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ils prennent le plomb fondu : la seconde est la cuiller percée ; ils s’en servent pour écumer le plomb ; ce n’est à proprement parler qu’une vieille poële à laquelle on a fait des trous ; la troisieme est la cuiller à souder ; elle est ronde & profonde, & a d’un côté de sa circonférence un bec par lequel on verse le plomb fondu : c’est dans cette cuiller que les Plombiers fondent leur soudure, & même aussi leur plomb, quand ils n’ont que de petits ouvrages à faire. Voyez les figures 2 & 3, Pl. III. du Plombier ; la derniere représente l’écumoire.

Cuiller à jetter en moule, (Potier d’étain.) c’est une cuiller de fer dont se servent les Potiers d’étain pour cet usage. Il en faut de différentes grandeurs : on en trouve chez les Quincaillers qui tiennent depuis une demi-livre d’étain jusqu’à vingt livres & plus.

CUIR fossile, (Hist. nat. Minéral.) aluta montana, corium fossile, C’est une espece d’amiante fort légere : les fibres ou filets qui composent cette pierre font flexibles, & s’entrelacent de maniere qu’ils forment comme des feuillets. M. Wallerius en distingue deux variétés ; la premiere est le cuir fossile grossier ; la seconde est le cuir fossile fin : ce dernier est composé de feuillets fort minces qui le font ressembler à du papier gris, ce qui fait qu’on le nomme aussi papier fossile (papyrus montana). Voyez la minéralogie de Wallerius, tome I. pag. 266 & suiv. (—)

Cuir, s. m. (Tanneur.) c’est la peau des animaux différemment préparée, suivant les divers usages qu’on en veut faire. Voyez Peau & Tanner.

Les cuirs ont divers noms, qu’ils prennent ou de l’état actuel où ils sont, ou de leurs différentes especes, qualité, & apprêts.

Cuir corroyé, est un cuir qui après avoir été pelé, coudré, & tanné, a passé par les mains du corroyeur, qui lui a donné les dernieres préparations, pour le disposer à être employé par ceux qui le mettent en usage. Voyez Corroyer.

Cuir verd ou crud, est celui qui n’a reçû aucune préparation, étant encore tel qu’il a été levé par le boucher de dessus le corps de l’animal. Voyez Boucher.

Cuir salé, est un cuir verd qu’on a salé avec du sel marin & de l’alun, ou avec du salpetre, pour empêcher qu’il ne se corrompe, soit en le gardant trop long-tems dans les caves, soit en le transportant dans les tanneries éloignées pendant les grandes chaleurs.

Cuirs secs à poils ; ce sont pour l’ordinaire des peaux de bœufs, de vaches, ou de bufles, qu’on nous apporte de l’Amérique. Voyez Bufle & Boucannier.

Cuir tanné, est un cuir verd, ou salé, ou sec, dont on fait tomber le poil dans le plain par le moyen de la chaux détrempée avec de l’eau, & qui a été mis ensuite dans la fosse au tan. Voyez Tanner.

Cuir plaqué, est un cuir fort ou gros cuir, qui après avoir été tanné a été séché à l’air, & nettoyé dans son tan.

Les Tanneurs mettent ces sortes de cuirs dans des lieux ni trop humides ni trop secs, bien étendus & empilés les uns sur les autres, avec de grosses pierres ou poids par-dessus pour les bien redresser & applatir ; & c’est cette derniere façon qui leur a fait donner le nom de cuirs plaqués.

Cuir coudré, ou cuir passé en coudrement ; c’est un cuir de vache, de cheval, ou de veau, qu’on a étendu dans une cuve où l’on a jetté de l’eau chaude & & du tan par-dessus, pour le rougir ou coudrer, & pour lui donner le grain.

On ne donne cet apprêt au cuir qu’après l’avoir fait passer par le plain, & avant de le mettre dans la fosse avec le tan. Voyez le diction. du Comm.

Cuir fort ; ce sont de gros cuirs tels que ceux de bœufs, vaches, original, & autres qui ont été préparés dans le plain avec la chaux, & ensuite dans la fosse avec le tan. On les appelle forts, pour les distinguer des autres cuirs plus foibles, comme ceux de veaux, de moutons, d’agneaux, de chevres, & autres semblables.

Les cuirs de vaches tannés en fort, sont ceux qu’on n’a pas passés en coudrement, mais qui ont été tannés à la maniere des cuirs forts. Voyez Tanner.

Cuir doré ; on appelle ainsi une espece de tapisserie faite de cuir, où sont représentées en relief diverses sortes de grotesques relevées d’or, d’argent, de vermillon, ou de différentes autres couleurs.

Cette tapisserie est composée de plusieurs peaux de mouton passées en basanne, coupées en feuilles quarrées, qu’on a cousues les unes avec les autres après leur avoir donné une nouvelle préparation, qui les a disposées à recevoir le relief, l’or, l’argent, les couleurs, & le vernis dont les ouvriers les enrichissent.

Les lieux de France où il se fabrique le plus de tapisserie de cuir doré, sont Paris, Lyon, & Avignon ; il en vient aussi beaucoup de Flandres, qui se manufacturent presque toutes à Lille, à Bruxelles, à Anvers, & à Malines ; celles de cette derniere ville sont les plus estimées de toutes.

Plusieurs prétendent que les premieres tapisseries de cuir doré qui ont parû en France venoient d’Espagne, & que ce sont les Espagnols qui en ont inventé la fabrique : cependant il ne s’en voit plus en France de leur manufacture, soit qu’ils ayent discontinué, ou qu’ils l’ayent transportée en Flandre. Dictionn. du Comm.

Cuir de poule, (Gantier.) peau très-mince dont ces ouvriers font des gants de femme.

Cuir de Hongrie, (Hongrieur.) c’est une espece de cuir qui tire son nom des Hongrois, qui seuls avoient autrefois le secret de le préparer.

Il n’y a pas long-tems que l’on connoît en France la maniere de préparer le cuir de Hongrie. On prétend que ce fut Henri IV. qui en établit la premiere manufacture ; pour cet effet il envoya en Hongrie un tanneur fort habile nommé Roze, qui ayant decouvert le secret, revint en France, où il fabriqua cette espece de cuir avec beaucoup de succès.

Maniere de fabriquer les cuirs d’Hongrie. Toutes sortes de cuirs de bœufs, de vaches, de chevaux, & de veaux, sont propres à recevoir cet apprêt ; mais il s’en fabrique plus de ceux de bœufs que d’autres. Les peaux de bœufs étant arrivées de la boucherie, on en coupe les cornes, & on les fend en deux bandes de la tête à la queue ; après quoi on les écharne sur un chevalet avec un instrument appellé une faux, qui est emmanché par un bout, en prenant bien garde de ne point enlever la fleur du cuir. Voyez la figure 6. Planche de l’Hongrieur. Ensuite on les jette dans la riviere pour y être rincés, dans laquelle néanmoins elles ne doivent pas séjourner long-tems, de crainte que le gravier ne s’y attache. On les retourne de tems en tems avec une longue pince de fer, afin d’en ôter le plus gros du sang qui peut y être resté, & en même tems d’humecter le poil. Après les avoir tirés de la riviere, on les étend cinq ou six à la fois sur un chevalet, le côté de la chair en-dessous, & alors on en rase le poil avec une faux que l’on a soin d’éguiser de tems en tems avec le queux : cela fait, on les rejette encore dans la riviere, où on les laisse boire pendant deux jours plus ou moins, selon le tems, afin d’en faire sortir tout le reste du sang. Cette opération s’appelle désaigner ; ensuite on les tire de l’eau, on les roule, & dans cet état on les met égoutter sur un banc pendant un tems suffisant, & jusqu’à ce qu’il n’en sorte plus d’eau.