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sieme jusque vers l’an 1251 ; ils étoient nommés par le peuple & présidés par un homme du roi : ils portoient leur jugement au prevôt de Paris, lequel alors ne jugeoit point. Ces prevôts n’étoient que des fermiers de la prevôté ; & dans les prevôtés ainsi données à ferme, comme c’étoit alors la coûtume, c’étoient les échevins qui taxoient les amendes. Les échevins de Paris cesserent de faire la fonction de juges ordinaires, lorsqu’Etienne Boileau fut prevôt de Paris, c’est-à-dire en 1251 ; alors ils mirent à leur tête le prevôt des marchands ou de la confrairie des marchands, dont l’institution remonte au tems de Louis VII.

Ce fut sous son regne, en 1170, qu’une compagnie des plus riches bourgeois de la ville de Paris y établit une confrairie des marchands de l’eau, c’est-à-dire fréquentans la riviere de Seine, & autres rivieres affluentes ; ils acheterent des religieuses de Haute-Bruyere une place hors la ville, qui avoit été à Jean Popin bourgeois de Paris, lequel l’avoit donnée à ces religieuses. Ils en formerent un port appellé le port Popin : c’est à présent un abreuvoir du même nom. Louis le Jeune confirma cette acquisition & établissement par des lettres de 1170 ; Philippe Auguste donna aussi quelque tems après des lettres pour confirmer le même établissement & régler la police de cette compagnie.

Les officiers de cette compagnie sont nommés dans un arrêt de la chandeleur en 1268 (au registre præposui mercatorum aquæ olim) ; dans un autre de la pentecôte en 1273, ils sont nommés scabini, & leur chef magister scabinorum. Dans le recueil manuscrit des ordonnances de police de saint Louis ils sont dits li prevôt de la confrairie des marchands, & li échevins, li prevôt & li jurés de la marchandise, li prevôt des marchands & li échevins de la marchandise, li prevôt & li jurés de la confrairie des marchands.

On voit par un registre de l’an 1291, qu’ils avoient dès-lors la police de la navigation sur la riviere de Seine pour l’approvisionnement de Paris, & la connoissance des contestations qui survenoient entre les marchands fréquentans la même riviere, pour raison de leur commerce.

Ils furent maintenus par des lettres de Philippe le Hardi du mois de Mars 1274, dans le droit de percevoir sur les cabaretiers de Paris le droit du cri de vin, un autre droit apellé finationes celariorum, & en outre un droit de quatre deniers pro dietâ suâ. Ces lettres furent confirmées par Louis Hutin en 1315, par Philippe de Valois en 1345, & par le roi Jean en 1351.

On voit aussi que dès le tems du roi Jean, le prevôt des marchands & les échevins avoient inspection sur le bois qu’ils devoient fournir, l’argent nécessaire pour les dépenses qu’il convenoit faire à Paris en cas de peste ; qu’ils avoient la connoissance des contestations qui s’élevoient entre les bourgeois de Paris, & les collecteurs d’une imposition que les parisiens avoient accordée au roi pendant une année ; que quand ils ne pouvoient les concilier, la connoissance en étoit dévolue aux gens des comptes.

Il y auroit encore bien d’autres choses à dire sur ce qui étoit de la compétence des échevins ; mais comme ces matieres sont communes au prevôt des marchands, qui est le chef des échevins, on en parlera plus au long au mot Prevôt des Marchands.

Nous nous bornerons donc ici à exposer ce qui concerne en particulier les échevins, en commençant par ceux de Paris.

En 1382, à l’occasion d’une sédition arrivée en cette ville, le roi supprima la prevôté des marchands & l’échevinage, & unit leur jurisdiction à la prevôté de Paris, dont elle avoit été anciennement démembrée, en sorte qu’il n’y eut plus de prevôt de marchands ni d’échevins à Paris : ce qui demeura dans cet

état jusqu’en 1388, que la prevôté des marchands fut desunie de la prevôté de Paris ; & depuis ce tems il y a toûjours eu à Paris un prevôt des marchands & quatre échevins. Il paroît néanmoins que la jurisdiction ne leur fut rendue que par une ordonnance de Charles VI. du 20 Janvier 1411.

Ils sont élus par scrutin en l’assemblée du corps de ville, & des notables bourgeois qui sont convoques à cet effet en l’hôtel-de-ville le jour de saint Roch. On élit d’abord quatre scrutateurs, un qu’on appelle scrutateur royal, qui est ordinairement un magistrat ; le second est choisi entre les conseillers de ville, le troisieme entre les quartiniers, & le quatrieme entre les notables bourgeois.

La déclaration du 20 Avril 1617, porte qu’il y en aura toûjours deux qui seront choisis entre les notables marchands exerçans le fait de marchandise ; les deux autres sont choisis entre les gradués, & autres notables bourgeois.

La fonction des échevins ne dure que deux ans, & on en élit deux chaque année, en sorte qu’il y en a toûjours deux anciens & deux nouveaux : l’un des deux qu’on élit chaque année, est ordinairement pris à son rang entre les conseillers de ville & les quartiniers alternativement ; l’autre est choisi entre les notables bourgeois.

Au mois de Janvier 1704 il y eut un édit portant création de deux échevins perpétuels dans chacune des villes du royaume ; mais par une déclaration du 15 Avril 1704, Paris & Lyon furent exceptés ; & il fut dit qu’il ne seroit rien innové à la forme en laquelle les élections des échevins avoient été faites jusqu’alors. Quelques jours après l’élection des échevins de Paris, le scrutateur royal accompagné des trois autres scrutateurs & de tout le corps de ville, va présenter les nouveaux échevins au roi, lequel confirme l’élection ; & les échevins prêtent serment entre ses mains ; à genoux.

Les échevins sont les conseillers ordinaires du prevôt des marchands ; ils siégent entr’eux suivant le rang de leur élection, & ont voix délibérative au bureau de la ville, tant à l’audience qu’au conseil ; & en toutes assemblées pour les affaires de la ville, en l’absence du prevôt des marchands, c’est le plus ancien échevin qui préside.

Ce sont aussi eux qui passent conjointement avec le prevôt des marchands tous les contrats au nom du roi, pour emprunts à constitution de rente.

Le roi a accordé aux échevins de Paris plusieurs priviléges, dont le principal est celui de la noblesse transmissible à leurs enfans au premier degré. Ils en joüissoient déjà, ainsi que du droit d’avoir des armoiries timbrées, comme tous les autres bourgeois de Paris, suivant la concession qui leur en avoit été faite par Charles V. le 9 Août 1371, & confirmée par ses successeurs jusqu’à Henri III. lequel par ses lettres du premier Janvier 1577 réduisit ce privilége de noblesse aux prevôt des marchands & échevins qui avoient été en charge depuis vingt ans, & à ceux qui le seroient dans la suite.

Ils furent confirmés dans ce droit par deux édits de Louis XIV. du mois de Juillet 1656 & de Novembre 1706.

Suivant un édit du mois d’Août 1715, publié deux jours après la mort de Louis XIV. ils se trouverent compris dans la revocation générale des priviléges de noblesse accordés pendant la vie de ce prince ; mais la noblesse leur fut rendue par une autre déclaration du mois de Juin 1716, avec effet rétroactif en faveur des familles de ceux qui auroient passé par l’échevinage pendant le tems de la suppression & suspension de ce privilége.

La déclaration du 15 Mars 1707 permet aux échevins de porter la robe noire à grandes manches & le