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Fuen : on fait dans son canton, avec du ritz & de la chair de bouc, un breuvage très-fort & très-nourrissant, que les Chinois nomment yangcieu, c’est-à-dire vin de bouc. Le P. Martini donne à Fuencheu 38d. 10′. de latit. longit. 128d. 27′. (D. J.)

FUESSEN, ou FUSSER, en latin Fucena, & par quelques-uns, Abudiacum, (Géog.) petite ville d’Allemagne dans l’évêché d’Augsbourg en Soüabe sur le Leck, à seize lieues S. O. d’Ausbourg. Voyez Zeyler, suev. topogr. Longit. 34d. 10′. latit. 47d. 15′. (D. J.)

* FUGALES, (Mythol.) fêtes des Romains, que quelques-uns confondent avec les régifuges. Voyez Régifuges. Si cela est, les fugales furent instituées en mémoire de l’expulsion des rois & de l’abolition du gouvernement monarchique ; & elles se célebrerent le 24 de Février, après les terminales. Voyez Terminales : mais cette opinion n’est pas reçûe généralement. D’autres font venir les fugales de la fuite que prenoit le rex sacrorum hors de la place publique & des comices, après qu’il avoit fait son sacrifice. S. Augustin, le seul auteur qui ait parlé de fugales, dit que les cérémonies en étoient contraires à la pudeur & à l’honnêteté des mœurs ; ce qui a fait penser à Vivès, que c’étoient les mêmes fêtes que les populi-fuges, qu’on célébroit à l’honneur de la déesse de la Réjoüissance, après quelque victoire remportée, & dont on fait remonter la premiere institution au tems de la défaite des Ficulnates, des Fidenates, & des peuples voisins, qui avoient tenté de s’emparer de Rome, après que le peuple s’en fut retiré. Cette entreprise est, à la vérité, la date de l’institution des populi-fuges ; mais la retraite du peuple révolté en fut la cause, comme il est évident à la lecture de Varron. Quoi qu’il en soit, la conjecture de Vivès, qui ne fait des fugales & des populi-fuges qu’une même institution, n’en est pas moins vraissemblable.

* FUGITIF, (Gramm.) qui s’enfuit, qui s’échappe ; il se prend adjectivement dans cette frase, des circonstances fugitives ; substantivement dans celle-ci, un fugitif. Il se dit aujourd’hui de tout homme qui s’est éloigné de sa patrie, où il n’étoit pas en sûreté, pour quelque cause que ce fût ; il se disoit anciennement d’un esclave qui s’enfuyoit. Si les fugitivains le ramenoient, son maître étoit autorisé par la loi, ou à le faire marquer d’un fer rouge, ou à l’enfermer dans la prison publique, ou à le condamner au moulin, ou à lui couper les muscles des jambes, ou même à lui ôter la vie. Voyez Esclave. Si l’on vendoit un esclave, & qu’il fût sujet à s’enfuir, il paroît par un endroit d’Horace, qu’on étoit obligé d’en avertir.

* FUGITIVES, (Pieces-) Littérat. on appelle pieces fugitives, tous ces petits ouvrages sérieux ou legers qui s’échappent de la plume & du porte-feuille d’un auteur, en différentes circonstances de sa vie, dont le public joüit d’abord en manuscrit, qui se perdent quelquefois, ou qui recueillis tantôt par l’avarice, tantôt par le bon goût, font ou l’honneur ou la honte de celui qui les a composés. Rien ne peint si bien la vie & le caractere d’un auteur, que ses pieces fugitives : c’est là que se montre l’homme triste ou gai, pesant ou leger, tendre ou sévere, sage ou libertin, méchant ou bon, heureux ou malheureux. On y voit quelquefois toutes ces nuances se succéder ; tant les circonstances qui nous inspirent sont diverses.

FULDE, Fulda, (Géog.) ville & abbaye célebre d’Allemagne érigée en évêché depuis peu d’années, au cercle du haut Rhin, sur une riviere de même nom. L’évêque abbé de Fulde est le dernier des princes évêques d’Allemagne, mais le premier des princes abbés de l’Empire ; il porte le titre d’archi-chancelier de l’impératrice : comme abbé, il relevoit immédiatement du S. Siége. L’abbaye de Fulde est très-

riche ; elle fut fondée par S. Boniface, apôtre de l’Allemagne & archevêque de Mayence ; elle est de l’ordre de S. Benoît. Il faut faire preuve de noblesse pour être admis dans cette maison d’humilité ; & les moines, devenus chanoines aujourd’hui, élisent un d’entre eux pour remplir la place d’évêque-abbé, lorsqu’elle est vacante. Long. 27. 28. latit. 50. 40.

FUGUE, s. f. en Musique, est un chant répété successivement & alternativement par deux ou plusieurs parties, selon certaines regles particulieres qui distinguent la fugue de l’imitation, & dont voici les principales.

I. La fugue procede de la dominante à la tonique, ou de la tonique à la dominante, en montant ou en descendant.

II. Toute fugue a sa réponse dans la partie qui la suit immédiatement, & qui doit en rendre le chant à la quinte ou à la quarte, & par mouvement semblable, le plus exactement qu’il est possible ; procédant de la dominante à la tonique, quand le premier chant a procédé de la tonique à la dominante, ou vice versà. Une partie peut aussi reprendre ce même chant après l’autre, à l’octave ou à l’unisson : mais alors c’est plûtôt répétition qu’une véritable réponse.

III. Comme l’octave se divise en deux parties inégales, dont l’une comprend quatre degrés en montant de la tonique à la dominante, & l’autre seulement trois, en continuant de monter de la dominante à la tonique ; cela oblige d’avoir égard à cette différence, & de faire quelque changement dans la réponse, pour ne pas quitter les cordes essentielles du mode : c’est autre chose, quand on se propose de changer de ton.

IV. Il faut que la fugue soit dessinée de telle sorte, que la réponse puisse entrer avant la fin du premier chant. C’est se mocquer, que de donner pour fugue un chant qu’on ne fait que promener d’une partie à l’autre, sans autre gêne que de l’accompagner ensuite à sa volonté : cela mérite tout-au-plus le nom d’imitation. Voyez Imitation.

Outre ces regles d’harmonie, qui sont fondamentales, pour réussir dans ce genre de composition, il y en a d’autres qui pour n’être que de goût, n’en sont pas moins essentielles. Les fugues en général servent plus à faire du bruit qu’à produire de beaux chants : c’est pourquoi elles conviennent mieux dans les chœurs que par-tout ailleurs. Or comme leur principal mérite est de fixer toûjours l’auditeur sur le chant principal, qu’on fait passer pour cela incessamment de partie en partie & de modulation en modulation ; le compositeur doit mettre tous ses soins à rendre toujours ce chant bien distinct, & à empêcher qu’il ne soit étouffé ou confondu parmi les autres parties : il y a pour cela deux moyens ; l’un est dans le mouvement qu’il faut sans cesse contraster ; de sorte que si la marche de la fugue est précipitée, les autres parties procedent posément par des notes longues ; & au contraire, si la fugue marche gravement, que les accompagnemens travaillent davantage. Le second moyen est d’écarter l’harmonie, de peur que les autres parties s’approchant trop de celle qui chante la fugue, ne se confondent avec elle, & ne l’empêchent de se faire entendre assez nettement ; ensorte que ce qui seroit un vice par-tout ailleurs, devient ici une beauté. Les habiles maîtres ont encore soin, pour la même raison, de mettre en jeu des instrumens ou des voix d’especes différentes, afin que chaque partie se distingue mieux. En un mot, dans toute fugue, la confusion est en même tems ce qu’il y a de plus à craindre & de plus difficile à éviter ; & l’on peut dire qu’une belle fugue bien traitée est le chef-d’œuvre du meilleur harmoniste.

Il y a encore plusieurs autres manieres de fugues,