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autre tous les deux mois par les jurés Corroyeurs & Cordonniers, chez les maîtres Cordonniers.

Il y a encore deux autres jurés pour la marque des cuirs, qu’on appelle les jurés du marteau.

La discipline de cette communauté est à-peu-près la même que celle de toutes les autres communautés.

CORRUCHE, (Géog. mod.) petite ville de Portugal dans l’Estramadoure, sur une riviere de même nom.

CORRUGATEUR, s. m. (Anat.) muscle qui sert au froncement des sourcils. Voyez Sourcils.

CORRUPTIBLE, adj. designe, au Moral, ce qui peut être corrompu ; au Physique, ce qui peut se corrompre. Voyez Corruption.

* CORRUPTEUR, s. m. (Morale.) ne se prend plus qu’au figuré ; celui qui porte dans les mœurs d’un autre la dépravation qui regne dans les siennes.

CORRUPTICOLES, s. m. pl. (Hist. ecclés.) sont des hérétiques Eutychiens qui parurent vers l’an 531 de Jesus-Christ, & qui eurent pour chef Severe, faux patriarche d’Alexandrie.

Cette secte naquit en Egypte ; car Severe s’étant retiré à Alexandrie y soûtint, que le corps de Jesus-Christ étoit corruptible, que les peres l’avoient reconnu, & que le nier, c’étoit nier la vérité de la passion du Sauveur.

D’un autre côté Julien d’Halicarnasse, autre Eutychien aussi refugié en Egypte, soûtenoit que le corps de Jesus-Christ a toûjours été incorruptible ; que de dire qu’il étoit corruptible, c’étoit admettre de la distinction entre Jesus-Christ & le Verbe, & par conséquent deux natures en Jesus-Christ. Voyez Eutychien.

Le peuple d’Alexandrie se partagea entre ces deux opinions : les partisans de Severe furent appellés Corrupticoles, c’est-à-dire adorateurs du corruptible ; & ceux de Julien, Incorruptibles ou Phantasiastes. Le clergé d’Alexandrie & les puissances séculieres favoriserent les premiers ; mais les moines & le peuple tinrent pour les seconds. Dict. de Trév. (G)

CORRUPTION, s. f. en Philosophie, est l’état par lequel une chose cesse d’être ce qu’elle étoit ; on peut dire que le bois est corrompu, quand nous ne le voyons plus subsister, & qu’au lieu du bois nous trouvons du feu : de même l’œuf est corrompu, quand il cesse d’être un œuf & que nous trouvons un poulet à sa place ; car corruption n’est pas pris ici dans le sens vulgaire. De là cet axiome de Philosophie, que la corruption d’une chose est la génération d’une autre.

La corruption differe donc de la génération, comme deux contraires different l’un de l’autre.

Elle differe de l’altération, comme un plus grand d’un moindre, ou comme le tout de sa partie. Une chose est dite altérée lorsqu’elle n’est pas tellement changée qu’on ne la puisse reconnoître, & qu’elle conserve encore son ancien nom : mais après la corruption, ni l’un ni l’autre ne subsistent plus. Voyez Altération.

Mais comme dans la génération aucune matiere n’est véritablement créée, ainsi dans la corruption rien n’est réellement anéanti, que cette modification particuliere qui constituoit la forme d’un être, & qui le déterminoit à être de telle ou telle espece. Voyez Forme & Génération. Chambers.

Les anciens croyoient que plusieurs insectes s’engendroient par corruption. On regarde aujourd’hui cette opinion comme une erreur, quoiqu’elle paroisse appuyée par des expériences journalieres. En effet, ce qui se corrompt produit toûjours des vers : mais ces vers n’y naissent, que parce que d’autres insectes y ont déposé leurs œufs. Une expérience sensible prouve cette vérité.

Prenez du bœuf tout nouvellement tué ; mettez-en un morceau dans un pot découvert, & un autre

morceau dans un pot bien net, que vous couvrirez sur le champ avec une piece d’étoffe de soie, afin que l’air y passe sans qu’aucun insecte y puisse déposer ses œufs. Il arrivera au premier morceau ce qui est ordinaire ; il se couvrira de vers, parce que les mouches y font leurs œufs en liberté ; l’autre morceau s’altérera par le passage de l’air, se flétrira, se reduira en poudre par l’évaporation ; mais on n’y trouvera ni œufs, ni vers, ni mouches. Tout au plus les mouches attirées par l’odeur viendront en foule sur le couvercle, essayeront d’entrer, & jetteront quelques œufs sur l’étoffe de soie, ne pouvant entrer plus avant. Au fond, il est aussi absurde, selon M. Pluche, de soûtenir qu’un morceau de fromage engendre des mites, qu’il le seroit de prétendre qu’un bois ou une montagne engendrât des cerfs ou des éléphans. Car les insectes sont des corps organisés, & aussi fournis des différentes parties nécessaires à la vie, que le sont les corps des plus gros animaux.

Cependant quelques philosophes modernes paroissent encore favorables à l’opinion ancienne de la génération par corruption, du moins en certains cas. M. de Buffon, dans son histoire naturelle, pag. 320. II. vol. paroît incliner à cette opinion. Après avoir exposé son système des molécules organiques, dont il sera parlé à l’article Génération, il en conclut qu’il y a peut-être autant d’êtres, soit vivans soit végétans, qui se produisent par l’assemblage fortuit des molécules organiques, qu’il y en a qui se produisent par la voie ordinaire de la génération ; c’est, dit-il, à la production de cette espece d’êtres qu’on doit appliquer l’axiome des anciens, corruptio unius generatio alterius. Les anguilles qui se forment dans la colle faite avec de la farine, n’ont pas d’autre origine, selon lui, que la réunion des molécules organiques de la partie la plus substantielle du grain. Les premieres anguilles qui paroissent, dit-il, ne sont certainement pas produites par d’autres anguilles ; cependant quoique non-engendrées, elles en engendrent d’autres vivantes. On peut voir sur cela un plus grand détail dans l’endroit que nous abrégeons. On ne peut nier que généralement parlant les particules qui composent un insecte, ne puissent être rassemblées par une autre voie que par celle de la génération : du moins nous connoissons trop peu les voies & le méchanisme de la Nature, pour avancer là-dessus une assertion trop exclusive. Il est certain par l’expérience, que dans la plûpart des cas où les insectes paroissent engendrés par corruption, ils le sont par génération ; mais est-il démontré dans tous les cas, que la corruption ne puisse jamais engendrer de corps animé ? c’est ce qu’il faut bien se garder d’affirmer d’une maniere positive. Au reste, M. de Buffon lui-même avoüe qu’il lui faudroit plus d’observations pour établir entre ces êtres ainsi engendrés, des classes & des genres. (O)

Corruption des humeurs, (Pathologie.) expression qui désigne un vice imaginaire, si on l’employe comme synonyme de putréfaction, ou même d’acrimonie, dans l’histoire des maladies ou des affections contre-nature de l’animal vivant ; expression fausse ou peu exacte, prise dans le même sens qu’abberration, ou état contre-nature des humeurs de l’animal vivant, parce qu’elle semble trop spécifier ou n’être pas assez générale. Voyez Acrimonie des humeurs au mot Humeurs. (b)

* Corruption publique, (Politiq. & Morale.) elle a deux sources ; l’inobservation des bonnes lois ; l’observation de lois mauvaises. Il m’a toûjours semblé plus difficile de faire observer rigoureusement de bonnes lois, que d’en abroger de mauvaises. L’abrogation est l’effet de l’autorité publique. L’observation est l’effet de l’intégrité particuliere.

Corruption du sang, (Hist. mod.) Les An-