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latin cancelli, pour placer les chantres. A l’entrée de ce chancel étoit l’ambon, c’est-à-dire un jubé ou tribune élevée, où l’on montoit des deux côtés pour faire les lectures publiques. Si l’ambon étoit unique, il étoit placé au milieu ; mais quelquefois on en faisoit deux, pour ne point cacher l’autel. A la droite de l’évêque & à la gauche du peuple, étoit le pupitre de l’évangile ; de l’autre côté celui de l’épître : quelquefois il y en avoit un troisieme pour les prophéties. Après l’ambon étoit le chœur, garni des deux côtés de siéges & de stalles, dont la premiere, à droite près du sanctuaire, étoit la plus honorable. Voyez Chœur.

Du chœur on montoit par des degrés au sanctuaire, où l’on entroit par trois portes. Le sanctuaire avoit trois absides dans sa longueur, & le maître-autel étoit placé au milieu sous l’abside la plus élevée, couronné d’un baldaquin soûtenu par quatre colonnes. Voyez Abside, Sanctuaire, Baldaquin.

Sous chacune des moindres absides étoit une table ou crédence en forme de buffet, pour mettre les oblations ou les vases sacrés.

Derriere l’autel enfin étoit le sanctuaire ou presbytere, où les prêtres étoient assis en demi-cercle, l’évêque au milieu d’eux sur une chaise plus élevée que les siéges des prêtres. Tous les siéges ensemble s’appelloient en grec σύνθρονος, en latin consessus. Quelquefois aussi on le nommoit tribunal, & en grec βῆμα, parce qu’il ressembloit aux tribunaux des juges séculiers dans les basiliques. Voy. Basiliques ; Fleury, mœurs des Chrét. tit. xxv. Vehler, de templis veterum ; Leo Allatius, Mabillon, &c.

Il est vrai que parmi les églises greques qui subsistent encore, il y en a peu qui ayent toutes les parties que nous venons de décrire, parce qu’elles ont été la plûpart ruinées ou converties en mosquées. Voyez Mosquée.

Quant à la forme des églises latines, quoiqu’elle ne soit pas bien constante, on peut les réduire à trois classes ; celles qui sont en forme de vaisseau ; celles qui sont en croix ; & celles qui ne formant qu’un dome, sont absolument de forme ronde : mais celles-ci sont les plus rares.

M. Frezier ingénieur du Roi, & le P. Cordemoy chanoine régulier, ont disputé avec beaucoup d’érudition l’un & l’autre sur la forme des églises anciennes & modernes, & sur la meilleure maniere d’en construire ; ils ont tous deux donné à ce sujet des dissertations fort intéressantes, qu’on trouve dans les mémoires de Trévoux.

Eglise signifie aussi un temple bâti & consacré en l’honneur de Dieu, & pour l’ordinaire sous l’invocation de quelque saint ; ainsi l’on dit l’église de saint Pierre de Rome, de S. Jean de Latran, de Notre-Dame de Paris. Les anglicans même ont conservé ce titre, puisqu’ils disent l’église de S. Paul à Londres. Mais les autres réformés ont poussé leur aversion contre l’Eglise romaine, jusqu’à abolir le nom d’église, auquel ils ont substitué celui de prêche, inconnu à toute l’antiquité, pour désigner leurs lieux d’assemblée pour les exercices de religion.

Les églises prises en ce sens ont différens noms, selon leur rang, leur usage, & la maniere dont elles se gouvernent, comme église métropolitaine, église cathédrale, église paroissiale, église cardinale, église collégiale, &c. Voyez Métropolitaine, Cathédrale, &c.

On trouve quelquefois dans les auteurs ecclésiastiques le terme de grande église, pour signifier la principale église d’un endroit. Ce terme est singulierement employé dans la liturgie greque, pour désigner l’église de sainte Sophie à Constantinople, qui étoit le siége patriarchal ; elle avoit été commencée par

Constantin, elle fut finie & consacrée sous Justinien. Cette église étoit alors d’une telle magnificence, qu’on dit que pendant la cérémonie de la consécration ce prince s’écria : ἐνίκησά σε Σολομών, je t’ai surpassé, ô Salomon ! Le dome, qui est, dit-on, le premier qu’on ait jamais construit, a 330 piés de diametre : les Turcs en ont fait leur principale mosquée. Voyez Dome & Mosquée.

Fitz Herbert prétend que dans les anciens livres de droit anglois le mot église, ecclesia, signifie proprement une paroisse desservie par un prêtre ou curé en titre ; c’est pourquoi, ajoûte-t-il, si l’on faisoit une présentation à une chapelle, comme à une église, en employant le mot ecclesia, la chapelle changeoit de nom, & étoit dès-lors érigée en titre d’église ou de paroisse. Quand il s’agissoit de savoir si c’étoit une église ou une chapelle annexe à quelqu’église, on demandoit si elle avoit baptisterium & sepulturam, c’est-à-dire des fonts baptismaux & le droit d’inhumation ; & sur l’affirmative la justice décidoit qu’elle avoit le titre d’église. Chambers, dictionn. lett. E. au mot Ecclesia.

Quelques auteurs prétendent que la premiere église qui ait été bâtie publiquement par les Chrétiens, a été celle de S. Sauveur à Rome, fondée par Constantin. D’autres soûtiennent que plusieurs églises qui ont porté le nom de S. Pierre le Vif, avoient été bâties en l’honneur de cet apôtre dés son vivant. Ce dernier sentiment est absurde, & contraire à la discipline ecclésiastique de tous les siecles. D’ailleurs, si l’on juge du nom des églises consacrées sous ce titre, par une très-ancienne qui se trouve dans un des fauxbourgs de Sens, & que le peuple appelle S. Pierre le Vif, son véritable nom est S. Pierre le Vic, sancti Petri Vicus, ou l’église de saint Pierre du Vic, sancti Petri de Vico, c’est-à-dire du bourg ou du fauxbourg ; nom qui peut bien avoir été altéré par le peuple en celui de vif, & avoir donné lieu à l’erreur dont nous venons de parler. (G)

Eglise Matrice ou Mere, voyez Matrice.

Eglise, (Jurisp.) ce terme a dans cette matiere plusieurs significations différentes ; il s’entend quelquefois de l’assemblée des fideles, quelquefois du corps des ecclésiastiques de toute la chrétienté, ou de ceux d’une nation, d’une province, d’une ville, d’une église particuliere : on entend enfin quelquefois par église, l’édifice où les ecclésiastiques font le service divin. Voyez Eglise (Architecture).

L’Eglise peut être considérée par rapport à la foi & au dogme, ou par rapport à la célébration du service divin & à l’administration des sacremens ; ou par rapport à la discipline ecclésiastique pour ces matieres. Voyez aux mots Dogme, Foi, Service divin, Sacremens, Ecclésiastiques, Discipline ecclésiastique.

Il y a des biens d’église, c’est-à-dire attachés à chaque église particuliere, pour la subsistance de ses ministres.

Jesus-Christ a fondé l’Eglise dans l’état de pauvreté. Les apôtres vivoient des libéralités des fideles. Dans l’Eglise naissante à Jérusalem, qui est le véritable lieu de son origine extérieure, les fideles prévoyant les persécutions, vendoient leurs biens, & mettoient le prix entre les mains des apôtres, dont ils vivoient en commun.

Mais on tient que cette vie commune ne s’étendit pas hors de Jérusalem, & qu’elle cessa dès que le nombre des fideles se fut assez multiplié pour que la vie commune fût difficile à pratiquer. Les fideles donnoient cependant toûjours une partie de leurs biens pour la subsistance des ministres de l’Eglise & des pauvres.

Les apôtres faisoient d’abord eux-mêmes la distribution de ces aumônes & oblations ; mais voyant