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vent changer les premieres jumens mises dans cette prairie. Voyez Préage. (A)

* FAULX, s. m. pl. Les anciens en avoient de toute espece ; les unes s’appelloient arboraria, & servoient à émonder les arbres ; les autres lumariæ, & c’étoit avec celles-ci qu’on sarcloit les chardons & les buissons dans les champs ; ou rustariæ, avec lesquelles on défrichoit ; ou serpiculæ, & c’étoit la serpette du vigneron ; ou stramentariæ, qu’on employoit après la moisson à couper le chaume ; ou vinitoriæ, avec lesquelles on tailloit la vigne, ou l’on détachoit du saule & de l’osier ses branches ; ou murales, & c’étoit un instrument de guerre composé d’une longue poutre, armée à son extrémité d’un crochet de fer qu’on fichoit au haut des murailles pour les renverser. On se défendoit de cette machine avec des cordes dans lesquelles on cherchoit à embarrasser le crochet, pour les enlever ensuite à l’ennemi. Il y avoit les falces navales ; c’étoient de longues faulx qui avoient pour manches des perches, & dont on se servoit sur les vaisseaux pour couper les cordages des bâtimens ennemis. Nous n’employons pour nous d’autre faulx que celle qui nous sert dans la récolte des foins : ce sont les Taillandiers qui la fabriquent. Elle est assez longue, un peu recourbée du côté du tranchant, & emmanchée d’un long bâton. Le faucheur la meut horisontalement, & tranche l’herbe par le pié. Cet instrument d’agriculture ne se fait pas autrement que la plûpart des autres outils tranchans ; il faut que l’acier en soit bon, & la trempe saine : elle se commence à la forge & au marteau, & s’acheve à la lime & à la grande meule. Voyez l’article suivant.

* Faulx, s. f. (Taillanderie & Economie rustique.) instrument tranchant qui sert à couper les foins & les avoines, mais monté différemment pour ces deux ouvrages. La faulx à foin est montée sur un bâton d’environ cinq piés de long, avec une main vers le milieu. La faulx à avoine a une armure de bois. On lui a pratiqué quatre grandes dents de la longueur de la faulx, pour recevoir l’avoine fauchée, & empêcher qu’elle ne s’égrene.

Elles sont l’une & l’autre arcuées par le bout, larges du côté du coüard, & en bec de corbin par la pointe.

On distingue l’arrête, qui est la partie opposée au tranchant, qui sert à fortifier la faulx sur toute sa longueur ; & le coüard, qui est la partie la plus large de la faulx, où il sert à la monter sur son manche, par le moyen d’un talon qui empêche le coüard de sortir de la douille, où il est reçû & arrêté par un coin de bois. On voit dans nos Planches le détail du travail de la faulx par le taillandier ; une faulx enlevée ; une faulx dont le tranchant est fait, & qui est prête à être tournée, c’est-à-dire où l’on va former l’arrête, une faulx qu’on a commence à tourner, une faulx tournée ; le talon du coüard ; ce talon tourné ; une faulx vûe en-dedans, une autre vûe en-dessus. Voyez nos Planches de Taillanderie, & leur explication.

Faulx, (Anat.) processus de la dure-mere, qui prend son origine du crista galli de l’os ethmoïde, se recourbe en-arriere, passe entre les deux hémispheres du cerveau, & se termine au torcular Herophili, ou au concours des quatre grands sinus de la dure-mere. Voyez Dure-mere, Cerveau. Cette faulx, ainsi dite à cause de sa courbure, manque dans plusieurs animaux. Voyez Ridley dans son anatomie du cerveau, pag. 9. (g)

Faulx, (Astronom.) est un des phases des planetes, qu’on appelle communément croissant. Voyez Phase, Croissant, & Cornes.

Les Astronomes disent que la Lune, ou toute autre planete, est en faulx, falcata, quand la partie éclairée paroît en forme de faucille ou de faulx, que les Latins appellent falx.

La Lune est en cet état depuis la conjonction jusqu’à la quadrature, ou depuis la nouvelle Lune jusqu’à ce qu’on en voye la moitié, & depuis la quadrature jusqu’à la nouvelle Lune ; avec cette différence, que depuis la nouvelle Lune jusqu’à la quadrature, le ventre ou le dos de la faulx regarde le couchant, & que depuis la quadrature jusqu’à la nouvelle Lune, le ventre regarde le levant. (O)

FAUNA, (Myth.) la même que la bonne-déesse. Voyez Bonne-déesse. Elle est représentée sur les médailles comme le dieu Faune, à l’exception de la barbe, & elle a été mise par les Romains au nombre de leurs divinités tutelaires.

FAUNALES, s. f. (Littér.) en latin faunalia, fêtes de campagne que tous les villages en joie célébroient dans les prairies deux fois l’année en l’honneur du dieu Faune. Ses autels avoient acquis de la célébrité, même dès le tems d’Evandre ; on y brûloit de l’encens, on y répandoit des libations de vin, on y immoloit ordinairement pour victimes la brebis & le chevreau.

Faune étoit de ces dieux qui passoient l’hyver en un lieu, & l’été dans un autre. Les Romains croyoient qu’il venoit d’Arcadie en Italie au commencement de Février, & en conséquence on le fêtoit le 11, le 13 & le 15 de ce mois dans l’ile du Tibre. Comme on tiroit alors les troupeaux des étables, où ils avoient été enfermés pendant l’hyver, on faisoit des sacrifices à ce dieu nouvellement débarqué, pour l’intéresser à leur conservation ; & comme on pensoit qu’il s’en retournoit au 5 de Décembre, ou, suivant Struvius, le 9 de Novembre, on lui répetoit les mêmes sacrifices, pour obtenir la continuation de sa bienveillance. Les troupeaux avoient dans cette saison plus besoin que jamais de la faveur du dieu, à cause de l’approche de l’hyver, qui est toûjours fort à craindre pour le bétail né dans l’autonne. D’ailleurs, toutes les fois qu’un dieu quittoit une terre, une ville, une maison, c’étoit une coûtume de le prier de ne point laisser de marques de sa colere ou de sa haine dans les lieux qu’il abandonnoit. Voyez comme Horace se prête à toutes ces sottises populaires :

Faune, nympharum fugientum amator
Per meos fines, & aptica rura
Lenis incedas, abeasque parvis
Æquus alumnis.

« Faune, dont la tendresse cause les alarmes des timides nymphes, je vous demande la grace que vous passiez par mes terres avec un esprit de douceur, & que vous ne les quittiez point sans répandre vos bienfaits sur mes troupeaux ». C’est le commencement de l’hymne si connue au dieu Faune, qui contient les prieres du poëte, les bienfaits du dieu, & les réjoüissances du village. Rien de plus délicat que cette ode, de l’aveu des gens de goût (O de xxiij. liv. III.) : le dessein en est bien conduit, l’expression pure & legere, la versification coulante, les pensées naturelles, les images riantes & champêtres. Article de M. le Chavalier de Jaucourt.

FAUNE, s. m. Les faunes étoient, dans l’ancienne Mythologie, des divinités des forêts, qui, suivant l’opinion générale, ne different point des satyres. Voyez Satyres.

On a prétendu que les faunes étoient des demi-dieux, connus seulement des Romains ; mais ils sont évidemment les Panes des Grecs, comme Saumaise l’a prouvé après Turnebe : ainsi l’on peut dire que leur culte est un des plus anciens & des plus répandus, & il paroît certain qu’il faut en chercher l’origine dans l’Egypte. L’incertitude attachée à cette recherche, ne doit pas en détourner un philosophe homme de Lettres. Si les diverses opinions des cri-