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ment le clergé de cette église ; si ce sont des chanoines, ils forment une collégiale ou chapitre. Les ecclésiastiques de toute une province ou diocèse, forment le clergé de cette province ou diocèse.

Les ecclésiastiques de France forment tous ensemble le clergé de France.

Les assemblées que les ecclésiastiques forment entr’eux pour les affaires spirituelles, reçoivent différens noms selon la nature de l’assemblée.

Quand on assemble tous les prélats de la Chrétienté, c’est un concile œcuménique.

S’il n’y a que ceux d’une même nation, le concile s’appelle national.

Si ce sont seulement ceux d’une province, alors c’est un concile provincial.

Les assemblées diocésaines composées de l’évêque, des abbés, prêtres, diacres, & autres clercs du diocèse, sont nommées synodes. Voyez ce qui a été dit à ce sujet au mot Concile.

L’assemblée des membres d’une cathédrale ou collégiale ou d’un monastere, s’appelle chapitre. Voyez Chapitre.

Les ecclésiastiques ont toûjours été soûmis aux puissances, & obéissoient aux princes même payens, en tout ce qui n’étoit pas contraire à la vraie religion : si plusieurs d’entr’eux poussés par un esprit d’ambition & de domination ont en divers tems fait des entreprises pour se rendre indépendans dans les choses temporelles, & s’élever même au-dessus des souverains ; s’ils ont quelquefois abusé des armes spirituelles contre les laïcs, ce sont des faits personnels à leurs auteurs, & que l’Eglise n’a jamais approuvés.

Pour ce qui est de la puissance ecclésiastique par rapport au spirituel, on en parlera au mot Puissance.

Dans la primitive Eglise, ses ministres ne subsistoient que des offrandes & aumônes des fidéles ; ils contribuoient cependant dès-lors, comme les autres sujets, aux charges de l’état. Jesus-Christ lui-même a enseigné que l’Eglise devoit payer le tribut à César ; il en a donné l’exemple en faisant payer ce tribut pour lui & pour S. Pierre : la doctrine des apôtres & celle de S. Paul, sont conformes à celle de Jesus-Christ, & celle de l’Eglise a toûjours été la même sur ce point.

Depuis que l’Eglise posséda des biens fonds, ce que l’on voit qui avoit déjà lieu dès le commencement du jve siecle, & même avant Constantin le Grand, les clercs de chaque église y participoient selon leur état & leurs besoins ; ceux qui avoient un patrimoine suffisant, n’étoient point nourris des revenus de l’église : tous les biens d’une église étoient en commun, l’évêque en avoit l’intendance & la disposition.

Les conciles obligeoient les clercs à travailler de leurs mains pour tirer leur subsistance de leur travail, plûtôt que de rien prendre sur un bien qui étoit consacré aux pauvres : ce n’étoit à la vérité qu’un conseil ; mais il étoit pratiqué si ordinairement, qu’il y a lieu de croire que plusieurs le regardoient comme un précepte. C’en étoit un du moins pour plusieurs des clercs inférieurs, lesquels étant tous mariés, & la distribution qu’on leur faisoit ne suffisant pas pour la dépense de leur famille, étoient souvent obligés d’y suppléer par le travail de leurs mains.

Il y a encore moins de doute par rapport aux moines, dont les plus jeunes travailloient avec assiduité, comme le dit Severe Sulpice en la vie de saint Martin.

Les plus grands évêques qui avoient abandonné leur patrimoine après leur ordination, travailloient des mains à l’exemple de S. Paul, du moins pour s’occuper dans les intervalles de tems que leurs fonctions leur laissoient libres.

Vers la fin du jve siecle, on commença en Occi-

dent à partager le revenu de l’Eglise en quatre parts ;

une pour l’évêque, une pour son clergé & pour les autres ecclésiastiques du diocèse, une pour les pauvres, l’autre pour la fabrique : les fonds étoient encore en commun ; mais les inconvéniens que l’on y trouva, les firent bien-tôt partager aussi-bien que les revenus, ce qui forma les bénéfices en titre. Voyez Bénéfices & Dignités, & ci-après Eglise, Office, Personnat.

Chaque église en corps ou chaque clerc en particulier depuis le partage des revenus & des fonds, contribuoient de leurs biens-aux charges publiques. Les ecclésiastiques n’eurent aucune exemption jusqu’au tems de Constantin le Grand. Cet empereur & les autres princes Chrétiens qui ont regné depuis, leur ont accordé différens priviléges, & les ont exemptés d’une partie des charges personnelles, exemptions qui ont reçu plus ou moins d’étendue, selon que le prince étoit disposé à favoriser les ecclésiastiques, & que les besoins de l’état étoient plus ou moins grands ; à l’égard des charges réelles qui étoient dûes à l’empereur pour la possession des fonds, les ecclésiastiques les payoient comme les autres sujets.

Ainsi Constantin le Grand accorda aux ecclésiastiques l’exemption des corvées publiques, qui étoient regardées comme des charges personnelles.

Sous l’empereur Valens cette exemption cessa ; car dans une loi adressée, en 370, à Modeste préfet du prétoire, il soûmet aux charges de ville les clercs qui y étoient sujets par leur naissance, & du nombre de ceux qu’on nommoit curiales, à moins qu’ils n’eussent été dix ans dans l’état ecclésiastique.

Du tems de Théodose, ils payoient les charges réelles ; en effet, S. Ambroise évêque de Milan disoit à un officier de l’empereur : Si vous demandez des tributs, nous ne vous les refusons pas ; les terres de l’Eglise payent exactement le tribut. S. Innocent pape écrivoit de même, en 404, à S. Victrice évêque de Roüen, que les terres de l’Eglise payoient le tribut.

Honorius ordonna en 412, que les terres de l’Eglise seroient sujettes aux charges ordinaires, & les affranchit seulement des charges extraordinaires.

Justinien par sa novelle 37, permet aux évêques d’Afrique de rentrer dans une partie des biens dont les Ariens les avoient dépouillés, à condition de payer les charges ordinaires : ailleurs il exempte les églises des charges extraordinaires seulement ; il n’exempta des charges ordinaires qu’une partie des boutiques de Constantinople, dont le loyer étoit employé aux frais des sépultures, dans la crainte que s’il les exemptoit toutes, cela ne préjudiciât au public.

Les papes mêmes, & les fonds de l’église de Rome, ont été tributaires des empereurs romains ou grecs jusqu’à la fin du viij. siecle ; & S. Gregoire recommandoit aux défenseurs de Sicile, de faire cultiver avec soin les terres de ce pays, qui appartenoient au saint siége, afin que l’on pût payer plus facilement les impositions dont elles étoient chargées. Pendant plus de 120 ans, & jusqu’à Benoit II, le pape étoit confirmé par l’empereur, & lui payoit 20 liv. d’or ; les papes ne sont devenus souverains de Rome & de l’exarcat de Ravenne, que par la donation que Pepin en fit à Etienne III.

Lorsque les Romains eurent conquis les Gaules, tous les ecclésiastiques y étoient gaulois ou romains, & par conséquent sujets aux tributs comme dans le reste de l’empire.

La monarchie françoise ayant été établie sur les ruines de l’empire, on suivit en France, par rapport aux ecclésiastiques, ce qui se pratiquoit du tems des empereurs.

Entre les ecclésiastiques, plusieurs étoient francs d’origine, d’autres étoient gaulois ou romains, & entre