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CONTAUR, s. m. construction de bâtiment de mer ; piece de bois dont l’épaisseur est de trois pouces sans la fourrure, & la largeur de treize ou quatorze, qui va en diminuant du milieu vers les extrémités de la proue à la poupe, & qui est placée dans la galere au-dessus de l’enceinte ou cordon. Voyez les dict. de Trév. & du Comm.

* CONTE, s. m. (Belles-Lettres.) c’est un récit fabuleux en prose ou en vers, dont le mérite principal consiste dans la variété & la vérité des peintures, la finesse de la plaisanterie, la vivacité & la convenance du style, le contraste piquant des évenemens. Il y a cette différence entre le conte & la fable, que la fable ne contient qu’un seul & unique fait, renfermé dans un certain espace déterminé, & achevé dans un seul tems, dont la fin est d’amener quelque axiome de morale, & d’en rendre la vérité sensible ; au lieu qu’il n’y a dans le conte ni unité de tems, ni unité d’action, ni unité de lieu, & que son but est moins d’instruire que d’amuser. La fable est souvent un monologue ou une scene de comédie ; le conte est une suite de comédies enchaînées les unes aux autres. Lafontaine excelle dans les deux genres, quoiqu’il ait quelques fables de trop, & quelques contes trop longs.

Conte, Fable, Roman, syn. (Gramm.) désignent des récits qui ne sont pas vrais : avec cette différence que fable est un récit dont le but est moral, & dont la fausseté est souvent sensible, comme lorsqu’on fait parler les animaux ou les arbres ; que conte est une histoire fausse & courte qui n’a rien d’impossible, ou une fable sans but moral ; & roman un long conte. On dit les fables de Lafontaine, les contes du même auteur, les contes de madame d’Aunoy, le roman de la princesse de Cleves. Conte se dit aussi des histoires plaisantes, vraies ou fausses, que l’on fait dans la conversation. Fable, d’un fait historique donné pour vrai, & reconnu pour faux ; & roman, d’une suite d’avantures singulieres réellement arrivées à quelqu’un. (O)

CONTEMPLATION, s. f. (Théologie.) selon les mystiques, se définit un regard simple & amoureux sur Dieu, comme présent à l’ame. On dit que cette contemplation consiste dans des actes si simples, si directs, si uniformes, si paisibles, qu’ils n’ont rien par où l’ame puisse les saisir pour les distinguer.

Dans l’état contemplatif, l’ame doit être entierement passive par rapport à Dieu ; elle doit être dans un repos continuel sans aucune secousse ou mouvement, exempte de toutes les activités des ames inquietes qui s’agitent pour sentir leurs opérations : de-là quelques-uns appellent la contemplation une priere de silence & de repos. La contemplation n’est point, ajoûtent-ils, un ravissement ou une suspension extatique de toutes les facultés de l’ame ; c’est quelque chose de passif, c’est une paix ou une souplesse infinie, laissant l’ame parfaitement disposée à être mue par les impressions de la grace, & dans l’état le plus propre à suivre l’impulsion divine. L’habitude de la contemplation est le comble de la perfection chez les mystiques ; & la vie contemplative, l’opposée de la vie active. Voyez Mystique. (G)

* Mais, selon les Philosophes, la contemplation est l’action de fixer une même idée ou objet dans son entendement, & de l’envisager par toutes les faces différentes ; ce qui est une des voies les plus sûres d’acquérir une connoissance exacte & profonde des choses, & de s’avancer vers la vérité.

* CONTEMPORAIN, adj. qui se prend quelquefois subst. (Gram.) qui est du même tems. Il y a peu de fond à faire sur le jugement favorable, ou défavorable, même unanime, que les contemporains d’un auteur portent de ses ouvrages. Ce Ronsard si vanté par tous les hommes de son siecle, n’a plus de nom.

Ce Perrault si peu estimé pendant sa vie, commence à avoir de la célébrité ; je ne parle pas du fameux architecte du péristile du Louvre, je parle de l’auteur encore trop peu connu aujourd’hui du Parallele des anciens & des modernes, ouvrage au-dessus des lumieres & de la philosophie de son siecle, qui est tombé dans l’oubli pour quelques lignes de mauvais goût & quelques erreurs qu’il contient, contre une foule de vérités & de jugemens excellens.

* CONTENANCE, s. f. habitude du corps, soit en repos, soit en mouvement, qui est relative à des circonstances qui demandent de l’assûrance, de la fermeté, de l’usage, de la présence d’esprit, de l’aisance, du courage, ou d’autres qualités convenables à l’état ; & qui marque qu’on a vraiment ces dispositions, soit dans le cœur, soit dans l’esprit. Je dis, ou d’autres qualités convenables à l’état, parce que chaque état a sa contenance. La magistrature la veut grave & sérieuse ; l’état militaire, fiere & délibérée, &c. d’où il s’ensuit qu’il ne faut avoir de la contenance, que quand on est en exercice, mais qu’il faut avoir partout & en tout tems le maintien honnête & décent ; que le maintien est pour la société, & que la contenance est pour la représentation ; qu’il y a une infinité de contenances différentes, bonnes & mauvaises, mais qu’il n’y a qu’un bon maintien.

CONTENT, SATISFAIT, CONTENTEMENT, SATISFACTION, (Synon.) ces mots désignent en général le plaisir de joüir de ce qu’on souhaite. Voici leurs différences : on dit, une passion satisfaite ; content de peu, content de quelqu’un ; on demande satisfaction d’une injure ; contentement passe richesse. Pour être satisfait, il faut avoir desiré ; on est souvent content sans avoir desiré rien. (O)

CONTENTEMENT, SATISFACTION, (Gram.) l’un de ces deux mots n’a point de pluriel, c’est celui de satisfaction ; & l’autre appliqué au monde désigne ses amusemens, ses plaisirs, &c. Ces deux termes au singulier ont encore quelque différence bien remarquée par M. l’abbé Girard.

Le contentement est plus dans le cœur ; la satisfaction est plus dans les passions. Le premier est un sentiment qui rend toûjours l’ame tranquille ; le second est un succès qui jette quelquefois l’ame dans le trouble. Un homme inquiet, craintif, n’est jamais content : un homme possédé d’avarice ou d’ambition, n’est jamais satisfait. Il n’est guere possible à un homme éclairé d’être satisfait de son travail, quoiqu’il soit content du choix du sujet. Callimaque qui tailloit le marbre avec une délicatesse admirable, étoit content du cas singulier qu’on faisoit de ses ouvrages, tandis que lui-même n’en étoit jamais satisfait. On est content lorsqu’on ne souhaite plus, quoique l’on ne soit pas toûjours satisfait, lorsqu’on a obtenu ce qu’on souhaitoit. Combien de fois arrive-t-il qu’on n’est pas content après s’être satisfait ? Vérité qui peut être d’un grand usage en Morale. Article de M. le Chevalier de Jaucourt.

CONTENTIEUX, adj. (Jurisprud.) se dit de ce qui fait l’objet d’une contestation, comme un héritage contentieux. On dit aussi un bénéfice contentieux, mais plus ordinairement un bénéfice en litige. (A)

* CONTENTION, s. f. (Gramm. & Métaph.) application longue, forte, & pénible de l’esprit à quelque objet de méditation. La contention suppose de la difficulté, & même de l’importance de la part de la matiere, & de l’opiniâtreté & de la fatigue de la part du philosophe. Il y a des choses qu’on ne saisit que par la contention. Contention se dit aussi d’une forte & attentive application des organes : ainsi ce ne sera pas sans une contention de l’oreille, qu’on s’assûrera que l’on fait ou que l’on ne fait pas dans la prononciation de la premiere syllabe de trahir, un e muet entre le t & l’r. Il n’y a entre la contention & l’ap-