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renverser la démonstration précédente, que quelque valeur qu’on donnât à x, on eût toûjours cette derniere équation, x marquant ici une quantité générale & indéterminée : or cela est impossible. En effet, si cela étoit, supposons , on auroit donc, à cause de l’égalité supposée, , c’est-à-dire  ; ce qui ne se peut, puisque c & e sont différentes de a & de b. De-là on tire une autre démonstration de la proposition dont il s’agit, & qu’on peut appliquer aux degrés plus composés ; par exemple, si pouvoit être égal à , on auroit , ce qui ne se peut ; & ainsi du reste.

Je passe un grand nombre de propositions qu’on trouvera suffisamment démontrées par-tout, par exemple celles qui sont indiquées au mot Coefficient : c’est principalement à des choses nouvelles, ou du moins présentées d’une maniere nouvelle & rigoureuse, que je destine cet article. J’observerai seulement que les propositions connues sur les coefficiens des équations, servent quelquefois à démontrer d’une maniere simple & élégante des propositions de Géométrie ; M. de l’Hopital, dans le liv. X. de ses sections coniques, s’en est heureusement servi pour démontrer certaines propriétés des cordes du cercle.

Si une des racines de l’équation est un nombre entier a, positif ou négatif, ce nombre a sera un des diviseurs du dernier terme r ; car on a , donc , donc . Or le premier membre de cette équation est un entier, puisqu’il est composé d’entiers ; donc est un entier, donc a est un des diviseurs de r. La démonstration ordinaire de cette proposition me paroît sujette à difficulté ; c’est par cette raison que j’en ai substitué une autre.

Si toutes les racines d’une équation sont réelles, & que tous les termes de l’équation ayent le signe +, toutes ces racines seront négatives ; car, puisque tous les termes ont le signe +, il est évident qu’il ne peut y avoir de quantité positive, qui étant substituée à la place de x, rende l’équation égale à zéro.

Dans une équation, les racines imaginaires vont toûjours deux à deux ; ensorte que si est racine d’une équation, en sera une autre. J’ai démontré le premier cette proposition dans les mém. de l’acad. de Berlin 1746. Voyez aussi l’ouvrage de M. de Bougainville déjà cité, & l’art. Imaginaire.

Donc puisque les racines imaginaires sont toûjours en nombre pair, il s’ensuit que dans les équations d’un degré impair il y a du moins une racine réelle ; ce qu’on peut encore démontrer en cette sorte. Soit, par exemple, , en donnant à x toutes les valeurs positives possibles depuis 0 jusqu’à l’infini, on a toûjours un résultat réel, & ce résultat devient infini & positif quand , c’est-à-dire  ; de même en donnant à x toutes les valeurs négatives possibles depuis 0 jusqu’à l’infini, on aura toûjours un résultat réel, & le dernier résultat est infini & négatif quand , c’est-à-dire  ; donc puisqu’on a une suite de résultats tous réels & sans interruption, dont les deux extrèmes sont de différens signes, il s’ensuit qu’il y a un de ces résultats égal à zéro. Donc il y a une valeur réelle de x qui rend . Donc x a au moins une valeur réelle dans cette équation. Il en est de même des autres cas.

Dans une équation délivrée de fractions, & dont le premier terme n’a d’autre coefficient que l’unité, la racine ne sauroit être une fraction , dont le dé-

nominateur & le numérateur soient des nombres entiers & rationnels. Voilà encore une proposition bien mal prouvée dans presque tous les auteurs. En voici une meilleure démonstration. Soit  ; & supposons que soit racine de l’équation, on aura donc , & . Donc, suivant la théorie des équations donnée ci-dessus, le nombre entier a doit être diviseur du dernier terme  ; or comme a & b n’ont aucun diviseur commun, car la fraction est supposée, comme de raison, réduite à ses moindres termes (Voy. Diviseur, Fraction, & l’addition à l’article Diviseur dans l’errata de ce volume), il s’ensuit que a & b3 n’ont aucun diviseur commun : donc a doit être diviseur de r ; donc r=na, n étant un nombre entier. Donc on aura  ; donc . Donc, par la même raison que ci-dessus, a doit être un diviseur du dernier terme , & par conséquent de  ; donc  ; donc  ; donc  ; donc . Donc n’étoit point une fraction, ce qui est contre l’hypothese. On démontrera de la même maniere dans tous les autres cas, la proposition dont il s’agit. Donc, &c.

Il est évident, par la nature de cette démonstration, qu’elle ne s’étend qu’aux fractions rationnelles. Une équation sans fractions & sans radicaux peut en effet avoir pour racines des fractions irrationnelles ; par exemple, , & une infinité d’autres.

Voyez au mot Transformation, ce qui regarde la maniere de transformer une équation en une autre, matiere qui n’a d’ailleurs aucune difficulté, & qui est assez bien traitée dans presque tous les Algébristes ; par exemple, dans l’Analyse démontré du P. Reyneau, &c.

On trouvera au mot Racine, le fameux théorème de Descartes sur les racines des équations, démontré par M. l’abbé de Gua dans les mém. de l’acad. de 1741, auxquels le lecteur peut avoir recours. Nous nous bornerons ici à quelques réflexions générales sur les racines des équations.

Les racines d’une équation sont les différentes valeurs de l’inconnue ; il semble donc qu’un problème doive avoir autant de solutions qu’une équation a de racines ; & cela est vrai en effet dans un certain sens, mais ceci a pourtant besoin d’une plus ample explication.

1°. Si on proposoit de trouver un nombre x, tel que le quarré de ce nombre plus 15 fût égal à 8 fois le nombre cherché, c’est-à-dire tel que fût =0, on trouveroit que cette équation auroit deux racines réelles & positives x=3, x=5 ; & en effet, le quarré de 3 qui est 9 augmenté de 15, donne 24 égal à 8 fois 3 ; & le quarré 25, augmenté de 15, donne 40, égal à 8 fois 5. Ainsi les deux racines de l’équation satisfont en ce cas au problème, sans rien changer à son énoncé. Il y a donc des cas où toutes les racines d’une équation résolvent chacune le problème dans le sens le plus direct & le plus immédiat que son énoncé présente.

2°. Si on proposoit de trouver un nombre x plus petit que 1, & tel que le quarré de fût égal à , on auroit , &  ; donc & . Voilà deux racines réelles & positives, cependant il n’y a proprement que la racine qui satisfasse au problème, car la racine donne , quantité négative. Or l’on suppose dans l’énoncé que x est plus petit que 1 ; pourquoi donc trouve-t-on une autre racine réelle & po-