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DÉMARQUE, s. m. (Hist. anc.) c’étoit le nom du chef d’une région, ou d’un district de la province d’Attique. Les Athéniens divisoient leur pays en un certain nombre de régions, de quartiers, ou de districts ; & ils mettoient des magistrats à la tête de chacun de ces districts, sous le titre de δήμαρχος, demarchus : ce mot est formé de δῆμος, peuple, & d’ἀρχὴ, principe. (G)

DÉMARQUER, v. n. (Manége.) c’est lorsque le cheval ne donne plus à connoître par ses marques l’âge qu’il a. Voyez Marque. (V)

DÉMARRAGE, s. m. (Marine.) il se dit lorsque le vaisseau rompt les amarres qui l’attachoient dans le port ; ce qui peut arriver par la force du mauvais tems & dans une tempête. (Z)

DÉMARE, (Marine.) c’est le commandement pour détacher quelque chose. Vaisseau qui démare, c’est-à-dire lorsqu’après qu’on a levé ou coupé ses amarres, il commence à faire route. (Z)

DÉMARER, v. act. (Marine.) c’est détacher : on l’applique à la mer à toutes choses qu’on détache. (Z)

DÉMATÉ. On dit d’un vaisseau démâté, qu’il a perdu ses mâts. Un vaisseau qui perd quelques-uns de ses mâts doit y remédier le plus promptement qu’il est possible.

Manœuvres à faire quand on est démâté. On ne démâte guere de l’artimon : il s’agit sur-tout du grand mât, du mât de misaine, & de celui de beaupré, le démâtement de celui-ci emportant ordinairement & comme nécessairement celui des deux autres. Dès que ces mâts sont tombés, on coupe incessamment les haubans à coups de haches, & on frape, si le tems le permet, à quelques-uns de ces haubans une haussiere que l’on file, afin de remorquer le mât & ses manœuvres, & en sauver ensuite ce que l’on pourra. On démâte ensuite le mât d’artimon, & on le met à la place du mât de misaine, & en avant du tronçon de ce mât ; car les mâts ne rompent qu’au-dessus de l’étembrai, & même à cinq ou six piés au-dessus du pont. Le grand mât de hune de rechange se met à la place du beaupré, & le petit mât de hune en place du grand mât : on met les deux premiers de l’avant, afin que comme plus grands, portant plus de voilure, ils servent à faire arriver plus aisément le vaisseau dans l’état où il est, l’élévation de sa poupe faisant fonction d’artimon pour le faire venir au vent : que si le vaisseau arrive ensuite trop aisément, on pourra mettre à la place de l’artimon une vergue de hune avec un voile d’étai, la grande difficulté étant de faire gouverner un vaisseau démâté. Cette répartition des mâts est ce que la raison & l’expérience ont trouvé de mieux pour cela.

Pour affermir ensuite ces mâts, on place au pié de l’ancien mât, sur le pont, une piece de bois qui doit servir de carlingue, & que l’on assujettit fortement avec le bau le plus voisin. On saisit ensuite avec de fortes liures ou rostures le nouveau mât avec le tronçon de l’ancien, & entre les vuides on y insere des coins de bois que l’on chasse avec force.

Les mâts étant ainsi assujettis, on donne à celui de hune qui sert de grand mât une vergue & une voile du petit hunier, avec les manœuvres nécessaires, &c. Voyez Mat, &c. (Z)

DÉMATER, v. a. (Marine.) c’est abatre ses mâts : être démâté, c’est avoir ses mâts menés par l’effet des guinderesses.

Démâter se dit dans le port lorsqu’on ôte les mâts du vaisseau.

Démâter à la mer, c’est avoir perdu ses mâts ou une partie de ses mâts, soit dans un combat par le canon de l’ennemi, ou dans le mauvais tems par la violence du vent & de la mer.

DÉMELER un cheval de voiture, c’est lui remettre les jambes où elles doivent être quand il vient à les passer par-dessus ses traits. (V)

Démêler la voie, (Vénerie.) c’est trouver la voie du cerf couru, parmi d’autres cerfs.

DÉMEMBRÉ, adj. dans le Blason, se dit des oiseaux qui n’ont ni piés ni cuisses, aussi-bien que du lion & des autres animaux, dont les membres ont été séparés. Voyez Membré.

DÉMEMBREMENT D’UN FIEF, (Jurisprud.) c’est lorsque la foi & hommage d’un fief est divisée ; que de ce même fief on en forme plusieurs indépendans les uns des autres, & qui sont tenus chacun séparément du même seigneur dominant.

Le démembrement est la même chose que ce que les coûtumes de Picardie & d’Artois appellent éclichement du fief, comme qui diroit éclipsement d’une partie du fief ; celle de Boulogne dit éclécher.

Les coûtumes d’Anjou, du Maine, & de Touraine, appellent dépié de fief ce que nous appellons démembrement.

Mais le démembrement, & le jeu même excessif de fief, sont deux choses fort différentes, quoique quelques auteurs ayent confondu le jeu excessif de fief avec le démembrement.

Le jeu de fief est lorsque le vassal aliene une partie de son fief sans en former un fief séparé & indépendant du sien, au lieu que le démembrement est lorsque d’un fief on en fait plusieurs séparés & indépendans les uns des autres. Voyez Fief &.

Par l’ancien usage des fiefs le vassal ne pouvoit disposer d’aucune portion de son fief sans la permission & le consentement de son seigneur, parce qu’alors les fiefs n’étoient donnés qu’à vie, & après la mort du vassal, soit qu’il eût des enfans ou non, le fief retournoit au seigneur qui l’avoit donné, au moyen de quoi tout démembrement de fief étoit alors prohibé.

Quoique les fiefs soient devenus depuis héréditaires, néanmoins les seigneurs dominans ont conservé autant qu’ils ont pû les fiefs de leurs vassaux dans leur intégralité, soit afin que la dignité du fief ne soit pas diminuée, soit afin que le revenu du fief ne soit pas non plus diminué, & que le vassal soit plus en état de secourir son seigneur ; car c’étoit anciennement une condition imposée à la plûpart des fiefs, que le vassal étoit obligé de secourir son seigneur en cas de guerre générale ou privée : tels sont les motifs qui ont fait défendre le démembrement de fief dans la plûpart des coûtumes.

Présentement que les guerres privées sont défendues, & que le service militaire ne peut plus être dû qu’au roi, le démembrement ne laisse pas d’être toûjours défendu, & singulierement pour les fiefs de dignité, tels que les principautés, duchés, comtés, marquisats, & baronies ; ce qui tire son origine de la loi salique, où il est dit que ces fiefs ne se démembrent pas.

La coûtume de Paris, art. 51. porte que le vassal ne peut démembrer son fief au préjudice & sans le consentement de son seigneur, mais qu’il peut seulement se joüer de son fief, sans payer aucun profit au seigneur dominant, pourvû que l’aliénation n’excede pas les deux tiers, & qu’il retienne la foi entiere, & quelque droit seigneurial & domanial sur ce qu’il aliene.

L’ancienne coûtume contenoit déjà la même prohibition.

Elle est aussi portée dans plusieurs autres coûtumes.

Il y a néanmoins plusieurs coûtumes qui autorisent le démembrement de fief, proprement dit : telles sont les coûtumes de Picardie & d’Artois ; mais la