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qui ait écrit sur la science du Manége. Il l’a employé pour exprimer le mouvement desordonné du cavalier qui tenant une rêne dans chaque main, n’agit que par secousse avec l’une ou l’autre de ces rênes, lorsqu’il veut retenir son cheval, ou plus communément lorsqu’il entreprend de le tourner. On conçoit que la barre sur laquelle se transmet l’impression de cet effort dur & subit, ne peut en être que vivement endommagée. Ce mot, dont la signification est restrainte à ce seul sens, a vieilli, ainsi que beaucoup d’autres : il est rarement usité parmi nous. Ce n’est pas que la main de nos piqueurs, & même celle de nombre d’écuyers qui pratiquent de nos jours, soit plus perfectionnée & moins cruelle que celle des piqueurs & des maîtres qui étoient contemporains de la Broue ; mais nous nous servons indifféremment du terme de sacade, qu’il n’a néanmoins appliqué que dans le cas de la secousse des deux rênes ensemble, pour désigner toute action soudaine, brutale & non mesurée, capable d’égarer une bouche, ou tout au moins de falsifier l’appui ; soit qu’elle parte d’une main seule, soit qu’elle soit opérée par toutes les deux à la fois. Après ce détail, on trouvera peut-être singulier que plusieurs auteurs, & la Broue lui-même, ayent conseillé de recourir aux ébrillades, comme à un châtiment très-propre à corriger le cheval dans une multitude d’occasions. (e)

EBROUEMENT, s. m. (Manége.) mouvement convulsif produit par l’irritation de la membrane pituitaire, soit en conséquence de l’acrimonie du mucus, soit ensuite de l’impression de certaines odeurs fortes, ou de certains médicamens que nous nommons errines.

Il ne peut & ne doit être véritablement comparé qu’à ce que nous appellons, relativement à l’homme, éternuement.

Aristote a recherché pourquoi de tous les animaux, celui qui éternue le plus souvent est l’homme. Probl. sect. x. probl. 49. ibid. sect. xxxiij. probl. 11.

Cette même question a excité la curiosité d’Aphrodisée, liv. I. prob. 144.

Schoock, après avoir réfléchi sur la difficulté de désigner positivement les animaux dans lesquels cette sorte de convulsion a lieu, nomme les chiens, les chats, les brebis, les bœufs, les ânes, les renards, & les chevaux.

Quoi qu’il en soit, la comparaison de l’ébrouement & de l’éternuement me paroît d’autant plus juste, que le méchanisme de l’un & de l’autre n’a rien de dissemblable. D’abord la poitrine de l’animal est fortement dilatée, il inspire une grande quantité d’air ; mais cet air bientôt chassé, sort avec véhémence & avec impétuosité, en balayant les fosses nazales, & en emportant avec lui la mucosité qu’il rencontre sur son passage. Or je dis que les particules âcres du mucus, des ptarmiques, ou des corps odorans qui suscitent ce mouvement convulsif, appliquées sur le nerf nazal, y font une impression dont participent l’intercostal & le vague, & conséquemment tous les nerfs qui se distribuent aux muscles de la respiration. Ces nerfs agités, les uns & les autres de ces muscles se contractent, les inspirateurs entrent les premiers en contraction ; de-là la dilatation subite & extraordinaire du thorax, dilatation qui est promptement suivie d’un resserrement violent : car les expirateurs, dont les nerfs toûjours irrités augmentent la résistance, l’emportent bientôt sur les premiers, pressent le diaphragme, & compriment tellement les poumons, que l’air est expulsé avec une violence considérable. Il est vrai que la contraction & l’effort ne sont pas toûjours aussi grands ; mais l’une & l’autre sont proportionnés à l’action des corps qui ont sollicité les nerfs : suivant la vivacité de cette action, le jeu des muscles sera plus ou moins sensible.

On ne doit pas confondre, au surplus, avec l’ébrouement proprement dit, cette expiration plus marquée qu’à l’ordinaire, & qui se manifeste dans certains chevaux à la vûe de quelques objets qui les effrayent, à l’approche de quelques odeurs qu’ils craignent, ou lorsqu’ils sont enfin extrèmement animés ; ce qui est parfaitement exprimé dans la traduction & dans le commentaire de Castalio sur le texte du livre de Job, ch. xxxjx. de la conduite admirable de Dieu dans les animaux : cùm terror fit ejus nasibus decorus ; à quoi il ajoûte, ad formidabilia sumat generosè nasibus, nihil formidans. Munster & Mercer n’ont admis aucune différence entre l’ébrouement & l’expiration dont il s’agit. Le premier, que quelques-uns envisagent comme un des hommes les plus versés dans la langue hébraïque, traduit de cette maniere le même passage hébreu, virtus narium ejus, & il l’explique ensuite en disant, id est fremitus & sternutatio ejus. Le second l’interprete dans sa glose, de façon à nous prouver qu’il ne distingue pas seulement l’ébrouement du hennissement : vehemens sonitus quem sternutans edit, terrorem affert omnibus qui audiunt. Il est certain néanmoins que plus un cheval est recherché, plus il a de l’ardeur, plus la respiration est forte & fréquente en lui ; & cette fréquence occasionnant dans les nazaux une plus vive collision de l’air, il expire avec bruit, il souffle : mais l’ébrouement n’est point réel. L’expiration est-elle plus remarquable à la vûe d’un objet qui lui inspire de la crainte, l’émotion donnera lieu à une contraction dans laquelle on trouvera la raison de cette expiration augmentée : que si certaines odeurs l’occasionnent, ce n’est que parce que l’animal, par un instinct naturel, cherche à éloigner de lui les choses qui peuvent lui procurer une sensation nuisible ou desagréable.

L’ébrouement est un signe favorable dans un cheval qui tousse, voyez Poussif ; & dans les chevaux qui jettent, voyez Gourme, Fausse gourme, Morve. (e)

EBROUER, (s’) Manége ; voyez Ebrouement.

EBSOM, (sel de) Chimie & Matiere medicale ; c’est un sel vitriolique à base terreuse auquel un sel de cette nature retiré de la fontaine d’Ebsom en Angletèrre, a donné son nom. On distribue dans les différentes parties de l’Europe, sous le nom de sel d’Ebsom, des sels de ce genre qui se ressemblent par plusieurs propriétés communes, mais qui different entr’eux par quelques caracteres particuliers, mais moins essentiels. Nous parlerons de tous ces sels, de leurs qualités communes & de leurs différences dans un article destiné aux sels vitrioliques en général, que nous placerons après l’article Vitriol. Voyez cet article.

EBULLITION, EFFERVESCENCE, FERMENTATION, (Gramm. & Chimie.) Ces trois mots ne sont point synonymes, quoiqu’on les confonde aisément. M. Homberg est un des premiers qui en a expliqué la différence, & qui en a fait l’exacte distinction.

On appelle en Chimie ébullition, lorsque deux matieres en se pénétrant font paroître des bulles d’air, comme il arrive dans les dissolutions de certains sels par les acides.

On nomme effervescence, lorsque deux matieres qui se pénetrent produisent de la chaleur, comme il arrive dans presque tous les mêlanges des acides & des alkalis, & dans la plûpart des dissolutions minérales.

On appelle enfin fermentation, lorsque dans un mixte il se fait naturellement une séparation de la matiere sulphureuse avec la saline, ou lorsque par la conjonction de ces deux matieres il se compose naturellement un autre mixte.