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cette derniere est opaque. Voyez Plinii hist. nat. lib. XXXVII. cap. x. (—)

DRACOCEPHALON, s. m. (Hist. nat. bot.) genre de plante à fleur monopétale labiée. La levre supérieure est faite en casque ; l’inférieure est découpée en trois parties : ces deux pétales forment une sorte de gorge, & représentent en quelque façon la tête d’un dragon. Il sort du calice un pistil qui entre comme un clou dans la partie postérieure de la fleur. Il est environné de quatre embryons, qui deviennent dans la suite autant de semences enveloppées dans une capsule, qui a servi de calice à la fleur. Tournefort, inst. rei herb. Voyez Plante. (I)

DRACONTIQUE, adj. (Astron.) Mois dracontique, c’est l’espace de tems que la Lune employe à aller de son nœud ascendant, appellé caput draconis, tête du dragon, au même point. Voyez Tête du Dragon & Mois. Ce mot n’est plus en usage. (O)

DRAGE, s. f. (Brasserie.) c’est ainsi que les Brasseurs appellent la farine ou le grain bruisiné, après qu’il est brassé. Voyez Brasserie.

* DRAGÉE, s. f. (Fond. art méch.) plomb fondu à l’eau ou coulé au moule, en grains plus ou moins gros, dont on charge les armes à feu pour la chasse. On appelle ces grains dragées, pour les distinguer des balles dont une seule remplit le calibre du fusil ; au lieu qu’il faut une quantité plus ou moins grande de dragées pour la charge d’une arme à feu, selon la nature de l’arme ou l’espece de chasse, & la force ou la grosseur de la dragée. On évalue la charge ordinaire d’un fusil avec de la dragée, au poids d’une balle de six lignes de diametre.

Il paroît par la définition que nous venons de donner de la dragée, qu’elle se fait de deux manieres, ou à l’eau ou au moule. Nous allons expliquer ces deux manœuvres, après avoir observé d’abord qu’il peut arriver à la dragée fondue à l’eau d’être creuse, & par conséquent de perdre la vîtesse qui lui est imprimée par la poudre beaucoup plus promptement, que ne la perd la dragée coulée au moule : mais d’un autre côté, elle est plus belle, plus exactement sphérique, & se fabrique plus facilement & plus vîte.

De la dragée fondue à l’eau. Pour fondre le plomb à l’eau & le réduire en dragée, ayez une chaudiere de fonte, environnée d’une maçonnerie d’un pié d’épaisseur, & soûtenue sur quatre fortes barres de fer ; que le fond de la chaudiere soit elevé au-dessus du foyer d’environ un pié ; qu’il y ait à la maçonnerie une ouverture d’un pié en quarré, par laquelle on puisse introduire le bois sous la chaudiere ; & que le tout soit recouvert d’un grand manteau de cheminée, à la hauteur de cinq piés.

Vous pourrez mettre dans votre chaudiere jusqu’à douze ou quinze saumons de plomb, faisant au total environ 1200 livres. Vous allumerez dessous un bon feu ; vous mêlerez parmi les saumons de la braise & des tisons, afin d’empêcher qu’il ne se détruise par la perte de son phlogistique qui se trouve par-là remplacé par celui du charbon. Le bois n’échauffe que peu & fort lentement le corps sur lequel il est posé. Et lorsque votre plomb sera dans une fusion convenable, c’est-à-dire lorsqu’en y plongeant une carte, elle ne tardera pas plus d’une minute à s’enflammer, vous prendrez une cuillere de fer ; vous rangerez dans un coin de la chaudiere la grosse crasse, & les charbons qui nageront à la surface du plomb fondu, de sorte qu’elle paroisse claire & nette en cet endroit, où vous jetterez environ une demi-livre d’orpin grossierement concassé ; vous brouillerez l’orpin avec le plomb, en puisant dans la chaudiere quelques cuillerées de plomb fondu, & en les répandant dessus l’orpin, jusqu’à ce qu’il s’enflamme. S’il arrive à la flamme de s’élever de plus de quatre doigts, vous empêcherez l’orpin de brûler trop vîte

avec des crasses que vous ramasserez sur la surface du plomb fondu, & que vous jetterez sur la flamme qui en sera en partie étouffée, & qui perdra par ce moyen un peu de sa trop grande activité. Vous réitérerez trois fois de suite cette manœuvre, & vous employerez sur une fonte de 1200 livres, telle que nous la supposons ici, une livre & demie d’orpin au plus. Cependant la proportion de la quantité d’orpin à la quantité du plomb, n’est pas fixe ; la qualité du plomb la fait varier. Il arrivera souvent à une fonte de 1200 livres de se préparer avec une livre ou cinq quarterons d’orpin ; mais quelquefois la même quantité de plomb en demandera jusqu’à une livre & demie, selon que le plomb sera plus ou moins pur, plus ou moins ductile, plus ou moins aigre.

Vous connoîtrez de la maniere qui suit, si le plomb a reçu assez d’orpin, ou s’il lui en faut davantage pour se mettre bien en dragée ; en conduisant votre fonte, prenez une poesle percée, nettoyez la superficie de votre plomb, ayez une cuillere de fer, prenez avec cette cuillere environ une livre de plomb fondu dans votre chaudiere, inclinez votre cuillere doucement au-dessus d’un vaisseau plein d’eau, faites tomber dans cette eau votre plomb fondu par un filet le plus menu & le plus lent que vous pourrez ; si vous avez donné à votre plomb de l’orpin en quantité suffisante, à mesure qu’il tombera dans l’eau, il se mettra en dragées rondes ; si au contraire il n’a pas eu assez d’orpin, les gouttes s’allongeront & prendront une figure de larmes ou d’aiguilles : dans ce dernier cas, vous ajoûterez de l’orpin à votre plomb jusqu’à ce que vous soyez assûré que vous lui en avez donné en quantité suffisante, par la rondeur des grains qu’il formera.

Les essais faits, & la chaudiere entretenue dans une chaleur égale, vous aurez un tonneau défoncé & plein d’eau ; vous le rangerez entre vous & la chaudiere ; vous placerez sur ce tonneau une frette de fer d’environ onze pouces de diametre, assemblée avec deux petites barres de fer assez longues pour porter d’un des bords du tonneau au bord opposé, & former une espece de chassis ; vous asseirez sur ce chassis une passoire de fer battu, ou d’une tole mince ; que cette passoire soit ronde ou faite en culot, c’est-à-dire qu’elle forme une calote sphérique d’environ trois pouces de profondeur au plus, qu’elle soit percée de trous d’une ligne de diametre ; que ces trous soient écartés les uns des autres d’un demi-pouce, & qu’ils soient tous bien unis & bien ébarbés.

Lorsque cette passoire sera posée sur la frette, de maniere que son fond ne soit éloigné de la surface de l’eau contenue dans le tonneau que de quatre doigts au plus, vous puiserez du plomb fondu dans votre chaudiere avec une cuillere de fer ; vous en prendrez jusqu’à sept livres à la fois ; vous le verserez dans la passoire, d’où il tombera en dragées de differens échantillons dans le tonneau ; vous écouterez si le bruit qu’il fera, en atteignant l’eau, sera égal & aigu ; si vous y remarquez de l’inégalité, & s’il se fait des petillemens sourds, vous en inférerez que votre plomb est trop chaud. La suite de cet inconvénient sera de mêler votre ouvrage d’une grande quantité de dragées creuses. Laissez-le donc un peu refroidir, & trempez dans l’eau le dessous de votre cuillere avant que de verser sur la passoire le plomb qu’elle contiendra, & que vous aurez puisé ; agitez aussi le plomb qui est en fusion dans la chaudiere. Mais une longue expérience vous donnera un coup-d’œil si certain sur le degré de chaleur de votre plomb, que vous ne vous y tromperez jamais.

En vous conformant à cette manœuvre, votre plomb passera fort vîte, & vous aurez de la grenaille depuis la cendrée la plus fine, jusqu’à la dra-