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nologues comptent 779 ans depuis la sortie de l’Egypte jusqu’à la fondation de Rome. Voy. Epoque. Chambers.

FONDEMENT, s. m. (Architect.) c’est la maçonnerie enfermée dans la terre jusqu’au rez-de-chaussée, qui doit être proportionnée à la charge du bâtiment qu’elle doit porter. Fonder, c’est construire de maçonnerie les fondations dans les ouvertures & les tranchées des terres. Voyez Fondation. (P)

Fondement, (le) Anatom. & Chirurg. c’est l’orifice de l’intestin rectum, par lequel se déchargent les excrémens hors du corps. On l’appelle en termes d’art anus, mot préférable dans une Encyclopédie à celui du discours ordinaire, quoiqu’on ait fait le renvoi de ce terme au mot fondement.

Le fondement donc, c’est-à-dire l’extrémité inférieure du rectum, est principalement formé par trois muscles considérables, qui sont le sphincter & les releveurs. Le sphincter est un anneau irrégulier de fibres charnues, qui embrasse l’extrémité du boyau. Voyez Sphincter de l’anus.

Les releveurs, un de chaque côté, naissent des os du bassin, pour se terminer en partie au sphincter & en partie à une ligne tendineuse, qui s’étend depuis la pointe du coccyx jusqu’à la partie postérieure & inférieure du rectum. Voyez Rectum & Releveurs de l’anus.

On voit des enfans qui viennent au monde sans ouverture au fondement, & sans aucun vestige de cette ouverture. Il y en a auxquels on reconnoît seulement l’endroit précis de l’anus qui se trouve clos. Il y en a d’autres dans lesquels on peut introduire un stilet plus ou moins avant, comme à deux, trois & quatre lignes, & même davantage ; & dans ceux-là, quoique leur anus paroisse très-bien formé, le vice de conformation se trouve plus ou moins avant dans l’intérieur.

Ces sertes de jeux de la nature sont si fréquens, qu’on en lit des exemples dans plusieurs livres de chirurgie & d’observations chirurgicales ; dans Hilden, par exemple, Roonhuysen, Saviard, Scultet, &c. & sur-tout dans les traités d’accouchemens, comme dans Mauriceau, Deventer, la Motte, &c.

On s’apperçoit aisément de ce défaut, lorsque les enfans ne rendent point leurs excrémens le lendemain du jour qu’ils sont nés. On peut encore s’en appercevoir plûtôt, lorsque les sages-femmes visitent cette partie, comme elles le devroient toûjours faire, après avoir nettoyé chaque enfant nouveau-né, pour voir si sa conformation est telle qu’elle doit être. La nature indique souvent par quelqu’éminence ou par quelque creux le lieu où doit être l’ouverture du fondement. Quelquefois néanmoins on n’apperçoit aucune marque semblable. Quelquefois la partie est couverte par une chair solide dont l’épaisseur varie, & d’autres fois par une membrane déliée.

Quelle que puisse être la cause de ce mal, si l’on n’a soin d’ouvrir promptement l’anus, il arrive que le trop long séjour du méconium cause à l’enfant des tranchées violentes, la jaunisse, des convulsions, l’épilepsie, un vomissement d’excrémens, & pareils accidens qui se terminent par la mort.

Lorsque le vestige du fondement est bien marqué, & qu’il n’est bouché que par une membrane mince, on découvre l’endroit où doit être l’ouverture par une espece de cicatrice, ou par la saillie que les excrémens font faire à cette membrane. Dans ce cas la guérison n’est pas difficile ; elle étoit connue d’Æginete aussi-bien que des modernes : il ne s’agit que d’inciser la membrane avec un bistouri, & de consolider la plaie.

On connoîtra que l’opération est bien faite à la sortie du méconium. Si la premiere ouverture n’est

pas assez grande, on l’augmentera par une nouvelle incision en longueur, en haut, en bas ou en-travers. On introduira dans la plaie une tente trempée dans quelqu’onguent vulnéraire, pour empêcher que l’anus ne se ferme de nouveau, en observant d’attacher cette tente avec un gros fil, afin que si elle venoit à glisser dans le rectum on puisse la retirer.

Quand le passage des excrémens est fermé par un morceau de chair ou par une membrane épaisse, on tâchera de découvrir le rectum, en le pressant avec le doigt ; & lorsqu’on l’aura trouvé, on percera l’anus en dirigeant la pointe de l’instrument du côté de l’os sacrum, pour ne pas courir le risque de blesser la vessie dans les garçons, ou le vagin dans les filles. Après avoir percé l’anus, on se conduira comme dans le cas précédent.

Dans la plûpart des autres cas, & même dans ce dernier, l’opération est très-difficile, & souvent malheureuse : elle requiert non-seulement de la sagacité jointe à la main d’un artiste qui ait fréquemment disséqué ces parties affligées de mauvaises conformations, parce que la pratique les lui montre toutes différentes que dans un sujet bien conformé : mais de plus elle exige, suivant l’occasion, de la variété dans la maniere d’opérer, & dans les instrumens à imaginer ou à perfectionner pour cette besogne.

Roonhuysen rapporte qu’une fille de quatre mois avoit l’orifice du fondement si étroit, que sa mere étoit obligée de lui tirer les excrémens de ses propres mains avec beaucoup de peine : l’anus étant enfin venu à s’enfler, à cause de la fréquente compression, le passage des excrémens se ferma tout-à-fait, ce qui obligea le chirurgien de percer l’anus avec une lancette, d’aggrandir l’incision de tous côtés avec des ciseaux, & finalement de guérir la plaie suivant la méthode prescrite. Scultet rapporte un exemple semblable.

On voit d’autres jeux de la nature encore plus rares sur cette partie, que ne sont ceux dont nous venons de parler. Il y a des enfans à qui le rectum se termine dans la vessie. Roonhuy sen en cite un exemple. M. Petit assûre avoir vû ce jeu de conformation plus d’une fois.

A d’autres enfans l’anus s’ouvre dans la vulve. M. de Jussieu raconte dans le recueil de l’acad. des Scienc. ann. 1719. l’histoire d’une fille de sept ans dont le fondement étoit fermé de naissance, & qui rendoit ses excrémens par le vagin.

A d’autres enfans l’anus sans être ouvert forme une tumeur en maniere d’hernie, & quelquefois un nœud semblable à celui de l’ombilic d’un adulte. M. Engerrand, chirurgien de S. Côme, a eu occasion de voir ces deux derniers cas.

Enfin quelquefois l’intestin rectum est fermé jusqu’au colon, ou jusqu’à la partie supérieure de l’os sacrum. Quelquefois même il manque tout-à-fait, en sorte que les intestins finissent avec la partie inférieure des lombes ou du sommet de l’os sacrum. Il faut renoncer alors à tout espoir de guérison. M. Jamisson, chirurgien écossois, appelle dans son pays pour secourir un enfant nouveau-né qui n’avoit aucun vestige d’anus, chercha sans succès l’intestin après son incision, & employa le trois-quarts inutilement : il ne sortit de la plaie que quelques gouttes de sang. A l’ouverture du cadavre M. Jamisson découvrit que le gros boyau manquoit totalement, & que le colon rempli de méconium étoit un vrai cœcum flottant dans la cavité du bas-ventre. Essais d’Edimbourg, tome IV. p. 557. M. Heister a vû le cas mentionné par Jamisson, & M. Petit a vû presque tous ceux dont nous avons parlé, comme il paroît par son mémoire sur cette matiere, inséré dans le recueil de l’académie de Chirurgie de Paris. J’y renvoye le lecteur.