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On lit dans les Prorrhétiques, lib. III. que « les déjections qui finissent par être de matiere pure & bilieuse, annoncent l’augmentation de la maladie » ; &, comme le prétend Galien, la rendent beaucoup plus fâcheuse : aussi sont-elles regardées à juste raison comme un très-mauvais signe dans les maladies aigues, parce qu’elles indiquent une très grande ardeur dans le corps, qui consume les sérosités des humeurs qui pourroient se mêler avec elles. Si elles sont encore écumeuses, elles dénotent une chaleur colliquative, selon les prénotions coaques.

La mauvaise odeur extraordinaire des excrémens est toûjours un mauvais signe, dit Galien dans le septieme livre des Epid. parce qu’elle indique une grande corruption des humeurs. Hippocrate la regarde comme un présage de mort, lorsqu’elle est jointe avec la couleur livide ou noire des excrémens. Prognost. liv. II.

« Si les déjections sont abondantes & fréquentes, il y a danger de défaillance prochaine. Voyez les prénotions coaques. Une déjection liquide qui se fait abondamment & tout-à-la-fois, & celle qui se fait peu-à-peu, sont toutes les deux mauvaises, parce que l’une & l’autre épuisent les forces & accablent la nature. » Prognost. liv. II.

Les déjections trop peu abondantes sont inutiles & de mauvais signe, parce qu’elles ne suffisent pas pour détruire la cause morbifique, & qu’elles annoncent la foiblesse de la nature qui tente de l’évacuer, & succombe. Dans les Epidémies d’Hippocrate.

Cet article ne finiroit point, si on exposoit tout ce que cet auteur dit à ce sujet ; ce qui est rapporté ici, suffit pour faire voir au lecteur comment il traite en maître ces matieres, & combien il est important d’observer exactement tout ce qui a rapport aux déjections, sans troubler les opérations de la nature, en n’agissant que pour l’aider, & non pas pour procurer la guérison sans la consulter, & se concerter, pour ainsi dire, avec elle. Voyez sur cette matiere tous les traités des prognostics d’Hippocrate ; Galien sur le même sujet ; le commentaire des coaques par Duret ; Prosper Alpin, de præsag. vitâ & morte. Voyez Purgatifs, Purgations, Diarrhée, Dissenterie, Tenesme. (d)

DEJETTER, terme de Menuiserie & Charpent. il se dit des bois, lorsque par trop de sécheresse ou trop d’humidité, en renflant ou se resserrant, ils se courbent & se gauchissent.

DEJEÛNER, s. m. (Medecine.) jentaculum, petit repas que prennent le matin certaines personnes, & sur-tout les enfans : c’est l’ἀκρατισμός des Grecs, qui mangeoient à ces heures-là un morceau de pain trempé dans du vin pur.

Pour ce qu’il y a à observer, par rapport au régime, à l’égard de ce repas, voyez Hygiene, Regime. (d)

DÉIFICATION, s. f. terme du Paganisme ; cérémonie très-distinguée par laquelle on déïfioit les empereurs, c’est-à-dire qu’on les mettoit au rang des dieux, & on leur décernoit les honneurs divins. Voyez Dieu & Consecration. La déification est la même que l’apothéose. Voyez Apothéose. (G)

DÉINCLINANT ou DÉINCLINÉ, adj. (Gnom.) cadrans déinclinans ou déinclinés, sont ceux qui déclinent & inclinent ou reclinent tout-à-la-fois, c’est-à-dire qui ne passent ni par la ligne du zénith, ni par la commune section du méridien avec l’horison, ni par celle du premier vertical avec l’horison. Voyez Cadran.

Ces sortes de cadrans sont peu en usage, parce qu’ils sont peu commodes. On peut voir à l’article Declinaison, la maniere de trouver leur posi-

tion par rapport au premier vertical, à l’horison &

au méridien. (O)

DÉINSE, (Géog. mod.) petite ville de la Flandre autrichienne, située sur la Lys. Long. 21. 11. latit. 51. 59.

DEJOUER, terme de Marine, pour dire qu’un pavillon ou qu’une giroüette joue ou voltige au gré du vent. (Z)

DÉISME, s. m. (Théol.) doctrine de ceux dont toute la religion se borne à admettre l’existence d’un Dieu, & à suivre la loi naturelle. Voyez Déistes. (G)

DÉISTES, subst. m. pl. (Théolog.) nom qu’on a d’abord donné aux Anti-trinitaires ou nouveaux Ariens hérétiques du seizieme siecle, qui n’admettoient d’autre Dieu que Dieu le pere, regardant J. C. comme un pur homme, & le S. Esprit comme un simple attribut de la divinité. On les appelle aujourd’hui Sociniens ou Unitaires. Voyez Sociniens ou Unitaires.

Les Déistes modernes sont une secte ou sorte de prétendus esprits forts, connus en Angleterre sous le nom de free-thinkers, gens qui pensent librement, dont le caractere est de ne point professer de forme ou de système particulier de religion, mais de se contenter de reconnoître l’existence d’un Dieu, sans lui rendre aucun culte ni hommage extérieur. Ils prétendent que vû la multiplicité des religions & le grand nombre de révélations, dont on ne donne, disent-ils, que des preuves générales & sans fondement, le parti le meilleur & le plus sûr, c’est de se renfermer dans la simplicité de la nature & la croyance d’un Dieu, qui est une vérité reconnue de toutes les nations. Voyez Dieu & Revelation.

Ils se plaignent de ce que la liberté de penser & de raisonner est opprimée sous le joug de la religion révelée ; que les esprits souffrent & sont tyrannisés par la nécessité qu’elle impose de croire des mysteres inconcevables, & ils soûtiennent qu’on ne doit admettre ou croire que ce que la raison conçoit clairement. Voyez Mystere & Foi.

Le nom de Déistes est donné sur-tout à ces sortes de personnes qui n’étant ni athées ni chrétiennes, ne sont point absolument sans religion (à prendre ce mot dans son sens le plus général), mais qui rejettent toute révélation comme une pure fiction, & ne croyent que ce qu’ils reconnoissent par les lumieres naturelles, & que ce qui est crû dans toute religion, un Dieu, une providence, une vie future, des récompenses & des châtimens pour les bons & pour les méchans ; qu’il faut honorer Dieu & accomplir sa volonté connue par les lumieres de la raison & la voix de la conscience, le plus parfaitement qu’il est possible, mais que du reste chacun peut vivre à son gré, & suivant ce que lui dicte sa conscience.

Le nombre des Déistes augmente tous les jours. En Angleterre la plûpart des gens de lettres suivent ce système, & l’on remarque la même chose chez les autres nations lettrées. On ne peut cependant pas dire que le déisme fasse secte & corps à part. Rien n’est moins uniforme que les sentimens des Déistes ; leur façon de penser, presque toûjours accompagnée de pyrrhonisme, cette liberté qu’ils affectent de ne se soûmettre qu’aux vérités démontrées par la raison, font qu’ils n’ont pas de système commun, ni de point bien fixe dont tous conviennent également : c’est pourquoi les auteurs qui les ont combattus, distinguent différentes especes de Déistes.

Abbadie les divise en quatre classes : 1°. ceux qui se font une idée bisarre de la divinité : 2°. ceux qui ayant une idée de Dieu, qui avoit paru d’abord assez juste, lui attribuent de ne prendre aucune connoissance de ce qui se fait sur la terre : 3°. ceux qui