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DESSERTIR, v. act. (Metteur-en-œuvre.) c’est avec un burin, couper la sertissure d’une pierre un peu au-dessous du feuilletis, pour pouvoir la tirer de son œuvre sans danger.

DESSERVANT, adj. pris subst. (Jurisp.) est celui qui sans être titulaire ni commendataire d’un bénéfice, est commis par le supérieur ecclésiastique pour en faire les fonctions. Voyez ci-dev. Desserte. (A)

DESSICCATIFS, adj. pl. terme de Chirurgie, concernant la matiere médicale externe ; remedes qui ont la vertu de dessécher les plaies & les ulceres. On les appelle aussi cicatrisans. L’exsiccation est la fin qu’on se propose dans la curation des ulceres ; & l’on ne doit perdre cet objet de vûe dans aucun des tems de la cure. L’exsiccation en est l’indication constante, comme nous l’expliquerons au mot Détersif. Les remedes sarcotiques ou incarnatifs, qu’on prescrit pour procurer la regénération des chairs, sont des médicamens auxquels on attribue des effets qu’ils ne produisent pas : car il ne se fait aucune regénération de chairs dans les plaies & dans les ulceres. Quoique l’opinion contraire soit générale & très ancienne, nous nous engageons de prouver cette proposition à l’article Incarnation, où nous exposerons le méchanisme de la réunion des plaies avec perte de substance.

Les remedes dessiccatifs se prennent dans la classe des absorbans, des astringens, & des balsamiques, qu’on employe en poudre : tels sont la colophone, la térébenthine de Chio, la térébenthine ordinaire cuite, les poudres de myrrhe & d’aloes, &c. elles agissent comme astringens, en resserrant l’orifice des vaisseaux ouverts. L’onguent de litharge, l’emplâtre de céruse, de minium, de pierre calaminaire ; la poudre de cette pierre, la tutie, la pierre médicamenteuse de Crollius, &c. sont des remedes absorbans & dessiccatifs. L’eau de chaux est un des meilleurs remedes dont on puisse se servir pour l’exsiccation des ulceres. La charpie seche ou trempée dans quelque liqueur astringente ou spiritueuse suivant l’état des choses, est un fort bon dessiccatif.

Il y a des ulceres cacoëthes, qu’il ne faut pas dessécher sans précaution ; souvent il convient d’adoucir le sang des malades, & de combattre par des remedes appropriés les différentes acrimonies des humeurs. Il suffit quelquefois d’établir un bon régime de vie, & de purger de tems à autre ; dans d’autres cas il seroit dangereux de ne pas ouvrir un cautere dans une autre partie, pour servir d’égout aux humeurs qui s’évacuoient par l’ancien ulcere. Toutes ces considérations exigent beaucoup de lumieres & de prudence dans un chirurgien, tant pour obtenir la guérison des ulceres, que pour prévenir les suites qu’une guérison indiscrete pourroit produire. Voyez Ulcere. (Y)

DESSICCATION, s. f. (Chimie & Pharmacie.) opération qui consiste à priver, par le secours de J. chaleur, différentes matieres solides, c’est-à-dire consistantes ou non liquides d’une eau étrangere à leur mixtion.

La dessiccation differe de la déphlegmation, en ce que les sujets de cette derniere opération sont des liqueurs. Voyez Déphlegmation.

Les Chimistes dessechent plusieurs corps, qu’ils se proposent de soûmettre à d’autres opérations, dans la vûe immédiate d’en dissiper une eau qui seroit incommode, ou même nuisible dans ces opérations. Ils dessechent, par exemple, les sels neutres qu’ils se proposent de distiller, pour avoir des acides plus concentrés. Voy. Vitriol, Sel marin, & c. C’est dans la même vûe qu’ils dessechent les intermedes employés dans quelques-unes de ces distillations.

La dessiccation de ces sels s’appelle calcination dans

le langage ordinaire, mais fort improprement sans doute. Voyez Calcination.

Les Chimistes dessechent aussi les précipités.

Le manuel de ces deux dessiccations n’est pas le même. Les sels se dessechent ordinairement au feu, dans des bassines de fer. Le sel marin mérite à cet égard une considération particuliere, à cause de la décrépitation que l’on peut regarder comme lui étant absolument propre ; le tartre vitriolé avec laquelle elle lui est commune, ne se trouvant jamais dans le cas d’être séché dans les travaux chimiques ordinaires. Voyez Décrépitation.

La regle unique à observer dans cette dessiccation, c’est de ne pas pousser le feu qu’on y employe à un degré capable d’analyser le corps, ou d’attaquer sa mixtion.

Pour dessécher un précipité, on le met d’abord à égoutter sur un papier à filtrer, étendu sur une toile fixée à un carrelet ; on le laisse-là jusqu’à ce que la matiere se soit assez raffermie pour être réduite en petites masses, que l’on met sur des tamis recouverts de papier, & qu’on place au Soleil dans une étuve, dans un lieu sec & plus ou moins chaud, sur une poesle, &c. L’or fulminant, qui est un précipité, doit être desséché par la seule chaleur de l’atmosphere : ce n’est jamais sans risque qu’on l’exposeroit au feu le plus leger. Voyez Or Fulminant au mot Or.

Les Pharmaciens dessechent des substances végétales & animales dans une vûe bien différente : ceux-ci se proposent la conservation de ces substances, lorsqu’ils les dessechent.

On a long-tems cru, & ce préjugé subsiste encore parmi la plûpart des apothicaires, que la méthode la plus avantageuse de dessécher, étoit celle par laquelle on y procédoit à l’aide de la moindre chaleur. Tous les anciens pharmaciens prescrivent de sécher à l’ombre ; &, comme je l’ai déjà observé, l’ignorance qui a si long-tems soûtenu ce préjugé, est encore assez généralement répandue. L’expérience & la raison sont d’accord aujourd’hui en faveur de la manœuvre directement contraire ; ensorte que la premiere & l’unique regle de l’art de dessécher, consiste précisément à procurer ce desséchement le plus rapidement qu’il est possible, & par conséquent au plus haut degré de chaleur, inférieur à celui qui attaqueroit la mixtion de la substance à dessécher. La chaleur du Soleil d’été est très-propre dans nos climats à cette opération. Si le tems est humide ou pluvieux dans le tems de la récolte d’une plante qu’on veut dessécher, on a recours à la chaleur d’une étuve, que l’on peut échauffer jusqu’au 40e degré du thermometre de M. de Reaumur, & même jusqu’au 50e, ou au 60e, si l’étuve est disposée de façon qu’on ne soit pas obligé d’y entrer.

J’ai observé que l’expérience & la raison étoient également favorables à cette méthode. En effet les plantes & les parties des animaux desséchées lentement, sont si inférieures en bonté & en élégance à celles qui sont séchées rapidement, que le simple témoignage des sens peut décider de cette supériorité. Les premieres sont noires, mollasses, à demi-moisies, leur odeur naturelle est absolument altérée : les secondes ont leur couleur naturelle ; elles sont saines ; elles conservent leur odeur, qui est seulement quelquefois legerement affoiblie, & quelquefois au contraire développée ou augmentée.

La raison dit 1°. que puisqu’on se propose de chasser l’eau, qui est un principe de corruption, il faut se hâter de la chasser le plûtôt qu’il est possible. 2°. Qu’une observation constante prouve que cette espece d’altération spontanée, analogue aux fermentations, qui est sur-tout nuisible à la durée des substances fraiches, vertes, humides, est plus efficace-