Page:Diderot - Encyclopedie 1ere edition tome 4.djvu/171

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

ne les indispose plus contre nous. La conversation est peut être la circonstance où nous sommes le moins les maîtres de cacher notre amour-propre ; & il y a toûjours à perdre pour lui à mortifier celui des autres ; parce que ce dernier cherche à se venger, qu’il est ingénieux à en trouver les moyens, & que pour l’ordinaire il les trouve sur le champ ; car qui est-ce qui ne prête pas par cent endroits des armes à l’amour-propre d’autrui ? C’est encore un défaut qu’il faut éviter, de parler en conversation comme on feroit à des lecteurs, & d’avoir ce qu’on appelle une conversation bien écrite. Une conversation ne doit pas plus être un livre, qu’un livre ne doit être une conversation. Ce qu’il y a de singulier, c’est que ceux qui tombent dans le premier de ces défauts, tombent ordinairement dans le second ; parce qu’ils ont l’habitude de parler comme ils écriroient, ils s’imaginent devoir écrire comme ils parleroient. On ne sauroit être trop sur ses gardes quand on parle au public, & trop à son aise avec ceux qu’on fréquente. Voyez Affectation. (O)

CONVERSE, adj. en Géométrie. Quand on met en supposition une vérité que l’on vient de démontrer, pour en déduire le principe qui a servi à sa démonstration, c’est-à-dire quand la conclusion devient principe & le principe conclusion, la proposition qui exprime cela s’appelle la converse de celle qui la précede.

Par ex. on démontre en Géométrie que si les deux côtés d’un triangle sont égaux, les deux angles opposés à ces côtés le sont aussi ; & par la proposition converse, si les deux angles d’un triangle sont égaux, les côtés opposés à ces angles le seront aussi.

La converse s’appelle aussi inverse. Il y a plusieurs propositions dont l’inverse n’est pas vraie : par exemple cette proposition, les trois côtés d’un triangle étant donnés, on peut connoître les trois angles, est vraie & facile à démontrer, mais son inverse seroit fausse ; les trois angles étant donnés, on connoît les trois côtés ; car il y a une infinité de triangles qui peuvent avoir les mêmes angles, sans avoir les mêmes côtés. Voyez Triangles semblables. C’est à quoi les faiseurs d’élémens de Géométrie doivent être fort attentifs pour ne pas induire en erreur les commençans. (O)

CONVERSION DES PROPOSITIONS, (Log.) voyez Proposition.

Conversion, s. f. On se sert en Arithmétique, de l’expression, proportion par conversion de raison, pour signifier la comparaison de l’antécédent, avec la différence de l’antécédent & du conséquent dans deux raisons égales.

Par exemple, y ayant même raison de 2 à 3 que de 8 à 12, on en conclud qu’il y a aussi même raison de 2 à 1 que de 8 à 4 ; c’est-à-dire en général que si a : bc : d, on en conclud que a : b − ac : d − c, ce qui est évident ; car ad = bc donne ad − ac = bc − ac, & par conséquent a : b − ac : d − c. Voyez Antécédent, Conséquent, Raison, &c. (O)

Conversion des Equations, en Algebre, se dit de l’opération qu’on fait lorsqu’une quantité cherchée ou inconnue, ou une de ses parties, étant sous la forme de fraction, on réduit le tout à un même dénominateur, & qu’ensuite omettant les dénominateurs, il ne reste dans l’équation que les numérateurs. Voyez Equation & Fraction.

Ainsi, supposez , x étant l’inconnue, multipliez le tout par d, & vous aurez xd − bd = xx + cc + bd. Voyez Equation, Transformation &c. Ce terme est aujourd’hui peu en usage ; on se sert du mot de faire évanouir les fractions. Voyez Réduction. (O)

* Conversion, s. f. (Théol.) changement ferme

& durable qui survient dans la volonté du pécheur, en conséquence duquel il se repent de ses fautes, & se détermine sincerement à s’en corriger & à les expier. Il y a des théologiens qui regardent la conversion d’un pécheur dans l’ordre moral, comme un miracle aussi grand que le seroit dans l’ordre physique celui par lequel il plairoit à Dieu de ressusciter un mort : conséquemment ils sont très-reservés à accorder aux pécheurs les prérogatives qu’ils jugent ne devoir être accordées qu’aux saints ou aux pécheurs convertis depuis un longtems. Il est aisé de pécher par excès dans cette matiere, soit en croyant les conversions ou plus fréquentes ou plus rares qu’elles ne sont, soit en refusant opiniatrément aux pécheurs pénitens des secours dont ils ont besoin pour consommer leur conversion, & cela sur la supposition que ces secours doivent être conférés pour persévérer dans le bien, & non pour se fortifier contre le mal. V. Communion.

Conversion, (Jurispr.) est le changement d’une chose en une autre.

Conversion d’ajournement personnel en decret de prise de corps, est un decret qui se donne en matiere criminelle, lorsque l’accusé ne comparoît pas dans le délai porté par l’ajournement personnel, ou lorsque par les charges les juges trouvent qu’il y a lieu de faire arrêter l’accusé.

Conversion d’appel en opposition, est lorsque celui qui a interjetté appel d’une sentence par défaut, veut néanmoins procéder devant le même juge ; en ce cas il fait signifier à son adversaire un acte par lequel il convertit son appel en opposition. On prenoit autrefois des lettres de chancellerie pour faire cette conversion ; mais présentement elle se fait par requête, ou par un simple acte.

Conversion de bail conventionnel en judiciaire, se fait lorsqu’un héritage est saisi réellement. Le commissaire aux saisies réelles doit sommer le locataire ou fermier de déclarer s’il veut que son bail conventionnel soit converti en judiciaire pour ce qui reste à expirer. Le locataire ou fermier, & la partie saisie, peuvent aussi demander la même chose. On convertit ordinairement le bail conventionnel, pourvû que le prix de ce bail ne soit pas en grain, & qu’il ne soit pas fait à vil prix ni frauduleux ; & comme la condition du fermier ou locataire ne doit pas par la saisie réelle devenir plus dure qu’elle étoit auparavant, il n’est point tenu de donner caution, ni contraignable par corps, à moins qu’il ne le fût déjà par le bail conventionnel.

Lorsque le bail judiciaire est adjugé, les fermiers ou locataires conventionnels ne sont plus recevables à demander la conversion de leurs baux, suivant le reglement du 12 Août 1664.

Conversion de decret ; c’est lorsque pour la contumace de l’accusé, ou à cause des charges qui se trouvent contre lui, on prononce contre lui un decret plus rigoureux. Le decret d’assigné pour être oüi peut être converti en ajournement personnel, & celui-ci en prise de corps : on peut même de l’assigné pour être oüi passer recta au decret de prise de corps.

Conversion d’information en enquête, est un jugement qui civilise un procès criminel, & à cet effet convertit les informations en enquêtes. Le même jugement doit permettre à l’accusé qui devient défendeur simplement, de faire preuve contraire dans les délais ordinaires : on ordonne en même tems qu’il lui sera donné un extrait des noms, surnoms, âge, qualités, & demeure des témoins, afin qu’il puisse les connoître pour fournir de reproches. Cette conversion d’information en enquête ne peut être faite après la confrontation.

Conversion d’un procès civil en procès criminel, est un jugement qui ordonne qu’un procès commencé