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tres enfin naissent du fait d’autrui ; tels que les engagemens des peres par rapport aux délits & quasi-délits de leurs enfans ; & ceux des maîtres, par rapport aux délits & quasi-délits de leurs esclaves ou domestiques ; & les engagemens dont peuvent être tenus ceux dont un tiers a géré les affaires à leur insû.

Tous ces différens engagemens sont volontaires, ou involontaires : les premiers sont ceux qui résultent d’une convention expresse, ou tacite : les autres sont ceux qui naissent d’un délit ou quasi-délit, d’un cas fortuit.

Enfin, toutes sortes d’engagemens sont simples ou réciproques : les premiers n’obligent que d’un côté : les autres sont synallagmatiques, c’est-à-dire obligatoires des deux côtés. Voyez Contrat & Obligation ; voyez aussi l’auteur des lois civiles, en son traité des lois, chap. ij. & suiv. & liv. II. de la prem. partie. (A)

Engagement d’un Bien : ce terme pris dans le sens le plus étendu, peut s’appliquer à tout acte par lequel on oblige un bien envers une autre personne, comme à titre de gage ou d’hypotheque. Voyez Gage & Hypotheque.

Ce même terme engagement signifie aussi l’acte par lequel on en cede à quelqu’un la joüissance pour un tems.

Il y a deux sortes d’engagemens pour les biens.

Les uns sont faits par le débiteur au profit du créancier, pour sûreté de sa créance ; & ces engagemens se font en deux manieres différentes ; savoir, par forme d’antichrèse, ou par forme de contrat pignoratif. Voyez Antichrèse & Contrat pignoratif.

L’autre sorte d’engagement est celle qui contient une espece d’aliénation faite sous la condition expresse ou tacite, que l’ancien propriétaire pourra exercer la faculté de rachat, soit pendant un certain tems, ou même à perpétuité.

Les ventes à faculté de rémeré, & les baux emphytéotiques, ne sont proprement que des engagemens.

Mais dans l’usage, on ne donne guere ce nom qu’aux antichrèses, contrats pignoratifs, & aux aliénations que le roi fait en certains cas de quelques portions du domaine de la couronne. Voyez Engagement du domaine. (A)

Engagement du Domaine de la Couronne, est un contrat par lequel le roi cede à quelqu’un un immeuble dépendant de sen domaine, sous la faculté de pouvoir lui & ses successeurs, le racheter à perpétuité toutes fois & quantes que bon leur semblera.

L’étymologie du mot engagement vient de gage, & de ce que l’on a comparé ces sortes de contrats aux engagemens ou antichrèses, que le débiteur fait au profit de son créancier.

Il y a néanmoins cette différence entre l’engagement ou antichrèse que fait un débiteur, & l’engagement du domaine du roi, que le premier, dans les pays où il est permis, ne peut être fait qu’au profit du créancier, lequel ne gagne pas les fruits ; ils doivent être imputés sur le principal, l’engagement n’étant à son égard qu’une simple sûreté : au lieu que l’engagement du domaine du roi peut être fait tant à prix d’argent, que pour plusieurs autres causes ; & l’engagiste gagne les fruits jusqu’au rachat, sans les imputer sur le prix du rachat, au cas qu’il lui en soit dû.

Le domaine de la couronne, soit ancien ou nouveau, grand ou petit, est inaliénable de sa nature ; c’est pourquoi les actes par lesquels le roi cede à quelqu’un une portion de son domaine, ne sont considérés que comme des engagemens avec faculté de rachat.

Ce grand principe a été long-tems ignoré : les engagemens du domaine proprement dit étoient cependant déjà connus dès l’an 1311, comme il paroît par une ordonnance de Philippe-le-Bel ; mais on admettoit aussi alors plusieurs autres manieres d’aliéner le domaine ; savoir, la concession à titre d’apanage, l’assiete des terres pour les dots & doüaires des reines & filles de France, & l’inféodation qui étoit alors différente de l’engagement.

Présentement les apanages ne passent plus, comme autrefois, à tous les héritiers mâles ou femelles indistinctement ; ils sont reversibles à la couronne à défaut d’hoirs mâles.

Les terres du domaine ne sont plus données purement & simplement en mariage, mais seulement en payement des deniers dotaux, & comme un engagement ou espece de vente à la faculté de rachat. Les terres données pour le doüaire des reines, ne sont qu’en usufruit : ainsi il n’y a point d’aliénation.

Les inféodations du domaine faites à prix d’argent, ou pour récompense de services réels & exprimés dans l’acte avant l’ordonnance de 1566, ne sont pas sujettes à révocation comme les simples dons. Il y a d’autres inféodations du domaine qui ont été faites depuis cette ordonnance, en conséquence des édits du mois d’Avril 1574, Mars 1587, Septembre 1591, 4 Septembre & 23 Octobre 1592, 25 Février 1594, Mars 1619, Mars 1635, Mars 1639, Septembre 1645, Décembre 1652, Avril 1667, 1669 ; 7 Avril 1672, Mars & 19 Juillet 1695, 13 Mars, 3 Avril & 4 Septembre 1696, 13 Août 1697, Avril 1702, 2 Avril & 26 Septembre 1703, Août 1708, & 9 Mars 1715 : mais quoique plusieurs de ces édits & déclarations ayent ordonné la vente des domaines à titre d’inféodation & de propriété incommutable & à perpétuité, on tient pour maxime que toutes ces inféodations faites moyennant finance, & qui emportent diminution du domaine, en quelques termes qu’elles soient conçûes, ne sont toûjours que des engagemens sujets au rachat perpétuel ; comme il est dit par les édits de 1574, 1587, & plusieurs autres édits & déclarations postérieurs : à plus forte raison quand les inféodations participent de l’engagement, & qu’elles sont faites en rentes & en argent.

On distingue néanmoins les engagemens qui sont faits à titre d’inféodation, de ceux qui ne sont point faits à ce titre, & que l’on appelle engagemens simples. Les premiers donnent aux seigneurs engagistes un droit un peu plus étendu ; ils joüissent quasi domini, des domaines qui leur sont engagés, & participent à certains droits de fief & honorifiques : au lieu que les simples engagistes ne sont proprement que des créanciers antichrésistes, qui joüissent du domaine engagé pour l’intérêt de l’argent qu’ils ont prété au roi ; du reste, ceux qui ont acquis un bien du domaine à titre d’inféodation, ne sont toûjours qualifiés que d’engagistes comme les autres, ainsi qu’on le voit dans tous les édits & déclarations intervenus sur cette matiere depuis 1667.

On ne doit pas confondre avec les engagemens les inféodations des domaines du roi, lorsqu’elles sont faites sans aucun payement de finance, sous la condition par l’inféodataire d’améliorer le domaine inféodé, comme de défricher ou dessécher un terrein, d’y bâtir ou planter, &c. & sous la reserve de la suzeraineté, emportant foi & hommage, droits seigneuriaux & féodaux ; ou de la directe, cens & surcens, emportant lods & ventes, saisine, & autres droits dûs aux mutations des fiefs ou des rotures, suivant qu’ils sont fixés par les coûtumes, ou stipulés par les contrats d’inféodation.

Ce qui a donné lieu quelquefois de confondre ces sortes d’inféodations avec les engagemens, est que par différens édits qui ont ordonné l’aliénation des do-