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pouvoit être interrompu par qui que ce soit que par M. le premier président.

Il n’est pas d’usage que les juges interrompent la plaidoirie des gens du roi, quoique l’heure à laquelle l’audience finit ordinairement vienne à sonner ; mais il y a des exemples que dans de grandes affaires les gens du roi ont eux-mêmes partagé leur plaidoirie en plusieurs audiences.

Dans les affaires où le ministere public est appellant ou demandeur, l’avocat de l’intimé ou du défendeur a la replique sur les gens du roi : mais il est aussi d’usage que ceux-ci ont la replique en dernier.

On dit communément que les gens du roi sont solidaires, c’est-à-dire qu’ils agissent & parlent toûjours en nom collectif ; ils sont présumés se concerter entre eux pour les conclusions qu’ils doivent prendre.

Il y a néanmoins des exemples que dans la même affaire un des gens du roi n’a pas suivi les mêmes principes que son collegue, & s’est fait recevoir opposant à un arrêt rendu sur les conclusions des gens du roi. Le procureur général ou procureur du roi peut lui-même se faire recevoir opposant à un jugement rendu sur ses conclusions.

Le ministere des gens du roi est purement gratuit ; excepté que dans les affaires civiles appointées, & dans les affaires criminelles où il y a une partie civile, leurs substituts ont des épices pour les conclusions.

On n’adjuge jamais de dépens ni de dommages & intérêts aux gens du roi ; mais on ne les condamne aussi jamais à aucune amende, dépens, ni dommages & intérêts.

Les gens du roi de chaque siége ont un parquet ou chambre, dans lequel les avocats & procureurs vont leur communiquer les causes où ils doivent porter la parole : c’est aussi dans ce même lieu que l’on plaide devant eux les affaires qui doivent être vuidées par leur avis : les substituts y rapportent aussi au procureur général ou au procureur du roi, si c’est dans un siége inférieur, les affaires civiles & criminelles qui leur sont distribuées. V. Communication des gens du Roi, & Parquet des Gens du Roi. (A)

Gens de Mer, (Marine.) on donne ce nom à ceux qui s’appliquent à la navigation & au service des vaisseaux.

Gens de l’Équipage, (Marine.) voyez Équipage.

GENTES, s. f. pl. terme de Charron ; pour les grandes roues, ce sont six pieces de bois d’orme formant un cercle entier, & jointes ensemble par des fortes chevilles : chaque partie démontée forme un sixieme de cercle. Les petites roues sont à quatre ou à cinq gentes. Voyez la fig. 2. Pl. du Charron.

Gente de rond, terme de Charron, c’est une piece de bois composée de quatre gentes, & qui forme un rond qui est enchâssé sur la selette de l’avant-train. Voyez la fig. 1. Pl. du Charron.

GENTIANE, s. f. gentiana, (Hist. nat. bot.) genre de plante à fleur monopétale campaniforme, évasée ou tubulée & découpée. Le pistil sort du calice, traverse le fond de la fleur, & devient un fruit membraneux, ovoïde, & pointu, compose de deux panneaux & d’une capsule, & rempli de semences ordinairement plates, rondes, & entourées d’un limbe. Tournefort, inst. rei herb. Voyez Plante. (I)

Les Botanistes comptent plusieurs especes de gentiane, dont quelques-unes sont cultivées dans les jardins des curieux, entr’autres la gentianelle, qui en vaut bien la peine ; Bradley dit qu’elle est d’un si beau bleu, que l’outre-mer ne l’égale pas. On cultive aussi la grande gentiane jaune, gentiana major lutea de C. Bauh. Parkins. Tournef. Boerh. elle est employée des Medecins, & c’est celle qu’il nous suffira de décrire.

Ses racines sont longues, charnues, jaunâtres, un peu branchues, & fort ameres ; ses fleurs ressemblent à celles de l’hellébore blanc ; elles sont en grand nombre près de la racine, placées vis-à-vis les unes des autres le long de la tige, qu’elles embrassent en se réunissant par leur base ; elles ont trois ou cinq nervures, comme les feuilles de plantain ; elles sont unies, luisantes, ce qui les distingue des feuilles de l’hellébore blanc : ses tiges ont une à deux coudées, & quelquefois davantage ; elles sont simples, lisses, & portent des fleurs qui naissent par tas au nombre de huit ou de dix, disposées en maniere d’anneaux ; elles sont d’une seule piece, en forme de cloche, évasées, découpées en cinq quartiers, de couleur d’un jaune-pâle, garnies d’un pistil de même couleur, qui s’éleve du fond du calice à la hauteur d’un pouce, & perce la partie inférieure de la fleur : ce pistil devient ensuite un fruit membraneux, ovale, terminé en pointe, qui n’a qu’une loge : cette loge s’ouvre en deux panneaux, & est remplie de plusieurs graines rougeâtres, rondes, applaties, & bordées d’un feuillet membraneux.

Pline prétend que cette plante doit son nom à Gentius roi d’Illyrie. Elle vient dans les Pyrénées, dans les montagnes d’Auvergne, & sur-tout dans les Alpes. Haller en donne une charmante description poétique. « C’est ici, dit-il en parlant des Alpes, que la noble gentiane éleve sa tête altiere au-dessus de la foule rampante des plantes plébéïennes ; tout un peuple de fleurs se range sous son étendard ; l’or de ses fleurs est formé en rayons, il embrasse sa tige ; ses feuilles peintes d’un verd-foncé, brillent du feu d’un diamant humide ; la nature suit chez elle la plus juste des lois, elle unit la vertu avec la beauté ». Il est du-moins vrai, pour parler plus simplement, que sa racine est d’un très-grand usage. Voyez Gentiane, (Matiere méd.)

Je n’ajoûte qu’un mot sur la petite gentiane d’Amérique, à fleur bleue, gentianella americana, flore cæruleo, parce que l’artifice & la précaution de la nature pour la conservation de son espece, paroissent en elle évidemment. Il ne faut pas douter que les capsules ne soient les meilleures défenses qu’on puisse imaginer pour la conservation des graines ; car c’est dans cet étui qu’elles demeurent garanties des injures de l’air & de la terre, jusqu’à l’approche du tems le plus propre à les faire sortir. Alors aussi les graines mûres de cette plante sont répandues & semées en terre presqu’aussi exactement que le pourroit faire le plus habile semeur. Dès que la moindre humidité touche le bout de ces capsules, elles crevent avec force, sautent subitement, & par leur vertu élastique répandent les graines à une distance où elles rencontrent un lieu propre à les recevoir. C’est une observation faite par le chevalier Hans Sloane, pendant son séjour à la Jamaïque, sur les capsules de la gentiane de ces pays-là, & cette observation se trouve vérifiée par d’autres exemples semblables. (D. J.)

Gentiane, ou Grande-Gentiane, (Matiere médic.) La racine de gentiane est la seule partie de cette plante qui soit employée en Medecine ; elle est très-amere, & elle est fort employée à ce titre, comme stomachique & vermifuge. Voy. Stomachique & Vermifuge. Elle est recommandée contre les obstructions des visceres du bas-ventre, contre la jaunisse, & contre les fievres intermittentes. C’étoit un des fébrifuges que l’on employoit avec le plus de succès avant la découverte du quinquina ; elle passe pour résister aux poisons & à la peste même ; elle est célebre depuis long-tems contre la morsure des animaux venimeux : c’est une des vertus que lui donne Dioscoride. Elle a été recommandée aussi contre la morsure des chiens enragés ; on peut la donner en poudre depuis demi-gros jusqu’à deux. On n’em-