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partie ; le trou bredouille & la partie bredouille valent deux trous, deux parties. On marque qu’on a la bredouille, c’est-à-dire qu’on a pris ce qu’on a de points sans interruption, avec un jetton qu’on prend ou qu’on ôte, selon qu’il convient. V. Trictrac.

* DEBRIDER, terme de Carrier, c’est détacher le cable de dessus la pierre, lorsqu’elle est arrivée au haut de la carriere. Il se dit aussi de l’action de disposer mieux ce cable sur la pierre au fond de la carriere, lorsqu’on s’apperçoit dans les premiers mouvemens de la roue qui doit l’enlever, ou que le cable se dérange ou qu’il a été mal disposé. La paresse de debrider a quelquefois coûté cher aux ouvriers ; ils ont perdu la vie pour avoir voulu ménager un quart-d’heure de tems.

Debrider, v. act. (Manege.) c’est ôter la bride. Voyez Bride.

DEBRIGUER le fief, (Jurisprud.) ce terme est usité en Savoie, pour dire vérifier si l’héritage contentieux est dans l’étendue du fief d’un seigneur ou d’un autre ; c’est proprement dégager le fief de la contestation qui le tenoit en suspens. Voyez le traité des fiefs de M. Guyot, tom. III. tit. du droit de quint, ch. xjv. p. 560. & ci-après au mot Desimbringuer, dont debriguer paroît avoir été formé par corruption ou contraction. (A)

DEBRIS, DECOMBRES, RUINES, (Gramm. Syn.) ces trois mots signifient en général les restes dispersés d’une chose détruite, avec cette différence que les deux derniers ne s’appliquent qu’aux édifices, & que le troisieme suppose même que l’édifice ou les édifices détruits soient considérables. On dit les debris d’un vaisseau, les décombres d’un bâtiment, les ruines d’un palais ou d’une ville. Decombres ne se dit jamais qu’au propre ; debris & ruine se disent souvent au figuré ; mais ruine, en ce cas, s’employe plus souvent au singulier qu’au plurier ; ainsi on dit les debris d’une fortune brillante, la ruine d’un particulier, de l’état, de la religion, du commerce : on dit aussi quelquefois, en parlant de la vieillesse d’une femme qui a été belle, que son visage offre encore des belles ruines. (O)

Debris, s. m. plur. (Marine.) ce sont les pieces d’un vaisseau qui a fait naufrage, celles d’un vieux bâtiment qu’on a dépecé.

Il signifie aussi les effets naufragés que la mer jette sur le rivage, ou qu’on trouve en plaine mer.

En terme de Marine on dit ordinairement bris, & ce mot est employé dans l’ordonnance touchant la Marine de 1681, au livre IV. tit. jx. des naufrages, bris, & échouemens. Ce titre renferme quarante-cinq articles, dans lesquels sont reglés tout ce qui concerne les naufrages & les suites qui en peuvent résulter, soit pour les secours à donner, soit pour retirer les marchandises, les conserver aux propriétaires, &c. On croit inutile de transcrire ici tout cet article de l’ordonnance, auquel on aura recours en cas de besoin. (Z)

DEBRUTIR ou DEBROUTIR, en termes de Miroitier, c’est commencer à dégrossir les glaces de miroirs. Voyez Glace.

DEBRUTISSEMENT, s. m. signifie l’art d’adoucir ou de polir jusqu’à un certain point la surface d’un corps solide, & sur-tout les glaces, miroirs, &c. Voyez Miroir.

Suivant la nouvelle méthode de faire de grandes glaces en les jettant, pour ainsi dire, en moule, à-peu-près de la même maniere que l’on jette le plomb & d’autres métaux, comme il sera dit à l’article Verrerie, leur surface demeurant inégale & raboteuse, elles ont besoin d’être debrutées & polies.

Pour cet effet, la piece de glace se met horisontalement sur une pierre en forme de table, & on la scelle en plâtre ou en mastic afin de l’assûrer davan-

tage, & qu’elle ne branle & ne se déplace point par l’effort de l’ouvrier, ou de la machine dont il se sert pour la débrutir. On met autour une forte bordure de bois qui soûtient la glace, & qui est d’un pouce ou deux plus haut qu’elle. Le fond ou la base de la machine avec laquelle on débrutit, est une autre glace brute qui a environ la moitié des dimensions de l’autre : on y attache une planche avec du ciment : on charge cette planche d’un poids nécessaire pour faciliter le frottement, & on lui donne du mouvement par le moyen d’une roüe ; cette roüe qui a au moins 5 ou 6 pouces de diametre, est faite d’un bois fort dur & fort leger : elle est maniée par deux ouvriers qui sont places l’un vis-à-vis de l’autre, & qui la poussent & la tirent alternativement, desorte cependant qu’ils la font tourner quelquefois en rond suivant que l’opération le demande : par ces moyens il y a une attrition constante & réciproque entre les deux glaces, laquelle est facilitée encore par l’eau & le sable que l’on y employe. A mesure que l’ouvrage s’avance on se sert de sable plus menu, & enfin on prend de la poudre d’émeri.

Il n’est pas nécessaire d’ajoûter que la petite glace supérieure venant à se polir à mesure par l’attrition, il faut en prendre de tems en tems une autre plus brute : mais il faut observer que l’on ne debrutit ainsi par le moulin que les plus grandes pieces de glace ; car pour ce qui est des pieces de la moyenne & de la petite espece, on les travaille à la main, & pour cet effet on attache aux coins de la planche qui couvre la glace supérieure, quatre ances de bois que les ouvriers empoignent pour lui donner les mouvemens nécessaires.

Ce qui reste à faire pour donner la derniere perfection aux glaces, est rapporté sous l’article polissure. Voyez. Chambers.

DEBUCHER, v. n. (Venerie.) On dit débucher le cerf, c’est le faire sortir du buisson, de son fort.

DEBUT, s. m. il se dit en général ou d’une action que l’on fait pour la premiere fois, ou du commencement d’une action : ainsi on dit d’une actrice, elle debutera dans cette piece ; d’un orateur, beau debut ! il ne prévient pas par son debut, &c.

DECADE, s. f. (Arithm. & Hist.) Quelques anciens auteurs d’Arithmétique se sont servis de ce mot pour désigner ce que nous appellons aujourd’hui dixaine ; il est formé du mot latin decas, dérivé lui-même d’un mot grec qui signifie la même chose. On ne se sert plus de ce mot que pour désigner les dixaines de livres dans lesquelles on a partagé l’histoire romaine de Tite Live. Il ne nous reste plus de cet ouvrage, qui contenoit quatorze décades, que trois décades & demie. La seconde décade, qui contenoit entr’autres l’histoire de la premiere guerre Punique, est perdue ; de sorte que la décade appellée aujourd’hui la seconde, est réellement la troisieme. On a avancé sans aucun fondement, que cette décade perdue existoit dans la bibliotheque des empereurs de Constantinople. Dans ce qui nous reste de Tite Live, le style paroît se ressentir des différens âges où il peut avoir composé. La premiere décade, qu’il a écrite étant plus jeune, est d’un style plus orné & plus fleuri ; la seconde est d’un style plus ferme & plus mâle ; le style de la troisieme est plus foible. On regarde cet historien comme le premier des historiens latins ; cependant il n’est pas douteux que Tacite ne lui soit fort supérieur dans le grand art de démêler & de peindre les hommes, qui est sans contredit la premiere qualité de l’historien : & pour ce qui concerne le style, il paroît que la narration de Salluste, sans être trop coupée, est encore plus énergique & plus vive. A l’égard de la véracité, on lui a reproché d’être trop partial en faveur des Romains ; on peut en voir un exemple dans l’excel-