigner du feu.

Ainsi les besoins secondés de l’industrie imaginerent l’art de s’exprimer : ils prirent en main le crayon ou le ciseau, & traçant sur le bois ou les pierres des figures auxquelles furent attachées des significations particulieres, ils donnerent en quelque façon la vie à ce bois, à ces pierres, & parurent les avoir doués du don de la parole. La représentation d’un enfant, d’un vieillard, d’un animal, d’une plante, de la fumée ; celle d’un serpent replié en cercle, un œil, une main, quelque autre partie du corps, un instrument propre à la guerre ou aux arts, devinrent autant d’expressions, d’images, ou, si l’on veut, autant de mots qui, mis à la suite l’un de l’autre, formerent un discours suivi.

Bien-tôt les Egyptiens prodiguerent par-tout les hiéroglyphes : leurs colonnes, leurs obélisques, les murs de leurs temples, de leurs palais, & de leurs sépultures, en furent surchargés. S’ils érigeoient une statue à un homme illustre, des symboles tels que nous les avons indiqués, ou qui leur étoient analogues, taillés sur la statue même, en traçoient l’histoire. De semblables caracteres peints sur les momies, mettoient chaque famille en état de reconnoître le corps de ses ancêtres ; tant de monumens devinrent les dépositaires des connoissances des Egyptiens.

Ils employerent la méthode hiéroglyphique de deux façons, ou en mettant la partie pour le tout,