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le tiers ; le 22 on en vit moins : mais quoiqu’il fît moins chaud que les jours précédens, & qu’il tombât de la pluie, elles parurent à la même heure. Les quatre ou cinq jours suivans il en vint encore, mais leur nombre diminuoit de jour en jour : les premieres s’étoient montrées chaque jour entre huit heures & un quart & huit heures & demie. En 1739, les éphémeres vinrent dès le 6 Août ; mais elles ne parurent que vers les neuf heures & demie, ou les neuf heures trois quarts. Il y en eut beaucoup moins cette année que la précédente. Les Pêcheurs regardent les éphémeres comme une manne qui sert de nourriture aux poissons, & ils prétendent que cette manne ne tombe que pendant trois jours. En effet, ces insectes ne paroissent que pendant trois jours en grande abondance. La plûpart se noyerent dans la riviere, & les autres resterent sur les bords presque sans mouvement, entassées les unes sur les autres, & moururent bientôt ; à peine s’en trouva-t-il qui vécussent jusqu’au lever du soleil. Elles avoient plus de deux pouces de longueur, en y comprenant les filets de la queue. Les ailes étoient blanches lorsqu’elles ne se touchoient pas, & d’un blanc-sale ou rougeâtre lorsqu’elles étoient appliquées l’une sur l’autre. Les mâles ont un des filets de la queue plus court que les deux autres.

Dès que les femelles ont quitté leur dépouille, elles sont prêtes à pondre ; après avoir pris leur vol, elles déposent leurs œufs dans le premier endroit où elles se trouvent en tombant, ou en se posant soit sur la surface de l’eau, soit sur la terre. La ponte est faite en un moment, quoique le nombre des œufs soit très-grand. Ils étoient arrangés dans chaque femelle de façon qu’ils formoient deux grappes composées de grains qui se touchoient ; la longueur de chacune étoit de trois lignes & demie ou quatre lignes, & le diametre d’environ une demi-ligne ou une ligne : il y avoit sept ou huit cents œufs dans les deux grappes. L’éphémere vole à fleur d’eau, & s’appuie sur l’eau par le moyen des filets de la queue ; lorsqu’elle pond, les grappes sortent de l’insecte toutes les deux à-la-fois, & tombent au fond de l’eau qui les dissout, de façon que les œufs se séparent & se dispersent sur le fond de la riviere. On ne sait pas combien de tems ils y restent avant que les vers en sortent : on ne sait pas bien non plus si les éphémeres s’accouplent, ou si le mâle féconde les œufs après la ponte. Mém. pour servir à l’histoire des Insectes, tome VI. Voy. Insecte. (I)

Éphemere, adj. (Medecine.) ce terme est grec, ἐφήμερος, composé de la préposition ἐπί, dans, & ἡμέρα, jour ; ainsi il est employé pour signifier ce qui se passe dans un jour, dans l’espace de 24 heures ; c’est aussi l’étymologie du mot éphémeride, qui a la même signification, & qui est quelquefois employé en Medecine au lieu de calendrier. Voyez Ephémérides.

Éphémere est une épithete que les Medecins donnent à une sorte de fievre, qui fait son cours dans l’espace d’un jour ; c’est celle que Galien appelle ἐφήμερος πυρετὸς, & les Latins febris diaria : quelques-uns ont improprement étendu la signification de fievre éphemere à celle dont le cours est prolongé jusqu’au troisieme jour inclusivement, qu’il est plus convenable de ranger simplement parmi les fievres continues non putrides. Voyez Fievre putride.

La fievre éphemere doit aussi être regardée comme continue, puisqu’il est de son caractere que l’agitation fébrile qui la constitue, étant commencée, ne cesse pas que la maladie ne soit terminée ; ensorte que dans l’espace de tems qu’elle dure, elle parcourt les quatre degrés que l’on observe dans toute sorte de fievre ; savoir, le principe, l’accroissement, l’état, la déclinaison : mais celle-ci n’est pas une maladie aiguë, parce qu’elle n’est pas accompagnée

d’un grand changement, soit dans les parties solides, soit dans les fluides, & qu’elle ne produit pas par conséquent un grand dérangement dans les fonctions ; ainsi la fievre éphemere proprement dite est distinguée de la suete ou sueur angloise, qui est le nom que l’on donne à une sorte de fievre qui a regné en Angleterre à différentes reprises, pendant les deux derniers siecles, dont le principal symptome étoit une sueur si abondante, qu’elle faisoit périr la plûpart de ceux qui en étoient attaqués en moins d’un jour, & quelquefois en peu d’heures ; celle-ci est de l’espece des fievres malignes très-aiguës : si on lui donne le nom d’éphémere, on doit lui joindre l’épithete de pestilentielle (voyez Suete ou Sueur angloise, Fievre maligne, Peste). La fievre éphémere differe de toute autre fievre continue, par le peu de trouble qu’elle cause dans l’économie animale, & par sa courte durée : le défaut de retour la distingue des fievres intermittentes.

Elle est le plus souvent causée par quelqu’abus des choses qu’on appelle dans les écoles non-naturelles, comme lorsque la personne qui en est affectée s’est exposée à l’ardeur du soleil, ou a fait un exercice violent, ou a trop bû ou trop mangé, ou qu’elle a fait des veilles excessives, ou s’est livrée à un trop grand travail d’esprit, à quelqu’accès de colere, &c. Quelqu’une de ces causes étant récentes & n’ayant pas vicié notablement la masse des humeurs, & n’y ayant produit qu’un épaississement, ou une raréfaction, ou une constriction des vaisseaux peu considérables ; le sang trouvant conséquemment un peu de résistance à parcourir les extrémités artérielles, il s’excite par la cause générale, qui détermine toutes les fievres de quelqu’espece qu’elles soient, un mouvement fébrile, qui tend à faire cesser l’obstacle, à détruire le vice dominant ; & attendu qu’il n’est pas de nature à résister beaucoup, il cede bien-tôt, & la fievre se termine.

Cette fievre éphémere n’est point précédée par le dégoût des alimens, ni par la lassitude spontanée, ni par aucun frisson ou tout autre avant-coureur des fievres de toute espece ; elle survient presque subitement sans aucun fâcheux symptome, &c. il ne se fait aucun changement dans les urines, & elle finit souvent sans aucune évacuation sensible, & quelquefois par de fortes moiteurs ou des sueurs legeres sans mauvaise odeur, ou par quelque douce évacuation, par le vomissement ou par la voie des selles ; tel est le caractere constant de cette fievre : cependant il n’est pas facile de la connoître dans son principe, & de s’assûrer qu’elle n’est qu’éphémere, parce qu’il arrive souvent que les fievres continues simples de plusieurs jours, & même les putrides, commencent de la même maniere & ne se montrent qu’imparfaitement, attendu que la matiere morbifique est d’abord trop tenace, ne se développe dans les premieres voies ou dans le sang que peu-à-peu, & n’occasionne quelquefois, qu’après quelques jours, les symptomes qui caractérisent la maladie ; par conséquent les fievres de cette espece en imposent souvent dans leur commencement, & paroissent être ou une fievre éphémere, ou une fievre continue simple. On est cependant fondé à regarder une fievre commençante, comme étant de l’espece de ces dernieres, lorsqu’elle est produite dans une personne qui étoit bien saine auparavant, par une cause legere ; lorsque les symptomes n’ont rien de violent, & que les évacuations critiques, s’il s’en fait de sensibles, suivent de près ; & enfin lorsque le pouls redevient naturel & absolument tranquille d’abord après la fin de la fievre : toutes ces conditions étant réunies, on ne risque guere de se tromper dans le jugement que l’on porte sur la nature de la maladie.

La fievre éphémere, telle qu’elle vient d’être dé-