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détailler les livres latins de la bibliotheque de celui qui y commandoit ; ce pays, dis-je, malgré tant de témoignages positifs, n’est qu’un pays idéal & chimérique : aussi M. de Lisle en a banni le nom de ses cartes, avec d’autant plus de raison que l’on ne sait même ce qu’il signifie. Article de M. le Chevalier de Jaucourt.

ESTOU, s. m. (Boucherie.) table à claire-voie sur laquelle les Bouchers habillent les moutons & les veaux. Si vous ôtez les bras à la civiere des Maçons, vous aurez l’estou des Bouchers. L’estou est soûtenu sur quatre bâtons posés aux quatre angles.

ESTOUPIN, ÉTOUPIN, ou VALET, (Marine.) C’est un peloton de fil de carret proportionné au calibre des canons : on s’en sert à bourrer la poudre quand on les charge.

ESTRAC, (Manége, Maréchallerie.) terme dont nous ne faisons plus aucun usage. Voyez Étroit.

ESTRADE, s. f. (Gramm. & Hist. mod.) est un terme françois qui signifie à la lettre une route publique ou grand chemin. C’est de-là qu’est venue cette phrase militaire, battre l’estrade, c’est-à-dire envoyer des coureurs ou gens à cheval à la découverte pour épier les dispositions de l’ennemi, & donner avis au général de tout ce qu’ils ont apperçû dans la route. Une armée ne marche jamais sans envoyer de tous côtés des batteurs d’estrade.

Ce mot est formé de l’italien sirada, rue ou chemin, qui vient lui-même du latin strata, rue pavée. Quelques-uns le dérivent d’estradiots, qui étoient anciennement des cavaliers qu’on employoit à battre l’estrade.

Estrade signifie aussi une petite élevation sur le plancher d’une chambre, qui est ordinairement entourée d’une alcove ou balustrade pour mettre un lit, & qui, comme en Turquie, n’est quelquefois couverte que de beaux tapis, pour y recevoir les personnes de distinction qui viennent en visite. Voyez Alcove.

Estrade, (Art milit.) se dit du terrain des environs d’une ville ou d’une armée ; ainsi battre l’estrade, c’est parcourir les environs d’une année ou d’une place, pour découvrir s’il y a quelques partis de l’ennemi. (Q)

Estrade, (Jardinage.) Voyez Gradins de Gazon.

ESTRADIOTS ou STRADIOTS, s. m. pl. (Art milit.) espece de cavalerie legere qui a été autrefois d’usage en France. Voyez Cavalerie. (Q)

ESTRAGON, s. m. (Hist. nat. Bot.) dracunculus esculentus. C’est une plante potagere qui pousse plusieurs tiges ou verges à la hauteur de deux piés, rameuses, & portant des feuilles longuettes, odorantes, d’un goût fort, mais agréable. Ses fleurs qui sont jaunes, sont si petites qu’à peine les découvre-t-on ; elles forment de petits bouquets, & sont suivies de petits fruits ronds qui en conservent la semence : on l’employe dans les fournitures de salade, & on en met dans le vinaigre pour le faire sentir bon.

L’estragon se multiplie de traînasses ou boutures, rarement de semence, & repousse quand il a été coupé : sa culture n’a rien de particulier. (K)

Estragon, (Matiere médic. Chim.) Cette plante est puissamment incisive, apéritive, digestive ; elle donne de l’appétit, dissipe les vents, excite les urines & les regles, leve les obstructions : étant mâchée, elle fait sortir la pituite & la salive, comme la pyrethre ; c’est pourquoi elle appaise les douleurs des dents, & purge le cerveau humide. On en fait usage très-fréquemment parmi nous dans les salades ; elle tempere le froid & la crudité des autres plantes avec lesquelles on la mêle. Geoffroy, mat. méd.

L’estragon contient une partie mobile, vive & piquante, qui a quelqu’analogie avec l’esprit volatil

des cruciferes, mais qui n’a pas les caracteres essentiels de ces sels.

L’estragon doit être rangé à cet égard avec l’ail, l’oignon, le poireau, la capucine, & quelques autres, que M. Boerhaave & ses copistes placent mal-à-propos parmi les plantes qui contiennent un alkali volatil nud. On prépare avec cette plante un vinaigre qu’on appelle vinaigre d’estragon.

Le vinaigre d’estragon entre dans l’eau prophylactique de la pharmacopée de Paris. (b)

Estragon, (Diete.) On mange les feuilles de cette plante en salade, rarement seules ; ordinairement avec la laitue, dont elles relevent admirablement le goût. Cette espece d’assaisonnement peut devenir aussi fort utile pour l’estomac, & concourir efficacement avec le sel, le poivre & le vinaigre, à corriger la fadeur, l’inertie d’une plante aqueuse & insipide, telle que la laitue. Voyez Laitue & Salade. L’estragon est très-peu employé à titre de remede. (b)

Estragon, (Chimie.) L’estragon contient une partie vive & piquante au goût & à l’odorat, & aussi volatil que l’esprit des cruciferes, auquel il est d’ailleurs très-analogue. La nature de ce principe mobile n’est pas assez déterminée jusqu’à présent ; les Chimistes instruits savent seulement que ce n’est pas un alkali volaril. (b)

ESTRAMADURE Espagnole (l’), Géog. mod. province d’Espagne, qui a environ 70 lieues de longueur sur 40 de largeur. Elle est bornée au septentrion par le royaume de Léon & la vieille Castille ; à l’orient par la nouvelle Castille ; au midi par l’Andalousie, & à l’occident par le Portugal.

L’Andalousie Portugaise est une province du Portugal, située vers l’embouchure du Tage. Elle est bornée au septentrion par la province de Beira ; à l’orient & au midi par l’Alentéjo ; à l’occident par l’océan Atlantique. Elle se divise en cinq territoires, Sétuval, Alanguer, Santaren, Leiria, Torna. Lisbonne en est la capitale.

ESTRAN, (Marine.) c’est une étendue de terrein le long de la côte, laquelle est très-plate & sablonneuse, & dont souvent une partie est couverte par les hautes marées ; mais ce terme n’est en usage que le long des côtes de Flandres & de Picardie.

ESTRANGEL, adj. (Littérat.) certains caracteres de l’alphabet syriaque, qu’on en peut regarder aujourd’hui comme les lettres majuscules. On a cru que ces majuscules avoient été anciennement le véritable caractere courant.

ESTRAPADE, s. f. (Art milit.) est une espece de punition militaire, dans laquelle, après avoir lié au criminel les mains derriere le dos, on l’éleve avec un cordage jusqu’au haut d’une haute piece de bois, d’où on le laisse tomber jusqu’au près de terre, de maniere qu’en tombant la pesanteur de son corps lui disloque les bras. Quelquefois il est condamné à recevoir trois estrapades, ou même davantage.

Ce mot vient, dit-on, du vieux mot estreper, qui signifie briser, arracher ; ou bien de l’italien strappata, du verbe strappare, tordre par force. Trévoux & Chambers.

L’estrapade n’est plus d’usage, au moins en France.

Estrapade, (Marine.) c’est le châtiment qu’on fait souffrir à un matelot, en le guindant à la hauteur d’une vergue, en le laissant ensuite tomber dans la mer, où l’on le plonge une ou plusieurs fois selon que le porte la sentence. C’est ce qu’on appelle autrement donner la cale. Voyez Cale.

Estrapade, (Manége.) expression ancienne, & par laquelle on entendoit un châtiment donné avec les renes du caveçon ou de la bride. Il seroit à souhaiter pour les chevaux, que l’action de chatier ainsi fût aussi inusitée que ce mot. Quelques-uns lui don-