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variété du précédent, dont il ne differe qu’en ce que sa fleur sort d’une enveloppe qui est rouge, & qui contribue à la beauté de cet arbrisseau.

Le petit cornouiller de Virginie. C’est en effet un petit arbrisseau qui ne s’éleve guere qu’à quatre ou cinq piés, & qui n’est pas robuste. Il lui faut l’orangerie pour passer l’hyver, à moins que de le placer contre un mur bien exposé, où il ne pourroit toûjours résister qu’aux hyvers ordinaires. Sa feuille est grande, & sa fleur assez belle.

Le sanguin, est un arbrisseau très-commun dans les bois, dans les haies, & dans les places incultes, où je l’ai vû s’élever quelquefois à dix piés. Sa tige est droite, menue, & égale ; l’écorce de ses jeunes rameaux est d’un rouge vif & foncé, qui a fait donner à cet arbrisseau le nom de sanguin. Sa fleur, qui est blanche, vient en ombelle au bout des nouvelles branches, & paroît au commencement du mois de Juin. Les baies qui succedent sont noires dans leur maturité, un peu ameres, & de fort mauvais goût ; tout le parti qu’on en peut tirer, c’est d’en faire de l’huile qui est propre à brûler, suivant que je m’en suis assûré par plusieurs épreuves. Son bois est blanc, compacte, pas si dur que celui du cornouiller, & bien moins volumineux. Cet arbrisseau vient partout, & se multiplie plus qu’on ne veut.

Voici les différentes especes de sanguin.

Le sanguin commun. C’est à cette espece qu’on doit appliquer ce qui vient d’être dit du sanguin en général.

Le sanguin à feuille panachée. C’est une variété de l’espece commune, dont on fait peu de cas.

Le sanguin à fruit blanc. Autre variété qui ne s’étend que sur la couleur du fruit.

Le sanguin de Virginie à feuille de laurier. On trouve dans tous les pays septentrionaux de l’Amérique cet arbrisseau, dont le fruit est d’une couleur bleue-noirâtre. Il ne s’éleve qu’à la hauteur de notre sanguin commun.

Le sanguin de Virginie à feuille étroite. C’est une variété qui ne differe de l’arbrisseau précédent que par la figure de la feuille.

Le sanguin d’Amérique à feuille blanche. C’est un bel arbrisseau, qui peut infiniment contribuer à l’ornement d’un jardin, par la blancheur singuliere de ses feuilles qui se font remarquer au printems, par les bouquets de fleurs blanches qui l’embellissent durant l’été, par les grandes grappes de ses baies bleues qui toute l’automne sont d’un bel aspect, & par la couleur rouge & vive de l’écorce de ses rameaux qui le distinguent pendant l’hyver. (c).

CORNOUILLES, s. f. pl. (Mat. medic. & Diete.) Le fruit du cornouiller est aigre, acerbe, & styptique, lorsqu’il n’est pas parfaitement mûr. On peut l’employer dans cet état, sur-tout extérieurement, comme la plûpart des autres vrais styptiques tirés des végétaux. Il s’adoucit beaucoup en mûrissant ; alors il n’est qu’aigrelet, & assez agréable à manger, & beaucoup de gens le croyent propre à arrêter le cours de ventre. Hippocrate, Dioscoride, & Pline, lui accordent cette propriété.

On peut préparer un rob de cornouilles qui aura les propriétés du fruit ; mais cette préparation est peu en usage.

La pharmacopée de Paris met au nombre des eaux distillées celle des fruits du cornouiller ; mais cette eau doit être absolument rangée dans la classe de celles qui sont exactement inutiles. Voyez Eau distillée. (b)

CORNU, sub. m. (Comm. & Monnoie.) monnoie battue sous Philippe-le-Bel. Il y en avoit de deux sortes, le parisis & le tournois ; celui-ci pesoit vingt-un grains, avoit trois deniers dix-huit grains de loi, & valoit un denier tournois ; l’autre étoit de vingt grains, & de trois deniers douze grains de loi, &

valoit un denier parisis. Voyez le dictionn. de Trév. & Ducange, au mot moneta.

Cornu, adj. (Marechall.) un cheval cornu est celui dont les os des hanches s’élevent aussi haut que le haut de la croupe. Voyez Hanche & Croupe. (V)

CORNUAU, s. m. (Pêche.) poisson très-ressemblant à l’alose, & qui remonte la Loire avec elle ; il est seulement plus court ; mais il s’en manque beaucoup que ce soit un aussi bon manger : l’alose est le mets des friands ; le cornuau, celui des paysans & des ouvriers.

CORNUE, s. f. (Chimie.) La cornue est une sorte de vaisseau destiné à faire la distillation appellée per latus, d’une figure quelquefois ronde, & quelquefois un peu oblongue, & portant à sa partie supérieure un cou recourbé, de maniere que ce vase étant posé sur sa base dans le fourneau de reverbere ou sur le bain de sable, de limaille, &c. puisse excéder la paroi du fourneau de cinq ou six pouces, pour pouvoir entrer commodément dans un autre vaisseau appellé récipient. Voyez Récipient. On donne à la cornue assez communément le nom de retorte, sans doute à cause de la courbure du cou ; & il y a grande apparence que le nom de cornue a été donné à ce vaisseau, ou parce que le cou a la figure d’une corne, ou bien parce que le vaisseau entier ressemble assez à une cornemuse. Voyez la Planche.

Les cornues sont ordinairement de terre ou de verre ; on se sert quelquefois aussi de cornues de fer fondu.

Les cornues de terre sont de tous les instrumens chimiques celui dont l’usage est le plus fréquent, toutes les fois qu’on veut soûmettre à la distillation une substance qui demande le degré de feu supérieur à l’eau bouillante, pour donner les produits qu’on se propose d’en retirer ; la retorte de terre est le vaisseau le plus propre à cette opération. Or le cas se présente très-communément dans l’analyse par le feu des substances végétales & animales, dans la préparation des huiles empyreumatiques végétales & animales, dans celle des sels volatils végétaux & animaux. C’est aussi avec cet instrument que l’on distille les acides minéraux, & l’acide végétal combiné avec une substance saline, terreuse, ou métallique, &c. que l’on retire le soufre de différentes pyrites, le mercure du cinnabre, l’arsenic du cobolt, le phosphore des matieres qui en fournissent, &c.

Les cornues de terre étant non-seulement destinées à être exposées à un degré de feu supérieur à l’eau bouillante, mais encore quelquefois à supporter ce dernier degré jusqu’à son extrème, c’est-à-dire le feu le plus violent que nous puissions faire dans nos fourneaux, doivent nécessairement être faites d’une matiere capable de résister à ce degré de feu qui vitrifie les métaux imparfaits, & généralement toutes les terres qui sont tant soit peu fusibles. Il faut pour cela qu’elles soient faites d’une bonne terre glaise, qu’elles soient aussi minces qu’il sera possible, & qu’elles soient cuites au point qui fait donner le nom de grais à la terre cuite. A la vérité tout grais ne seroit pas bon à être employé en cornue ; celui qui est trop cuit, & presque vitrifié, est trop cassant ; & malgré le lut dont on l’enduit, & les précautions qu’on prend pour l’échauffer peu-à-peu, on ne parvient que très-difficilement à lui faire soûtenir le feu, il faut donc que nos cornues soient suffisamment cuites (ce qui les empêche d’être poreuses, & les rend propres à supporter le plus grand feu), mais qu’elles ne soient pas trop vitrifiées. Celles qui nous viennent des environs de Beauvais en Picardie, sont excellentes ; elles ne sont point du tout poreuses ; elles s’échauffent assez facilement sans se fêler, & supportent le dernier degré de feu (M. Rouelle s’en sert