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regardent comme dangereuse & inutile. En effet la section en partie du tendon est suivie d’ordinaire d’accidens très-funestes, & qu’on ne fait cesser qu’en divisant totalement le tendon. Outre cela, les tendons servent à tirer une partie mobile qu’on peut mettre & maintenir dans une extension qui rapproche les parties divisées, & en procure la réunion. Pour faciliter le succès de cette pratique, à l’égard des extenseurs des doigts des mains, on se sert d’une machine de fer blanc composée d’une espece de gouttiere dans laquelle on pose l’avant-bras, & d’une plaque qu’on ajuste à la gouttiere par le moyen d’une charniere & d’une goupille. Cette derniere piece, qui est mobile, peut former avec la gouttiere un angle plus ou moins mousse, selon qu’il est nécessaire pour mettre la main, dont on applique le plat sur elle en une extension plus ou moins grande. On soûtient cette piece par deux crochets qui y sont attachés, & deux cremailleres soudées à la gouttiere. M. Petit a inventé cette machine, & en a donné la figure.

Le but principal que doit avoir le chirurgien, quand il y a un ou plusieurs doigts de fracturés, est de rétablir dans leur situation les parties qui sont déplacées, & d’y faire ensuite un bandage, suivant les regles de l’art, avec un ruban étroit ; mais quand par malheur la collision des doigts jointe au sphacele, est si considérable, qu’ils ne tiennent plus à la main, il faut les séparer tout-à-fait avec le bistouri ou avec les ciseaux ; car il vaut mieux prendre alors tout d’un coup le parti de l’amputation, que de fatiguer le malade par une cure pénible, qui n’aura point de succès : d’ailleurs la gangrene ne permet pas de différer l’opération.

Il est bien rare qu’il y ait à un des doigts une plaie d’armes-à-feu, sans que ce doigt soit emporté en partie ; il faut cependant tâcher de le conserver encore à cause de la nécessité dont il est à l’homme ; & comme de telles blessures sont souvent accompagnées d’inflammation & d’abcès, qui s’étendent jusques dans la main, & même dans l’avant-bras, on préviendra ces accidens, autant qu’il est possible, par des incisions, par des contre-ouvertures, par le régime, par les saignées, & par les topiques d’usage. A l’égard des plaies qui peuvent être faites à la premiere phalange du pouce, comme elles different de celles des autres doigts, à cause des gros muscles qui recouvrent cette premiere phalange, je remarque en passant qu’elles sont de la nature de toutes les plaies faites dans les parties où les os sont recouverts de beaucoup de muscles, & qu’elles demandent les mêmes secours de la part du chirurgien.

Dans l’écrasement des doigts, la premiere attention sera de conserver & la main & les doigts, & de ne les couper qu’à la derniere extrémité ; car s’il reste encore quelque artere pour y porter la vie, & quelque veine pour entretenir la circulation du sang, il faut en différer l’extirpation. On tâchera de les garantir de la gangrene, ou du moins d’en empêcher le progrès par des fomentations de quelque liqueur spiritueuse & résolutive ; d’heureux succès les plus inespérés ont confirmé cette méthode. Mais supposé qu’on ne voie plus d’espérance de rétablir dans leur premier état les doigts qui ont été écrasés ; supposé qu’ils soient entierement mortifiés, leur amputation devient nécessaire.

Enfin elle l’est malheureusement, 1° quand l’un des doigts est cancéré ; 2° quand la carie s’y porte, parce que son sentiment a été perdu par une forte gelée qui a étouffé la chaleur naturelle, & qu’on a tenté vainement de rappeller ; 3° quand ce sentiment est encore éteint par un sphacele confirmé. Dans ces cas desespérés, l’extirpation n’est plus douteuse ; elle se fait de trois manieres, 1° avec des ciseaux pour

des enfans, 2° avec le ciseau & le maillet, 3° avec le bistouri, en laissant assez de peau pour recouvrir l’os. Après l’amputation, on applique sur la plaie de la charpie & des compresses, & l’on assûre le tout avec une bande roulée.

Pour ce qui concerne l’abcès qui vient à l’extrémité des doigts, & que les medecins nomment panaris (voyez Panaris), c’est un mal très-commun, très-douloureux, fort compliqué, dont conséquemment il importe beaucoup d’indiquer les différentes especes, & leurs remedes. Article de M. le Chevalier de Jaucourt.

Doigt, en Astronomie, est la douzieme partie du diametre apparent du Soleil ou de la Lune. Chaque doigt se divise en soixante minutes. On dit dans les éclipses de Lune ou de Soleil, qu’il y a tant de doigts d’éclipsés, & ces doigts éclipsés s’appellent doigts écliptiques, digiti ecliptici. Voyez Eclipse. (O)

Doigt, (Hist. anc.) pris comme mesure parmi les Hébreux, qui l’appelloient esbah, contenoit un de pouce. Il y avoit quatre doigts dans le palme, & six palmes dans la coudée. Voyez Coudée. (G)

Doigt, (Commerce.) se prend pour une des mesures des longueurs : c’est la plus petite après la ligne ; elle contient quatre lignes, ce qui fait le tiers du pouce du roi. Voyez Pouce. Dict. du Comm. (G)

Doigt (travers de), est une mesure qui a la longueur de deux grains d’orge mis l’un au bout de l’autre, ou de quatre posés en travers. Voy. Mesure.

Doigt, (Horlogerie.) piece de la quadrature d’une montre ou d’une pendule à répétition : elle entre à quarré sur l’arbre de la grande roue de sonnerie, & sert à faire sonner les quarts, en ramenant la piece des quarts dans son repos. Voyez d, fig. 57. Pl. II. de l’Horlogerie. (T)

DOIGTER, est, en Musique, faire marcher d’une maniere convenable & réguliere les doigts sur quelque instrument, & principalement sur l’orgue & le clavecin, pour en joüer le plus facilement & le plus nettement qu’il est possible.

Sur les instrumens à manche, tels que le violon & le violoncelle, le point principal du doigter consiste dans les diverses positions de main ; c’est par-là que les mêmes passages peuvent devenir faciles ou difficiles, selon les positions & les cordes sur lesquelles on les prend ; & c’est quand un symphoniste est parvenu à passer rapidement & avec précision & justesse par toutes ces différentes positions, qu’on dit qu’il possede bien son manche.

Sur l’orgue ou le clavecin, le doigter est autre chose. Il y a deux manieres de joüer sur ces instrumens, savoir les pieces & l’accompagnement. Pour joüer des pieces, on a égard à la facilité de l’exécution & à la bonne grace de la main. Comme il y a un nombre excessif de passages possibles, dont la plûpart demandent une maniere particuliere de faire marcher les doigts, il faudroit pour donner des regles suffisantes sur cette partie, entrer dans des détails que cet ouvrage ne sauroit comporter, & sur lesquels l’habitude tient lieu de regle, quand une fois on a la main bien posée. Les préceptes généraux qu’on peut donner sont 1°. de placer les deux mains sur le clavier, de maniere qu’on n’ait rien de gêné dans son attitude ; ce qui oblige d’exclure communément le pouce de la main droite, parce que les deux pouces placés sur le clavier, & principalement sur les touches blanches, donneroient aux bras une situation contrainte & de mauvaise grace. 2°. De tenir le poignet à la hauteur du clavier, les doigts un peu recourbés sur les touches, & un peu écartés les uns des autres, pour être prêts à tomber sur des touches différentes. 3°. De ne point porter successivement le même doigt sur deux touches consécutives, mais d’employer tous les doigts de chaque